Une certaine idée de la gauche

Publié le 21 novembre 2008 par Nicolas J
Je suis déçu. J’avais pronostiqué une quasi égalité entre Martine Aubry et Ségolène Royal, entre 35 et 40%, positionnant Martine Aubry en tête. En fait, Ségolène Royal est en tête d’environ 10%. Mais je ne suis pas seulement déçu d’avoir perdu ce pronostic, je suis déçu car c’est une certaine idée de la gauche que j’avais en moi qui disparaît.
Le débat a tourné autour des personnes et des pratiques politiques. Il n’a pas tourné à la politique vraiment. Personnellement, je ne voulais pas y venir car ce débat « je suis plus à gauche que toi » me gonfle.
Il n’empêche. Ca tournait autour des personnes, le cœur en avant ! Tiens ! CC déclarait hier : « Pourquoi, aujourd'hui, je voterais pour Ségolène, si j'étais au PS... Elle a déclaré : "L'éducation nationale, c'est le patrimoine de ceux qui n'en ont pas." » Et voilà ! On vote sur une parole sans se soucier du reste ! On oublie tout ! Je passe sur la célèbre vidéo de Ségolène Royal parlant des enseignants et des 35 heures, pourtant très significative, j’en viens au fond. Dans le programme de Ségolène Royal, quand elle était candidate à la Présidentielle, quel était son principal projet pour l’éducation ? Rappelez-vous… Faire encadrer les délinquants mineurs par des militaires. Quand je vois maintenant un enseignant annoncer vouloir voter pour Ségolène Royal suite à une seule phrase, ça me met mal à l’aise,… Un encadrement militaire pour les jeunes délinquants.
L’autre jour, j’ironisais sur mon annexe sur les annonces intempestives de Ségolène Royal, sa manière de faire de la communication au jour le jour, sans aucun fondement.
Mon copain Dagrouik a fait récemment un billet pour démontrer que Ségolène Royal est à gauche. Ca m’avait bien fait rigoler : rien que le fait de se sentir obligé de faire un tel billet montre qu’on a un doute… J’avais quand même lu ce billet, comme tous les billets de Dagrouik, et m’étais retrouvé dans une torpeur sans précédent…
« Voilà aussi de quoi te faire saliver :« Rééquilibrer les prélèvements entre travail et capital en faisant peser les cotisations patronales, maladie et famille sur l’ensemble des richesses produites et non sur les seuls salaires. De cette façon, les entreprises qui augmentent des salaires et créent des emplois paieront moins de charges. »C'est la droite qui pense ainsi ? »
L’idée de diminuer les charges sur le travail pour les basculer sur les revenus est excellente et évidemment de gauche ! Mais ce n’est pas de ça dont il s’agit, il s’agit de basculer les charges sur l’ensemble des richesses produites.
C’est quoi les richesses produites ? Quoi qu’on en dise, c’est la valeur ajoutée. Pas les revenus, la valeur ajoutée. Cette mesure du projet de Ségolène Royal revient à augmenter la TVA. On pourra toujours tourner ça dans tous les sens, ça revient au même !
Une telle mesure est sans doute bonne car elle correspond à un rééquilibrage nécessaire de la fiscalité, mais qu’on la prenne en exemple pour démontrer « la gauchitude » d’un programme est sidérant, puisqu’elle revient à augmenter la TVA, la taxe sur la consommation…
C’est très bien pour la communication de gauche : « taxer les richesses produites ». C’est beau ! Presque émouvant ! Mais qu’on m’explique ce que ça veut dire, ce qu’il y a derrière.
Et qu’on l’approfondisse ! Par exemple, le travail n’est plus taxé pour payer la sécu, très bien. Mais les « partenaires sociaux », ils deviennent quoi ? Comment justifier la présence des syndicats de travailleurs dans la gestion de la santé si les travailleurs ne sont plus directement les payeurs ?
Poser des questions. Ouvrir des débats. Faire de la communication.
Je suis déçu, disais-je en introduction. Dans ce débat sur ce qu’est la gauche, la vraie gauche, je n’ai pas la réponse. Mais Ségolène Royal n’est pas MA vraie gauche. A la limite, cette mesure de basculement de la fiscalité est typiquement centriste : on remplace un truc pénalisant le travail par un truc pénalisant la production de richesses.
Ce n’est pas ce que j’ai envie de défendre, pendant les trois prochaines années, sur mon blog.
Amis socialos, remettez-vous, bordel ! Il faut de l’ambition, de la réflexion, de l’idéologie, … Pas de la communication pour retrouver le pouvoir… si on n'a rien de mieux à en faire.