Le nom de cette journée prête à sourire, mais le sujet de cette journée doit cesser d'être tabou.
Aujourd'hui a lieu la Journée mondiale des toilettes, une journée de mobilisation s'inscrivant dans la continuité de " l’année internationale de l’assainissement " déclarée par l'ONU pour 2008. Un fond mondial pour l’assainissement a d'ailleurs été créé par les Nations Unis le 14 mars 2008 pour que la problématique de l’eau soit accompagnée systématiquement du traitement de la problématique des toilettes.Le but de cette journée est d'alerter les médias et les décideurs sur un sujet peu mobilisateur et pourtant d'ampleur internationale.
Pour illustrer cette journée peu banale, je reprends ci-dessous (et en partie) un article du Monde du 29 Octobre 2008, écrit par Hervé Morin.
Pour réduire la pauvreté dans le monde et améliorer la santé des déshérités, la méthode la plus simple est de construire des toilettes. C'est la conclusion à laquelle est parvenu le Réseau international sur l'eau, l'environnement et la santé (Inweh), branche canadienne de l'Université des Nations unies. Dans un rapport rendu public le 20 octobre 2008, ce groupe de réflexion recommande aux gouvernements une approche plus coordonnée et intégrée des questions d'approvisionnement en eau potable et d'accès à des sanitaires fonctionnels.
Quelques chiffres pour illustrer l'ampleur du problème:
- environ 2,5 milliards de personnes - plus d'un tiers de l'humanité - utilisent des latrines qui n'offrent pas de garantie contre le développement de maladies liées aux matières fécales.
- 1,2 milliard de personnes n'ont d'autre ressource que de déféquer dans la nature, selon des données collectées par l'Organisation mondiale de la santé et l'Unicef.
- ces personnes passent une demi-heure en moyenne chaque jour à faire la queue dans des installations publiques ou pour trouver un endroit isolé. Soit deux jours ouvrés par mois.
- l'impact sanitaire est considérable. Les maladies diarrhéiques tuent 1,8 million de personnes chaque année. On estime que 88 % de ces affections ont pour origine un manque d'hygiène et d'accès à des sanitaires sûrs.
- les enfants, dont 5 000 meurent chaque jour, paient le plus lourd tribut. En Afrique subsaharienne, la moitié des lits d'hôpital sont occupés par des patients souffrant de maladies véhiculées par les matières fécales. Dans le monde, 200 millions de tonnes d'excréments humains finissent dans des rivières chaque année, contaminant les eaux de surface, voire les nappes phréatiques, avec leur lot de bactéries, virus et autres parasites.
Et une carte tant qu'on y est:
Cet enjeu sanitaire figure rarement au premier plan de l'agenda international. "La question reste tabou, reconnaît Zafar Adeel, directeur de l'Inweh. Les politiques hésitent à aborder ces problèmes dans leurs discours. Ce n'est pas "poli"." Les Nations unies ont surmonté cette aversion pour l'année 2008. Et le développement des toilettes était l'un des objectifs du millénaire, définis en 2000 : diminuer par deux le nombre de personnes n'ayant pas accès à des sanitaires d'ici à 2015.
L'investissement a été chiffré. Il en coûterait au minimum 38 milliards de dollars. Mais pour 1 dollar dépensé, 9 dollars seraient réinjectés dans l'économie, sous forme de productivité accrue et d'état sanitaire amélioré.
Ces enjeux d'assainissement ne sont pas réservés aux pays en développement. Au Canada, indique M. Adeel, "le service est probablement inadéquat" dans certaines zones "indigènes". En Occident, "les systèmes de distribution d'eau sont souvent anciens. Seront-ils capables d'encaisser des événements climatiques extrêmes qui accompagneront le réchauffement de la planète ?, s'interroge-t-il. Il faut s'en soucier. Et le plus tôt sera le mieux."
Pour aller plus loin:
- Découvrir le site et l'action de la World Toilet Organization :