Le retrait des troupes américaines d'Irak d'ici fin 2011, conformément à l'accord négocié entre Bagdad et Washington, représente un immense défi logistique, qui pourrait tourner à la mission impossible si le président élu Barack Obama décidait d'accélérer le mouvement.
"C'est comme un orchestre. Tout doit être accordé, synchronisé", explique le général Charles Anderson, vice-commandant de l'armée de Terre au sein du quartier-général américain responsable du Moyen-Orient et de l'Asie Centrale.
"Nous sommes là-bas depuis 2003, et nous avons beaucoup accumulé", reconnaît-il dans un entretien à l'AFP.
Le parlement irakien votera mercredi sur le projet d'accord de sécurité avec les Etats-Unis qui prévoit le retrait des forces américaines avant fin 2011.
L'armée de Terre possède en Irak près de 20.000 camions, Humvees, véhicules blindés résistants aux mines (MRAPs) et véhicules de combat Bradley et Stryker, ainsi que 470 hélicoptères. Sans compter stocks de munitions, dépôts de nourriture et hôpitaux.
"Dès qu'il faut déplacer un char de 70 tonnes, c'est dur. C'est encore plus difficile lorsqu'il s'agit d'en déplacer des centaines", souligne le général Anderson. "Mais nous avons fait des progrès, nous en avons les moyens".
Le retrait des troupes américaines après la guerre du Golfe en 1991 avait pris près d'un an.
Or, après plus de 5 ans de guerre en Irak, l'armée américaine se dit désormais capable de déployer une brigade de 3.500 hommes en Irak en un mois, tout en en retirant une autre quasi-simultanément.
Les troupes quittent le pays par voie aérienne, tandis que les équipements sont envoyés par la route au Koweït, lavés et décontaminés en conformité avec les règles strictes de l'Agence américaine de protection de l'environnement, avant d'être embarqués à bord de porte-conteneurs.
Alors qu'il fallait auparavant 6 mois pour renvoyer les équipements vers les dépôts de maintenance aux Etats-Unis, il en faut seulement deux aujourd'hui, assure l'armée.
L'armée va par ailleurs devoir laisser du matériel derrière elle. Mais les exigences irakiennes pourraient ralentir le processus, estime Steve Biddle, expert au Conseil en relations étrangères.
"Il s'est parfois révélé difficile de faire accepter nos équipements aux Irakiens", prévient-il. "Ils étaient réticents à prendre nos Humvees quand nous avons commencé à les remplacer par des MRAPs. Ils estimaient mériter des équipements neufs. Nous avons finalement accepté de les rénover, au prix d'un processus lourd, long et coûteux".
La tâche titanesque risque de singulièrement se compliquer si le futur occupant de la Maison Blanche décide un retrait d'Irak en 16 mois, conformément à ses promesses de campagne.
"Je pense que le retrait de toutes nos forces armées prendrait deux à trois ans", a prudemment jugé lundi le chef d'état-major américain Michael Mullen, en prévenant que ce rythme dépendrait des "conditions de sécurité", susceptibles de se détériorer lors du départ des Américains.
Selon un commandant américain en Irak s'exprimant sous couvert de l'anonymat, un retrait en moins de deux ans et demi est purement impossible.
"Avec tout ce que l'on a apporté en Irak, il n'y a aucune chance que nous puissions tout ramener en 16 mois. Dans l'urgence, cela peut tourner au cauchemar logistique", a-t-il confié à l'AFP.
Selon Jeff White, expert en défense au Washington Institute, il y a toutefois de fortes chances pour que Barack Obama s'en tienne à l'échéance de 2011.
"Naturellement, Obama va vouloir être en mesure de dire que le retrait est en cours, que les soldats rentrent à la maison, mais tout cela va être fait intelligemment, sans précipitation", prédit-il.