Le temps des héros

Publié le 03 novembre 2008 par Nellym67

Chaque époque fabrique ses héros, chaque société met en lumière les figures d'héroïsme reflétant souvent les fantasmes de tout un peuple, répondant aux attentes pas toujours exprimées de ceux qui, mécontents de leur sort, frustrés vis à vis de désirs inassouvis, et victimes d'eux-mêmes et d'une personnalité qui ne semble pas répondre à leurs aspirations extrêmes, retrouvent dans l'image de personnages réels ou fruits de l'imagination, une réponse, un réconfort, la possible identification de ce qu'ils pensent pouvoir donner, un modèle idéal.

Hier, Sébastien Loeb et Lewis Hamilton ont endossé le rôle des héros ponctuels, des héros d'un jour ou un peu plus, de ceux qui rentreront dans l'histoire de leur sport, y laissant l'empreinte de leur exploit et de leur esprit combattif. Les petits garçons, et les grands aussi, et bien sûr quelques femmes ont applaudi, célébré, vénéré... Encore quelques jours, quelques mois.

Il y a quelques semaines, on acclamait Ingrid Bétancourt, femme et mère courage, symbole de la liberté et révélation des souffrances d'un peuple et de ses combats, otage trop longtemps et finalement de retour parmi les siens, heureuse et prête de nouveau à poursuive le combat. Les téléspectateurs et tous les lecteurs et auditeurs étaient émus, célébraient cette femme, et oubliant ce qui faisait d'elle un être humain soucieux de retrouver les siens et son bonheur, ils étaient à l'affût de tous les signes prouvant son caractère extraordinaire.

Il y a quelques années, Jean Moulin, symbole de la résistance, était obligé de se cacher comme un anonyme afin de mener au mieux ses combats et les objectifs de libération de la France et des autres pays occupés. Il est le héros qui au prix de sa souffrance et de sa vie symbolise le libérateur de la République Française, récompensé par l'éternité que procure une place au Panthéon. Il est dans tous les livres d'histoire, certaines rues, écoles,universités, instituts, portent son nom.

On pourrait rajouter des héros de fiction, Robin des Bois, Hercule, et tellement d'autres, antiques ou contemporains, occidentaux ou orientaux... Des légendes d'un jour ou de toujours... dans lesquelles on va placer ses espoirs.

Aujourd'hui, la crise financière, la crise économique, la crise alimentaire ont fait perdre leurs repères à tous les hommes de la terre. Plus que jamais, ceux qui seront capables d'incarner la figure du héros sauront emporter la foule... Danger.

On fait déjà de Barack Obama un héros! On nous le présente comme tel partout, dans tous les médias. Il reçoit des soutiens de toute part, et surtout, les partis politiques de tout bord dans chaque pays se l'arrachent, et récupèrent son image telle celle d'une icône qu'on brandit comme un étendard, afin de ramener sur eux un peu d'attention qui le leur était pas spontanément destinée. Une incroyable effervescence entoure ce personnage, qui a réussi la prouesse de passer du stade du parfait inconnu il y a encore 4 ans à celui qui va représenter le renouveau du modèle occidental... par certains aspects, certes. Mais Barack Obama n'a pas encore agi. Il est en campagne. La ferveur représentant le moteur de ses soutiens, doit surtout l'encourager à changer le monde, à long terme... et pas à mettre la pression à celui qui au moindre dérapage ou à la première bifurcation par rapport à des engagements, prendra la figure du méchant capitaliste entretenant un système qui ne convient pas, ou adaptant ses décisions à des valeurs qui ne sont pas les nôtres. Tout simplement parce que, immobiles et bouche bée d'admiration, nous attendons trop de cet homme qui n'est pas - encore - un héros, pour nous et pour notre sort... Et nous oublions de construire une Europe qui n'est pas incarnée par un héros, mais qui en-elle-même porte le destin de héros anonymes qui ne savent pas où donner de leur énergie parce que les références sont trop floues... Une Europe héroïne par des choix de société fondés sur les valeurs de l'humanisme.

A nous, militants actifs, de choisir nos héros... Ceux qui symbolisent simplement un espoir... qu'il faudra entretenir et ne pas décevoir. Ou alors ceux qui existent et qu'on ne voit pas, parce qu'ils ne sont pas sous les projecteurs, loin de là, à l'image d'un vieux continent, qui ne reste qu'un VIEUX continent, si on admire toujours ailleurs, et qu'on ne procure pas nos propres réponses, ou alors qu'on ne sait pas les lire.

Demain est un autre jour :) et il ne faut pas nier tous les enjeux de cette campagne qui dépassent bien entendu ce débat.