Je lis sans arrêt. Je lis le matin aux aurores, je lis dans les transports en commun quand je vais et reviens du boulot, je lis après dîner quand vous regardez la télévision. Par contre je ne lis pas aux toilettes si vous me permettez cette précision triviale. Je ne peux pas vivre sans lire, ni même sans savoir qu’une pile de livres attend que je m’intéresse à elle. Certains se rassurent en voyant leur réfrigérateur plein, moi c’est de voir la table où s’entassent mes nouveautés déborder de volumes non lus encore. Dans les journaux, les magazines, je coche les critiques littéraires avant de reporter dans mon petit carnet la crème de ce que je me crois obligé de lire. Je lis, je lis, mais hélas ! je ne retiens pas tout. A une époque je me suis interrogé, ne fallait-il pas lire moins mais faire l’effort de mémoriser plus ? J’ai écarté cette idée car pour paraphraser une maxime bien connue, je crois qu’on peut dire « Lisez, lisez, il en restera toujours quelque chose ». Sans faire de la psychanalyse de bistrot il me semble évident que cette boulimie de lecture me sert à assouvir mon besoin de vivre d’autres vies dans des mondes parallèles. Certains combattent la société les armes à la main, d’autres se lancent dans le militantisme, voire la religion. Moi j’ai choisi un moyen en accord avec ma nature, je m’exclus du jeu et j’observe, m’imprégnant du monde qui m’entoure non pas en y mettant les mains mais pas capillarité livresque si je puis dire. Je me construis non par le vécu mais par le lu, ce qui me permet de faire le tri dans les émotions, celles que j’accepte et choisis de vivre et celles que je connais par la souffrance/plaisir des autres. Chacun mène la vie qui lui plaît, nul ne détient la vérité, l’important étant de faire ses choix et de les assumer.