Une loi devait permettre de mieux contrôler le vagabondage fiscal des entreprises françaises à l'étranger. Pas de chance: elle n'est plus à l'ordre du jour...
Roulements de tambour et déclarations martiales se succèdent devant les caméras depuis le début de la crise. "La lutte contre les paradis fiscaux est relancée", a tonné Fillon, le 16 novembre, après la clôture du sommet du G20. Quatre semaines plus tôt, devant le Parlement de Strasbourg, Sarkozy avait lui-même accusé le Luxembourg de donner le mauvais exemple en Europe.
Mais ces déclarations belliqueuses n'ont pas empêché le gouvernement de capituler en rase campagne: comme l'a annoncé La Tribune (10/11), Bercy vient discrètement de renvoyer aux calendes grecques une réforme qui devait permettre à ses services de mieux bloquer l'accès aux paradis fiscaux.
Tout était prêt; Le gouvernement avait prévu d'inclure un article spécifique dans la loi de finances rectificative pour 2008, que le Parlement doit adopter le 17 décembre. L'instruction fiscale qui l'accompagnait n'attendait que la signature du ministre du Budget, Eric Woerth. Mais, à la demande insistante du Medef, l'Elysée a fait reporter le projet sine die.
Le texte mis au rancart s'attaquait à la technique dite "des prix de transfert". Une combine qui permet aux entreprises de diminuer leurs impôts, en jouant sur les législations fiscales de pays aux taux d'imposition plus doux.
Les sociétés qui utilisent cette astuce vendent à leurs succursales installées dans ces contrées à fiscalité "extra light" des marchandises ou services qu'elles ont produits dans un pays où l'impôt sur les sociétés est plus lourd. Par exemple, un lot de vêtements fabriqués en France par la société Dupont sera cédé presque à prix coûtant à une filiale irlandaise. Toute petite marge et donc très faible imposition en France. Mais la filiale, elle, va commercialiser les fringues avec un solide bénéfice, peu imposé en Irlande ( 12,5%, contre 35% dans l'Hexagone). Le tour est joué.