Erik Truffaz nous surprend à chaque nouveau projet. Apparu comme un extra-terrestre sur la scène dans les "1990" avec une musique qu'on estimait entre Miles Davis et une sorte de technojazz (signe qu'on était surtout loin de comprendre ce nouveau phénomène), puis qui a, entre un Ladyland et un quartet surpuissants, fait exploser les frontières, Truffaz a continué sa route en invitant le rap, la musique arabe, la chanson française (dont un surprenant Christophe invité sur son Arkhangelsk). Le voici qui sort un coffret de trois albums, respectivement intitulés "Benarès", "Mexico" et "Paris". Arkhangelsk déjà nous renvoyait à une découverte géomusicale. Et le graphisme tout en blanc de la jaquette nous donnait le ton. Nous voici en Sibérie. Cette fois-ci, ce sont d'autres contrées qui ont fait craquer Erik Truffaz et notamment l'Inde. Il présentait ce nouveau projet, vendredi dernier, à Renens, une petite ville à proximité de Lausanne. Avec lui, Malcolm Braff, pianiste avec une personnalité musicale très appuyé, Indrani (voix) et Apurba (tablas) Mukherjee. Comme d'autres et après d'autres, Erik Truffaz a fait le voyage en Inde. Mais, c'est le "comme d 'autres" qui se discute. Car rien, mais absolument rien, ne le rapproche de Charles Lloyd, Jan Garbarek ou encore John Mc Laughin, ces autres qui ont fait le voyage en Inde. Rien ou si peu car ce voyage en Inde est teinté d'une forte dose de spiritualité. La trompette de Truffaz, en revanche, reste milesdavisienne (on dit comment?), plages et plages de douceurs, de tonalité reposante où chaque note n'existe que pour elle-même et en même temps que parce qu'il y en a d'autres avant, après, en même temps. La voix d'Indrani choruse comme une trompette tandis que piano et percussions dialoguent. C'est très beau, magique. On était sous le charme de cet Indian Project.
Il paraît que certains ne reviennent pas d'Inde. Moi non plus.
Gilles