Historiquement, dès le 19ème siècle, les vignerons du Beaujolais avaient coutume de commercialiser très tôt leur récolte (le cépage Gamay est en effet particulièrement adapté aux vins primeurs). Pas encore de battage médiatique, ni d’envoi de Beaujolais nouveau à l’autre bout de la planète cependant. Le vin était alors quasi exclusivement destiné aux bistrots de la région lyonnaise, qu’il rejoignait le plus souvent par péniche via la Saône (trajet au cours duquel il achevait sa fermentation), et à quelques établissements parisiens.
Le premier tournant a lieu avec la suppression, le 11 mars 1951, du principe d’échelonnement de sortie des vins des propriétés. Cette pratique planifiait la commercialisation des vins sur l’année, afin de toujours pouvoir assurer l’approvisionnement…des armées !
Puis un arrêté du 8 septembre 1951 vient stipuler que « les producteurs ne sont autorisés à faire sortir de leurs chais les vins de la récolte 1951 bénéficiant de l'appellation d'origine contrôlée qu'à dater du 15 décembre 1951 " (le décret d’appellation en Beaujolais remonte au 12 septembre 1937).
Aussitôt, les vignerons du Beaujolais se mobilisent et demandent l’autorisation de commercialiser leur vin avant la date du 15 décembre, faisant valoir que celui-ci n’est pas un vin de garde, mais un vin à consommer rapidement. Ils obtiennent gain de cause, une note de l’Administration des Contributions Indirectes du 13 novembre 1951 venant préciser « dans quelles conditions certains vins à appellation contrôlée peuvent être commercialisés dès maintenant, sans attendre le déblocage général du 15 décembre prochain ". Cette note marque la naissance de fait du Beaujolais nouveau, bien qu’elle concerne également d’autres appellations: les Côtes-du-Rhône, la Bourgogne (vins blancs) et Bourgogne Grand Ordinaire, le Bourgogne Aligoté, le Mâcon (vins blancs), le Gaillac et Gaillac Premières Côtes (vins blancs), le Muscadet.
Pendant 15 ans, la date de « déblocage » du Beaujolais nouveau (qui devait être préalablement autorisée par l’Institut National des Appellations d’Origine) est variable. C’est en 1967 qu’est instaurée une date fixe : celle du 15 novembre, à minuit. La production augmente au rythme de la notoriété grandissante de l’événement, et en 1985, la date du troisième jeudi de novembre, encore en vigueur aujourd’hui, est choisie, pour des raisons pratiques (éviter que le déblocage ne tombe un week-end) et de calendrier (éviter que la date soit trop proche de celle du 11 novembre). Cette année–là, la production est de 500 000 hl, contre 220 000 en 1967 et 15 000 en 1951. Pour 2008, on estime la production a environ 800 000 hl.