Le nom de Winterbottom fait souvent résonner quelques légers quolibets dus au fait que le bonhomme tourne vite, beaucoup, et sans doute trop. Son prochain film à sortir, Un coeur invaincu, sera le quinzième en 12 ans. pourtant, à bien y regarder, y a-t-il vraiment de mauvais films dans la carrière du bougre? Non. Quelques pièces dispensables, tout au plus, mais rien qui mérite une lapidation.
Dans la jongle des films winterbottomiens, entre un western, une comédie romantique et des docu-fictions, il y eut également un film de science-fiction, Code 46, le seul à ne pas avoir eu les honneurs d'une sortie en salles. Impossible à vendre, sans doute. Sous des airs de film d'anticipation, il s'agit avant tout de la description quasiment naturaliste d'une romance vraie et sincère. C'est là le plus intéressant dans Code 46 : comment Winterbottom détourne et met à profit les codes de la SF pour livrer un objet spleenesque et délicatement romantique. Un inspecteur télépathe, une fabriquante de faux papiers, un univers cosmopolite et paranoïaque, où l'on parle un dérivé de l'esperanto...
Si l'on devait donner un élément de comparaison pour Code 46, il conviendrait de citer le Solaris de Soderbergh, les deux films partageant cette mélancolie extra-terrienne et cette sensation que l'amour vaut tous les voyages intersidéraux. Dit comme cela, ça n'est pas très attirant ; mais Winterbottom dépeint ses personnages avec une telle économie de mots qu'un charme vaporeux se met à opérer. Il y a peu de contact physique entre les êtres, et pourtant Code 46 apparaît comme un film charnel, quasi érotique à force de dissimuler jusqu'au plus petit des désirs. L'improbable duo Samantha Morton / Tim Robbins pousse plus loin la bizarrerie de l'ensemble, faisant de Code 46 une curiosité qui ne convaincra pas toute l'audience mais qui en intriguera plus d'un.
8/10