Mariée, malmariée, démariée, remariée …mais toujours pas vierge !

Publié le 19 novembre 2008 par Nicolas007bis


Petit retour sur une affaire qui a fait grand bruit, celle de l’annulation d’un mariage par le tribunal de Lille pour cause de non virginité non avouée.

Lundi dernier, la Cour d'appel de Douai a cassé ce jugement "remariant" de fait les deux époux.
Il faut dire que le tollé général qu’a provoqué ce jugement a mis une telle pression qu’il était difficile d’envisager une autre issue à cette histoire.

Dans une belle unanimité, tout ce qui compte en France et en Navarre, de Gauche comme de Droite, a proclamé son indignation, son émoi, sa colère d’autant plus facilement que ce jugement concernait un couple de musulmans et que notre très chère laïcité semblait avoir été bafouée !

Le pilonnage médiatique et les pressions politiques de haut niveau ont eu raison du « scandaleux » jugement !
Il me semble que sur cette histoire les réactions ont été, par un effet d’entrainement tout à fait classique, à la fois démesurées et peu adaptées.

Dans cette affaire, il faut distinguer 2 aspects qui ont été, à tort me semble t-il, joyeusement amalgamés:

Tout d’abord, le fait qu’un homme estime avoir été trompé par sa femme parce qu’elle ne lui a pas dit qu’elle n’était plus vierge.
On pense ce que l’on veut de cette tradition, que personnellement je trouve parfaitement honteuse pour un tas de raisons qui ont déjà été largement évoquées et sur lesquelles il n’est guère utile de revenir, mais à partir du moment où elle est connue, et donc implicitement admise par les 2 parties, il me semble qu'elle relève d'un contrat moral entre 2 personnes et que la collectivité n’a rien à en dire.

Je n’ai pas entendu toutes ces voix s’élever contre la morale que les « prudes et les puritains » comme Sarah Palin, imposent à leurs enfants et à leur entourage et qu’ils essaient d’imposer à leur pays, qui relève pourtant exactement du même moralisme sectaire !

Combien de traditions, d’origine religieuse ou non, peuvent nous sembler, selon nos propres critères moraux, inacceptables, scandaleux, anachroniques ou révoltants pour ne reprendre que quelques uns des qualificatifs qui ont été utilisés pour juger cette tradition là précisément. Alors pourquoi ce traitement de faveur pour l’exigence de virginité qu’à cet homme vis-à-vis de son épouse ?
Cette pratique n’est ni plus ni moins inacceptable que beaucoup d’autres sur lesquels le politiquement correct nous impose de ne rien dire par « respect des communautés », tolérance, humanisme ou par crainte d’être taxé de raciste, islamophobe ou sectaire !

Bien entendu, nous avons tout à fait le droit d’exprimer notre opinion sur ces pratiques mais pourquoi tout d’un coup un tel tollé ?
parce que cette fois-ci, nous avions un bon faux prétexte sur lequel nous engouffrer: le jugement !

L’autre aspect est l’aspect purement juridique.

Le jugement s’appuyait sur l’article 180 du Code civil qui dit notamment « … S’il y a eu erreur dans la personne, ou sur des qualités essentielles de la personne, l’autre époux peut demander la nullité du mariage.»

De ce point de vue, il ne me parait pas scandaleux de considérer comme un mensonge, au moins par omission, le fait de ne pas informer son futur époux de sa non-virginité alors que l’on sait pertinemment que pour celui-ci cet élément est déterminant.

De ce point de vue, on peut considérer qu’il y a eu tromperie sur un « élément essentiel », sachant que la notion d’élément essentiel doit être considérée, faute de plus de précision, en fonction de ce que les 2 parties considèrent comme essentiel.

Or dans le cas de ce mariage, les 2 époux en ont demandé, ensemble, l’annulation et rien ne permet de dire que la femme y a été contrainte. Il me semble d’ailleurs que, comme ce mariage était parti, celle-ci avait tout intérêt à le faire annuler (je dirais même sans grands regrets).

Pourtant, c’est dans une belle unanimité très politiquement correcte, qu’a réagi avec véhémence tout ce que la Société française compte comme mouvements féministes, associations antiracistes et laïques, partis politiques et autres sommités morales !
Ici on évoque la « …régression du droit et de la dignité des femmes » (Ségolène Royal) là on parle de « jugement proprement inconcevable dans notre société » (Martin Hirsch) là-bas on affirme même qu’une « telle décision est une atteinte à l'intégrité des femmes et une violation aux droits fondamentaux de tout individu» (Valérie Létard) !

Que n’a-t-on pas entendu lorsque, avec un discernement étonnant, Rachida Dati, à contre courant de tous, a jugé que «le fait d'annuler un mariage est aussi un moyen de protéger la personne qui souhaite peut-être se défaire du mariage».

Est-ce un hasard si les réactions du PCF et du FN se sont rejointes pour répondre à cette déclaration : «Ces propos sont une monstruosité juridique et une indignité de la part de la garde des Sceaux» (Marie-George Buffet) ou encore «positionnement délirant» (Marine Le Pen) ?

Malheureusement, on retrouve avec cette affaire, un exemple typique d’emballement médiatique et politique sur une affaire qui aurait du rester privée et que l’on utilise pour jouer les moralisateurs à peu de frais sur un sujet extrêmement consensuel (il est vrai qu’il y en a peu il faut en profiter), d’autant plus consensuel qu’il s’attaque à une tradition associée à tort ou à raison à l’Islam !

Or, que l’on exprime son indignation vis-à-vis d’une tradition qui n’est pas la notre, pourquoi pas, mais que l’on dévoie un jugement pour en faire le symbole d’une attaque contre la laïcité, la dignité de la femme ou la « violation des droits fondamentaux de l’individu », est à la fois inapproprié et dangereux sur le principe !

Outre le fait qu'à crier "au loup" à tort et à travers, on banalise des concepts graves, du fait de cet amalgame, on casse un jugement sur des pressions politiques, on parle de changer la loi et par des excès de langage, on jette l’opprobre sur une partie de la population.

Jusqu’à Valérie Boyer (députée UMP) qui menace « (...) Si la jurisprudence des tribunaux ne revient pas rapidement à la raison, je proposerai une loi visant à exclure la non-virginité comme cause déterminante du consentement dans un mariage et ainsi rétablir l'égalité naturelle entre hommes et femmes en matière de consentement » …on croit rêver !

Résultat, les ex-mariés qui se sont séparés, se retrouvent, bien malgré eux, mariés le temps de devenir les divorcés d’un mariage qui n’aura réellement duré que quelques heures…en attendant, tout le monde s’est bien défoulé contre ces pratiques honteuses que ces gens ont eu le culot de venir importer chez nous !