L'Europe redoute la naissance d'une "Opep du gaz"

Publié le 20 novembre 2008 par Theatrum Belli @TheatrumBelli

Alors que l'Opep cherche à enrayer la chute du prix du baril, passé mardi sous les 55 dollars, le cartel du gaz s'organise.

Le dialogue s'annonce plus que jamais mouvementé sur la scène énergétique internationale. Alors que l'Opep, qui se réunit la semaine prochaine au Caire, doit formaliser une baisse de sa production, voilà que les pays gaziers cherchent à élaborer une stratégie commune. Non seulement les ministres des pays membres du Forum des pays exportateurs de gaz (FPEG) se réunissent le mois prochain à Moscou, mais ils veulent donner en attendant, statuts à la clé, un véritable poids géopolitique à ce Forum.

Si une "Opep du gaz" devait ainsi se dessiner, les pays consommateurs d'hydrocarbures, notamment européens, seraient plus que jamais sous tutelle. Anticipant leurs craintes, les pays les plus influents de ce Forum (la Russie, l'Iran, le Qatar, l'Algérie et le Venezuela contrôlent 73% des réserves mondiales de gaz) cherchent à minorer la portée de l'événement. Assurant en particulier qu'aucun pays producteur ne perdra sa souveraineté en matière de gestion des approvisionnements.

Accéder à la distribution

Il n'empêche, comme le souligne Claude Mandil, l'ancien directeur de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), "les pays consommateurs n'aiment guère les cartels". Et d'ajouter : "Dans le cas du gaz toutefois, les contrats à long terme sont tellement importants que le marché semble à l'abri de secousses trop brutales." Par ailleurs, contrairement au pétrole, le gaz est une énergie à laquelle on peut substituer d'autres sources. "Les producteurs doivent donc se méfier d'une flambée de leurs prix" prévient Claude Mandil.

Pour Frédéric Lasserre, directeur de la recherche sur les matières premières à la Société géné­rale, les pays gaziers voient d'un mauvais œil des distributeurs augmenter leurs tarifs auprès des consommateurs. "Ils veulent récupérer cette valeur ajoutée qui leur échappe. La Russie en particulier souhaite aujourd'hui accéder aux réseaux de distribution des pays européens." S'il devait y avoir un cartel du gaz, ce serait d'ailleurs l'Europe qui serait la première concernée, car dépendante d'un tout petit nombre de fournisseurs.

En attendant, sur le front pétrolier, l'Opep veut éviter la reproduction de la crise asiatique, en 1998. À l'époque, l'Organisation avait réduit ses livraisons trop tard. Résultat, les stocks n'avaient cessé de grimper, précipitant la chute des prix amorcée par le ralentissement de la demande.

Même si le cartel se garde bien de communiquer sur le sujet, un baril autour de 80 dollars lui irait bien. "Un prix suffisant pour assurer des recettes confortables et maintenir un bon niveau d'investissement", note Frédéric Lasserre.

Source du texte : FIGARO.FR