G20 : les pays pauvres, à nouveau les dindons de la farce ?

Publié le 14 novembre 2008 par Eyes

Depuis trente ans, les pays pauvres subissent de plein fouet les conséquences d’une course effrénée au profit qui a fait perdre la tête à la finance mondiale. A l’heure où le G20 convie les pays émergents, les plus pauvres ne sont même pas invités à discuter de la refonte du système financier international.La chronique du drame est éclairante

  • Acte 1. l’endettement. Dans les années 70, à la recherche de débouchés pour leurs liquidités, les banquiers occidentaux endettent massivement les pays du Sud à des taux (flottants) défiant toute concurrence. Les Etats leur emboîtent le pas, en faisant crédit à des dictatures féroces comme aux Philippines, au Congo (ex-Zaïre) ou en Argentine, en échange de leur allégeance au bloc de l’Ouest.
  • Acte 2. La crise de la dette. En cause, au-delà des motifs géopolitiques: la remontée en flèche des taux d’intérêt, suite à une décision du Trésor américain et la dégringolade des revenus d’exportation avec la chute des prix agricoles.
  • Acte 3. L’ajustement structurel. A partir des années 80, les grands argentiers du G7 exigent des pays pauvres qu’ils sacrifient les dépenses de santé, d’éducation ou d’emploi pour rembourser la dette. Le FMI, désœuvré après la sortie du système de change fixe, est chargé d’imposer privatisations bradées, libéralisations commerciale et financière et retrait de l’Etat. Pour le plus grand profit des investisseurs étrangers. L’ouverture des marchés met en péril les cultures vivrières, source de revenus n°1 de la population rurale, et tue dans l’œuf les industries naissantes. Une minorité s’accapare les rentes minière et pétrolière. Les bénéfices colossaux réalisés au Sud fuient offshore.

Une réforme nécessaire depuis longtemps

Au total, les pays en développement consacrent encore chaque année 456 milliards de dollars à rembourser leur dette. La fraude fiscale leur coûte 300 à 500 milliards de dollars par an. En face, les quelque 100 milliards de dollars annuels d’aide au développement et les maigres allègements de dette consentis depuis dix ans (88 milliards de dollars) font office de caution à cette ponction massive des richesses du Sud.

Mille fois, nous avons demandé au G8 que la finance mondiale soit mieux régulée et mieux partagée. Mille fois, nous nous sommes heurtés à un mur. Voilà que la folie de la finance mondialisée menace nos bourses et nos emplois, et nos gouvernements s’empressent de convoquer, à huis clos, les vingt pays les plus puissants au chevet du capitalisme pour le préserver sans le remettre en question.

Bien sûr, tous les pays du Sud ne sont pas logés à la même enseigne. La Chine et l’Inde, qui ont su tirer profit de la mondialisation, sont devenues incontournables. La participation de l’Indonésie, le Brésil ou l’Afrique du Sud, victimes notables de la fuite des capitaux et qui portent encore les stigmates d’une dette largement illégitime, peut constituer un élément nouveau.

Mais les pays les plus pauvres, “ceux qui souffriront le plus de la crise [et] qui en sont les moins responsables”, selon le mot du Secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon, attendront.

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