Elle a déjà un pied rue de Solferino. Le deuxième devrait suivre. Incontestablement la dynamique est du côté de l’ex-candidate qui a sensiblement creusé l’écart depuis le vote des motions (29%) pour recueillir 43,10% des voix hier soir. La traditionnelle arithmétique des consignes de vote devrait se trouver dépassée par une très forte aspiration au changement. Benoît Hamon (22,83%) a beau appeler très clairement à un report sur Martine Aubry (34,50%.) la révolution de velours de la maison socialiste est en marche et rien ne semble en capacité de l’arrêter.
Le cœur des socialistes penche du côté Royal. La grande force de la présidente de la région Poitou- Charentes c’est de mettre de l’irrationnel partout. Hier soir, Benoît Hamon, éliminé, a été très explicite «Le choix que nous prendrons demain soir est un choix de culture et un choix politique éminent pour avoir un parti ancré à gauche, attaché au rassemblement de la gauche». Sans fioritures, le député européen a appelé àvoter« massivement »pour la Maire de Lille.
L’irrationnel, c’est que porteuse de l’image de la rénovation, Ségolène Royal, seule femme politique a être appelée par son prénom, est tout sauf un perdreau de l’année. Depuis les années Mitterrand, elle n’a jamais quitté les arcanes du pouvoir et, si elle met en avant les quadras qui l’entourent, elle veille à laisser dans l’ombre les vieux barons locaux qui la soutiennent (Guerini, Collomb, Frêche…) et lui assurent les indispensables voix de leurs fédérations savamment cadenassées.
Peu importe que Ségolène Royal ne soit pas, loin de là, une grande oratrice. Peu importe son côté folklorique, ses aspects un peu fofolle, elle représente l’occasion de mettre un coup de balai à une galerie de portraits, certes brillante, mais pas renouvelée depuis les années Mitterrand soit, un quart de siècle. Les militants qui au premier tour ont voté Hamon ne devraient pas y être insensibles.
Le paradoxe toujours, c’est que si Ségolène Royal devait l’emporter, elle succéderait à son ex-compagnon qui pendant plus d’une décennie a dirigé le parti socialiste. Un peu comme si, l’auberge socialiste ne semblait pas décidée à tourner la page de ses Ténardier des temps modernes.
Ségolène Royal se retrouverait toutefois avec « l’ardente » obligation de réussir la transformation de la vieille maison. Des travaux pratiques en quelque sorte, histoire de vérifier si elle a l’étoffe pour pouvoir prétendre à nouveau défier Nicolas Sarkozy en 2012.
Si à l’inverse, elle se faisait devancer par Martine Aubry, il lui appartiendrait de démontrer sa capacité à jouer, en héritière revendiquée de François Mitterrand, la cohabitation. C’est ça aussi l’autre caractéristique de Ségolène Royal : son côté insubmersible, énervant comme le sparadrap collé au doigt du capitaine Haddock ou époustouflant, c’est selon, par sa capacité d’encaisse digne d’un grand boxeur.