Le malheur des uns ne fait pas forcément le bonheur des autres. A droite on se délecte ouvertement de la cacophonie du PS, tout en reconnaissant comme Patrick Devedjian que, « Les Français ont besoin d’une opposition crédible ». Après la crise financière et la crise économique les clignotants passent au rouge et laissent présager l’émergence d’une crise sociale. Faute d’une courroie de transmission structurée le gouvernement a tout à craindre de mouvements autonomes, difficilement prévisibles et contrôlables.
Les rebondissements du parti socialiste éclipsent opportunément une semaine ponctuée de conflits sociaux. Bernard Thibault, secrétaire général de la CGT, a rappelé, dimanche sur France Info, qu’ ”il y a une urgence à se pencher sur la situation sociale” de la France.
Après Air France la semaine passée, ce sont les services publics qui vont se mettre en grève cette semaine. Les syndicats de la Poste, de la SNCF et de l’Education nationale, contestant des réformes annoncées par leur direction, appellent à des journées de mobilisation durant la semaine.
Ces mouvements sont à rapprocher de la note de conjoncture publiée le 7 octobre par une association professionnelle (Entreprise et personnel) qui regroupe plus de 150 responsables de ressources humaines de grandes entreprises. Ce document intitulé « La déchirure », évoqué dans Le Monde 2 du 18 octobre, dresse un constat alarmiste de la situation sociale. Selon les auteurs, tous les ingrédients d’une crise sociale sont réunis ; faible adhésion au pouvoir, absence d’alternative politique crédible, multiplication probable des situations personnelles difficiles et des frustrations et, montée de la conflictualité dans nombre d’entreprises contraintes à la rigueur voire aux réductions d’effectifs.
Et pourtant le quotidien Les Echos dans son édition électronique du 18 novembre reprend les conclusions d’un autre baromètre de DRH (CSC) qui relève à l’inverse que les indicateurs classiques de grogne sociale sont en baisse. A l’appui de ce constat, la chute de 84% du nombre de jours de grève mais aussi des litiges aux conseils des prud’hommes (-64 %) tandis que les licenciements pour faute et les affaires de harcèlement moral ont décliné, respectivement de 67 % et 74 %.
Pas de conclusions hâtives pour autant. Les DRH reconnaissent que les conflits, de plus en plus individuels, sont désormais plus difficilement perceptibles. Le gouvernement se trouve donc contraint à naviguer à vue, alors que l’hostilité à son égard est croissante.
Les candidats du PS au poste de Premier secrétaire ne s’y sont pas trompés. Tous sans exception ont tenu un discours résolument à gauche alors qu’il y a quelques mois encore, la droitisation du PS semblait un phénomène inexorable. Et tous ont promis que le Parti socialiste allait « redescendre dans la rue sur la question sociale ».
Bernard Thibault ex interlocuteur syndical préféré de Nicolas Sarkozy a de son côté appelé lundi à plus de mobilisation sociale « moi je souhaite qu’il y en ait encore davantage, sinon les salariés risquent d’être les vrais sacrifiés de cette période ». Le secrétaire général de la CGT a demandé au président de la république lui-même d’avoir une réunion en urgence sur la situation sociale.
Selon Le Figaro qui reprend une source gouvernementale, ce qui inquiète en fait le gouvernement, c’est la propagation du mécontentement social en dehors de la sphère publique au printemps : «Si la crise économique s’installe et que le chômage augmente, la contestation peut très vite se propager à l’ensemble de l’économie et devenir difficile à gérer, avoue une source gouvernementale. On sera alors à la merci d’une erreur sur une mesure anodine ou d’une réforme mal expliquée.»