Etc… 4 Miam sur 5.
Un chef trois étoiles Michelin qui sort de sa réserve ombragée du Pavillon Ledoyen pour ouvrir un bistrot chic, forcément ça crée l’événement. Christian Le Squer n’est pas homme à faire parler de lui. Discret, il préférait jusque là tenir la barre de son restaurant plutôt que de se pavaner à droite et à gauche. Et puis subitement, alors que personne ne l’attendait, il sort de sa tanière en compagnie de Bernard Pinaud, ancien chef de La Marée, à qui il a confié la responsabilité des fourneaux. Il passe parfois en fin de service prendre le pouls des gourmets mais comme Bernard maintient magistralement le cap, il retourne confiant dans sa luxueuse cuisine des Champs – Elysées. Sur le chemin, il repense à cette « Fantaisie Voyageuse : Terre et Mer » et se dit en toute modestie que c’est une réussite. Pensez donc, des pieds d’agneau et des foies de volaille enroulés dans du haddock fumé. Le tout présenté façon nems sur un lit de mayonnaise et de salade. C’est géométrique, sophistiqué mais techniquement irréprochable comme l’est le cabillaud mariné à cru. Frais, le poisson est habillé de sel pendant une vingtaine de minutes. Alors qu’il commençait à se plaire dans ce nouveau costume, on le déshabille pour le faire mariner dans une pâte de soja au saké. Quelques retouches plus tard, on a enlevé tout ce qui dépassait, on le brûle quelques secondes sous la salamandre et on le laisse partir le petit doigt sur la couture vers votre table, escorté de vinaigre balsamique, de tétragone et de raisins secs. L’émotion est palpable à chaque bouchée. Et que dire du boudin maison au jus de fruits passion. Rencontre improbable arbitrée par une purée montée au lait aussi légère qu’un nuage. Déjà un grand classique ! Quant au Carambar de votre enfance, il se cache dans une coque de glace posée sur des cheveux d’ange au chocolat et lait fumé. Du grand art !
2, rue La Pérouse. 16e. 01 49 52 10 10. Menu : 68 € (deux verres de vin inclus). Carte : 71 €.M° : Kléber ou Boissière. Fermé samedi midi et dimanche.
Il faut s’armer de patience pour espérer obtenir un strapontin gourmand dans cet hôtel particulier acquis par la maison Baccarat. Et quand enfin le « oui avec plaisir » se fait jour à l’autre bout de la ligne, la joie est rarement dissimulée. Enfin, il nous est offert la possibilité d’arpenter les différentes salles de cette demeure où Baccarat aligne ses créations anciennes et actuelles. Verres, lustres, carafes... les yeux ne savent plus où se poser et l’on finirait presque par oublier qu’ici, les saveurs ont aussi leur mot à dire. Elles sont orchestrées par le chef Thierry Burlot qui abat sa carte de cuisine contemporaine. Au diable les manières dans ce décor aussi clinquant que bluffant, on fait mouillette avec les asperges vertes que l’on plonge dans des oeufs bio à la coque rehaussés d’une émulsion à la truffe avant de succomber aux parfums d’un risotto aux girolles de Sologne. Les papilles désormais en jambe, on ose le veau fermier servi avec des épinards et une sauce ravigote aux huîtres. Comme un uppercut de saveurs qui se télescopent, la rencontre de la terre et de la mer dans toute sa splendeur. On ne quitte pas ce cocon étincelant sans un détour par le sucré et face aux multiples propositions, rien de tel que l’assiette de dégustation des desserts pour ne pas avoir de regrets.
11, place des Etats-Unis. 16e. Tel : 01 40 22 11 10. Carte : de 95 à 130 €. Fermé le dimanche.
La Villa Corse, acte 2, scène 1. On connaissait déjà la version 15e arrondissement, boulevard de Grenelle, voici sa jumelle version rive droite. Ce n’est pas une annexe mais une copie conforme avec l’immense salle à manger surmontée d’une mezzanine, le salon bibliothèque avec tables basses peu pratiques pour déjeuner, la cheminée et le coin fumoir. Le décor est planté. Comme à la cantine, on fait la queue devant l’hôtesse qui, le carnet de en mains, disperse, dispatche, ventile. On voulait le coin bibliothèque, on aura la table près de la cheminée. Surtout, ne pas bouleverser son plan de table soigneusement établi selon des règles qui sont les siennes et que l’on ne cherche pas à comprendre. Direction le feu sans les bûches puis traversée vers l’Ile de Beauté où nous attendent tous les produits qui forment le patrimoine culinaire Corse. Premier arrêt, la carte des vins. Ils sont tous là venus directement de Patrimonio, de Calvi, d’Ajaccio, de Sartène sans oublier Figari et le Cap Corse. On ne sait plus où donner de la papille et de la pupille. Leccia, Gentile, Arena, Orenga de Gaffory, Landry, Renuci, Culombu, les plus beaux représentants de ce vignoble sont présents au grand désarroi des Bordelais, Bourguignons et Champenois relégués pour une fois à la fin de la carte. Le vin derrière la luette, il reste à choisir le solide. Tout donne envie, de la simple salade d’artichauts au parfum de noisettes au ravioli de cèpes et châtaignes en passant par les supions et les tomates cerises. On finit par craquer pour les grands classiques, un éventail de charcuteries, un stufatu de veau aux olives et pommes rattes et un civet de sanglier et son ravioli à la châtaigne. On reviendra pour le foie gras mariné au muscat du Cap, les cannellonis farcis au brocciu, les sauces au miel, la tome et le fiadone aux écorces d’agrumes.
141, avenue Malakoff. 16e. Tel : 01 40 67 18 44. Menu : 25 € (au déjeuner). M° : Porte Maillot.
Carpaccio de courgettes, parmesan et ratatouille fraîche, millefeuille de tomates mozzarella, croustillant de saumon, sauce vierge et julienne de légumes en corolle…à première vue, cette carte a de l’allure. Ca sent la fraîcheur, la rosée du matin sur l’étal du marchand de légumes, la balade du chef qui se faufile panier sous le bras pour choisir ici des tomates cerise, là une salade et un peu plus loin, de la ciboulette. On se réjouit d’avance de suivre scrupuleusement les indications de nos nutritionnistes à savoir « cinq fruits et légumes par jour ». Entrée, plat, dessert, le compte est bon. Mais dans l’assiette de ce nouveau restaurant sur deux étages, si ce n’est pas un mélodrame, c’est plutôt le méli-mélo. On sent chez ce chef, la volonté de bien faire, d’oser, mais au final, c’est trop. Trop de parfums, de saveurs, de textures différentes, de quantité comme pour ces œufs pochés à la crème, ciboulette et concassée de tomates. L’idée est joyeuse, printanière mais pourquoi toute cette crème qu’une demie baguette ne parvient pas à éponger ? On a envie de simplicité et si l’abondance ne nuit pas, elle n’est plus d’actualité. Pour preuve, ce crumble de chèvre, il faut oser, accompagné de tagliatelles de courgettes croquantes. On ne sait plus qu’en faire, il y en a partout, on n’en voit pas le bout. On sait que c’est bon, que ça fait du bien à l’intérieur comme certains yaourts, on sait que maman nous a appris à finir son assiette mais de grâce, diminuez les quantités car on finit par croire que quelqu’un nous a lancé un gage dans la salle. « 5 euros sur le chroniqueur masqué qu’il ne finit pas ses courgettes ». Avalées les courgettes mais jusqu’à la fin de la saison de ce fruit, eh oui ce n’est pas un légume, je n’en mangerai plus. Heureusement, l’agréable émotion au chocolat permet de faire passer le goût de ces courgettes. Allez, on épure un peu tout ça et ça devrait le faire comme on le dit dans les milieux autorisés.
9, rue des Acacias. 17e. Tel : 01 44 09 99 99. Menu : 35 €. Fermé samedi midi et dimanche. M° : Argentine.
Jimmy Merle ayant travaillé tout l’été, se trouva fort dépourvu quand l’automne fut venue et qu’on lui annonça que son restaurant, Miss Betsy, était vendu. Heureusement, non loin de là, la Villa Pereire cherchait un chef. Et notre Merle de s’installer derrière les fourneaux de ce lounge clinquant. Par l’odeur alléchée, le chroniqueur poussa la porte et patatras, rien ne va. Nems de langoustines aux petits légumes sauce aigre douce, trop gras, foie de veau au vinaigre de framboise et écrasée de pommes de terre, trop froid, nems banane et Nutella, trop passe-partout. Vient-on au restaurant pour manger du Nutella ? Une savoureuse sauce au chocolat ne serait-elle pas plus jouissive ? Jimmy Merle nous ayant enchanté à l’époque de Miss Betsy, ce repas ne pouvait être qu’un incident de parcours et c’est donc huit jours plus tard que nous fîmes notre retour. Et re patatras. On nous dit que ce n’est pas la carte du chef, qu’il est en train de composer la sienne, qu’il ne fait pour le moment que cuisiner celle de son prédécesseur. Certes mais ça n’empêche que l’écrasée de pommes de terre qui accompagne le foie de veau était de nouveau froide et à peine salée. Rien ne va ? Non, il y a des assiettes bien tournées comme la déclinaison de thon en tataki, en marinade et en tartare, l’original risotto au citron et à la chlorophylle ou les noix de Saint-Jacques en brochettes posées sur un établi de carottes et de panais. C’est joliment présenté, on aimerait ne pas y toucher. Au final, subsiste une impression étrange, celle d’une cuisine qui semble pour certains plats parfaitement maîtrisée et pour d’autres totalement loupée. Et le sucré me direz-vous ? Tiramisu, crème brûlée, moelleux au chocolat, assortiment de glaces…rien d’innovant excepté le salpicon de Granny-Smith mentholée et sa crème au curaçao, original et savoureux.
116, boulevard Pereire. 17e. Tel : 43 80 88 68. Formules au déjeuner : 19,50 et 24,50 €. Carte : de 28 à 56 € à la carte. Fermé samedi midi et dimanche. M° : Pereire.
« L’Accolade bonsoir ». « Pardon, je ne suis pas chez Miss Betsy ? « Non, le restaurant vient de changer ». Alors va pour l’Accolade et tant pis pour Miss Betsy installée ici en lieu et place de Chez Rose. Dommage, tout le monde en disait du bien. Au final, un repas à l’Accolade suffit à nous faire oublier cette séduisante Miss. La faute à qui ? A Sébastien Altazin, formé par Michel Rostang et que l’on a connu au Café Moderne derrière la Bourse. A 31 ans, il s’est dit que son heure était venue, qu’il était temps d’être le seul maître à bord. Après plusieurs tentatives dans le 2e et dans le 11e, il croise un ancien chef de cuisine étoilé Michelin devenu agent immobilier, « j’ai quelque chose pour toi ». En deux coups de cuillère à pot, voici Sébastien derrière ses nouveaux fourneaux pour mitonner une cuisine à l’ardoise qu’il efface tel un instituteur à la fin de la journée. Une fois le dernier client parti, il saisit son téléphone et passe les commandes à ses hommes de main. Au petit matin, café à la main, il inspecte ces cageots et ces caissettes qui regorgent de produits frais comme la rosée du matin. Les Saint-Jacques d’Erquy seront poêlées et servies avec un risotto et une crème de cèpes, le potimarron se métamorphosera en soupe dans laquelle plongeront des copeaux de Fourme d’Ambert, les pommes de terre Rattes du Touquet épouseront des champignons et entreront en salle aux bras d’une côte de veau quant aux bananes, elles se transformeront par magie en soufflé. C’est tout le talent de Sébastien, ne jamais lasser son public, tenter de surprendre son petit monde tous les jours en fonction du marché et en respectant les saisons. Que demander de plus ? Une accolade avec le chef pour le remercier.
23, rue Guillaume Tell. 17e. Tel : 01 42 67 12 67. Menus à l’ardoise : 20 € (au déjeuner), de 34 à 47 € à la carte. Fermé samedi midi et dimanche. M° : Pereire.
Rech, échoué sur l’avenue des Ternes comme le porte-conteneurs Rokia Delmas au large de l’île de Ré…tout le monde sait que ça existe mais personne ne tente quoique ce soit pour sauver ce qui peut encore l’être. Et puis au mois de mars dernier, un nouveau capitaine pointe ses galons, décide de redresser la barre et le tout Paris de s’ébranler sur le quai de la gourmandise pour reprendre place à bâbord et à tribord. Ce capitaine, c’est Alain Ducasse. Rien que le nom et tout le monde frémit…de peur ou d’extase, c’est selon. Du coup, nouveau chef que l’on peut saluer en grimpant au premier étage, nouvelle équipe qui cherche par téléphone à vous imposer un menu parce que vous avez réservé pour huit et qui vous répond que vous n’êtes pas chez Hippopotamus quand vous lui faîtes remarquer que le problème avec leur menu, c’est que le choix n’est pas très large. Enfin, cerise sur le gâteau, le maître des lieux qui vous indique sèchement que la maison est non-fumeur alors que vous sortez à peine de son étui un cigare pour…l’offrir. Question, prendre le large ou accoster pour apprécier la carte marine ? Option numéro deux adoptée avec une joie non dissimulée de redécouvrir les grands classiques de la maison gentiment revisités façon 21e siècle comme cette impeccable aile de raie servie avec des carottes des sables de Créances (dans le Cotentin) et ce délicieux bouillon d’herbes où ormeaux et bulots batifolent avec des algues et des bonites séchées. Quant aux sardines crues en filets marinés aux citrons confits et tomates, rien que la présentation vaut le détour. Nichées dans une assiette creuse dont le fond est rectangulaire, on se croirait penché au-dessus d’une boîte de…sardines. Un double-décimètre de gourmandise, le fameux Eclair XL au chocolat, pour terminer et on lève l’ancre.
62, avenue des Ternes. 17e. Tel : 01 45 72 29 47. Menu : 34 € (déjeuner). Carte : de 49 à 83 €. Plateau de fruits de mer : 80 € pour deux. Fermé dimanche et lundi. M° : Ternes.
« Encore un Italien ! ». Pas une semaine ne s’écoule sans que les représentants Transalpins ne reprennent le premier pas de porte qui se présente. « A vendre », « A louer » et hop, un Italien s’installe. Le dernier en date, Serafina, à deux pas d’Il Ristorante de la figure Sicilienne, Rocco Anfuso. Pas le moindre accent dans la voix de Philippe, déjà propriétaire du Soprano mais une vraie passion pour l’Italie qui l’a amené à confier les fourneaux à un chef du cru qui parle avec les mains. Ce dernier a concocté une carte courte qui sent bon la fraîcheur, sur laquelle se côtoient les grands classiques comme les linguine aux palourdes, la chiffonnade de jambon de Parme, les côtelettes d’agneau au romarin sans oublier les fettuccine aux champignons des bois et l’assiette de coppa et speck. Mais il en était une qui nous faisait de l’œil dès la première ligne, la tarte fine à la tomate, basilic et mozzarella. Elle est arrivée, roulant des mécaniques, sûre d’elle, séduisante, craquante. Elle était attendue de pied ferme, elle fut convaincante. Un feuilletage des plus réussis, léger comme l’air, de la mozzarella qui fond en bouche comme neige au soleil, de la tomate savoureuse. Il ne manquait qu’un rayon de soleil pour que le tableau soit parfait. Derrière, le risotto aux champignons des bois attendait fébrilement son tour. On nous avait prévenus « il va falloir patienter, il est fait à la demande ». Vingt minutes de préparation, vingt minutes d’une longue dégustation. « Prière de ne pas déranger, ici, à cette table, on savoure ». On aurait aimé garder en bouche ces parfums de champignons et ce léger croquant mais derrière la porte de la cuisine, se dressait le tiramisu aux éclats de chocolat noir. Comment lui résister ? Au diable les bonnes résolutions, faites entrer celui que l’on accuse de nous faire grossir. Il saura se faire petit pour accompagner le café.
5, rue Rennequin. 17e. Tel : 01 47 66 81 08. Menu : 20 € (au déjeuner). Fermé le dimanche et le lundi. M° : Ternes ou Courcelles.
Bath, Jean-Yves de son prénom, parti sans laisser d’adresse. Au printemps dernier, il était encore dans son restaurant rue de la Trémoille dans le 8e puis au cours de l’été, il profite de notre absence pour le céder. Depuis, no news, NPAI, n’habite plus à l’adresse indiquée. Peut-être était-il dans son Auvergne natale, parti à la rencontre des producteurs de lentilles du Puy, des affineurs de Saint-Nectaire ou des vignerons des Côtes d’Auvergne à moins qu’il ne se soit accordé un certain laps de temps pour peaufiner ses œuvres d’art qui serviront à orner son futur restaurant. Quatre tableaux et cinq sculptures plus tard, le voici réinstallé à Paris en lieu et place des Béatilles. Omniprésence du bois, couleur mandarine pour les murs, stores en coton beige, petit bar ouvert sur la salle, jambons Bellota suspendus, l’adresse a de l’allure, entre le gastro et le bistro chic. Côté cuisine, Jean-Yves Bath et son chef font quelques clins d’œil à l’Auvergne avec une onctueuse crème de lentilles au magret fumé mais la carte se veut éclectique. Le Pays-Basque est à l’honneur avec des angulas (pibales espagnoles) au piment d’Espelette, l’Espagne avec des encornets sautés, du riz paella et une sauce chorizo, l’Italie avec le toastini de volaille aux antipasti grillés ou le risotto de crustacés, la Bourgogne avec le Bourguignon de joue de bœuf aux carottes sans oublier la Bretagne avec la galette de Saint-Jacques et son beurre demi-sel. Assiettes généreuses, saveurs justes, service détendu tout en étant respectueux, une carte des vins au verre parfaitement pensée, que demander de plus ? Un dessert peut être pioché dans une liste de propositions classiques où la galette tiède au chocolat côtoie la vraie crème catalane, le riz au lait et sa compotée d’ananas et le parfait glacé aux marrons. C’est OK, c’est chic, c’est Bath.
25, rue Bayen. 17e. Tel : 01 45 74 74 74. Menu : 25 €. Carte : de 39 à 59 €. Fermé le dimanche. M° : Ternes.
Orisotto. 3 Miam sur 5.

5, passage Cardinet. 17e. 01 43 80 84 35. Formules au déjeuner : 15 et 17 €. Menus : de 30 à 45 €.M° : Malesherbes ou Villiers. Fermé samedi midi, dimanche et lundi soir.
Un bistrot de quartier que l’on croyait perdu pour la France gourmande relève la tête après quelques travaux d’embellissement et la mise en place d’une carte sans prétention qui vogue sur un répertoire bistrotier.
Nous sommes tous passés des dizaines de fois devant l’Escapade sans jamais y prêter attention. Jusqu’à ce jour, cet établissement faisait partie de ces bistrots de quartier dans lesquels on atterrissait un peu par hasard. C’était une adresse de passage dont on ne gardait pas forcément la carte de visite au fond de son portefeuille. Et puis un jour, on repasse devant et là, surprise. Un voiturier, une poignée de tables sur le trottoir, une clientèle rajeunie. Ca sent le changement. On le doit à Mathieu Lemoine qui a pansé la bête blessée et lui a redonné envie de séduire. Il ne fallait pas grand-chose pour qu’elle se redresse. Un coup de peinture, quelques ponçages ici et là, une table d’hôtes pour les bandes de potes et une carte des vins plus alléchante. Dans l’assiette, on aurait pu imaginer une cuisine « modeuse » à coup d’asperges vertes, tomates et parmesan, salade de haricots verts, bol de cœur de laitue à 12 € sans oublier l’intouchable assiette de Pata Negra et le sempiternel cabillaud rôti et écrasée de pommes de terre. Il n’en est rien. Mathieu a opté pour les grands classiques bistrotiers et c’est sans aucun complexe que la clientèle de trentenaires qui a pris l’adresse d’assaut se régale de harengs et ses pommes tièdes à l’huile, de radis beurre et de céleri rémoulade. Cet hiver, à n’en pas douter, il y aura de la blanquette de veau, du bœuf Bourguignon et du lapin mijoté en cocotte mais en attendant c’est côte de bœuf pour deux, côte de veau, entrecôte et le classique tartare cuit aller – retour. Clairement, on ne tombe pas à la renverse mais il est bon parfois de remonter le temps et de replonger dans ce registre bistrotier qui se transmet de génération en génération. Un jour, le dos de cabillaud et sa purée disparaîtront des cartes mais l’œuf mayo…jamais.
36, boulevard des Batignolles. 17e. 01 45 22 51 77. Menu : 15 et 19 €. Carte : de 25 à 45 €. Fermé le dimanche. M° : Rome ou Place de Clichy.
Raphaëlle Carrat remet le couvert. Celle qui a magnifiquement lancé le restaurant Le Square, rue Marcadet, en 2005, refait parler d’elle dans une rue fortement en pente, la rue Tholozé. Tout riquiqui, son bar à vins devrait rapidement devenir un must dans le quartier avec ses murs peints façon boutique d’Antoine & Lili, rouge vif et lilas. Qui dit bar à vins, dit carte des vins et là, force est de constater que la maison a décidé de nous épater avec une trentaine de vins de petits producteurs ou des appellations méconnues comme ce Côtes de Pérignan blanc produit dans l’Aude, issu d’un cépage à mettre dans la catégorie « presque disparu », le Bourboulenc. Avant de passer aux solides, c’est excellent pour la mise en jambes des papilles. La suite ? Une ardoise où chacun picore en fonction de sa faim. Une salade de chèvre chaud par-ci, une assiette de piquillos et d’anchois par-là sans oublier, parfait pour l’apéritif, la planche de charcuteries sur laquelle trône de la terrine maison, des rillons, de la coppa, du jambon, quelques cornichons et du beurre de chez Pascal Beillevaire, un des meilleurs crémiers Français. Autant vous le dire, cette dernière est plutôt copieuse et on regretterait presque d’avoir commandé un pavé de bœuf et sa sauce au bleu dans la foulée. Au diable les bonnes résolutions de ce début d’année sur la richesse des agapes quotidiennes et on enquille sur la côte de bœuf de Salers et sa sauce Béarnaise sans moufter. La prochaine fois, on veillera à ne pas avoir les yeux plus gros que le ventre. Et sinon ? Et bien, c’est bœuf ou…bœuf. Dans l’onglet servi émincé, en pavé, en tartare, niché dans un cheeseburger ou en carpaccio séché. Le tout avec des frites maison à manger en genou en terre et quelques feuilles de salade pour la bonne conscience. « Vous prendrez un dessert ? ». Bah non pas cette fois mais on veut bien goûter votre blanc des Portes de la Méditerranée Ma Terre 2004 ou votre Marcillac Domaine du Cros Lo Sang del Païs 2004.
16, rue Tholozé. 18e. Tel : 01 42 64 17 86. Carte : de 20 à 30 €. Fermé le samedi midi. M° : Blanche.
L'Oxalis. 3 Miam sur 5.
Au 14 de la rue Ferdinand Flocon, ce fut pendant des lustres « Histoire de »…un restaurant
14, rue Ferdinand Flocon. 18e. Tél : 01 42 51 11 98. Menus : de 15 à 26 €. M° : Jules Joffrin. Fermé le dimanche et le lundi midi.
Marguerite. 3 Miam sur 5.
50, rue de Clignancourt. 18e. Tél : 01 42 51 66 18. Menu : 15 € (café compris). Carte : de 25 à 35 €. M° : Château Rouge. Fermé le samedi midi et le dimanche.

Alors que le tout Paris de la gourmandise frétille de savoir la chef Ghislaine Arabian de retour, son énième, derrière les fourneaux d’un restaurant du 14e, l’un de ses anciens collaborateurs à l’époque où elle officiait chez Ledoyen, s’est tranquillement installé à l’opposé, dans le 18e. Loin des flashs et des micros, O.J, ou si vous préférez, Olivier Jegousse a repris l’ancien Village Kabyle. Si le décor oriental a été conservé, la carte n’a plus aucun rapport avec les spécialités d’antan et il faut de la patience à la maîtresse de maison, Nadia, pour expliquer que le chef ne propose plus le couscous. Pas même un ragoût d’agneau aux olives et citron ? Ou un thé à la menthe avec des pâtisseries à 500 calories pièce ? Rien de tout cela. Olivier joue la carte de la « bistronomie » comme nombre de ses jeunes confrères en glissant sur sa carte la classique entrecôte de bœuf opposée à un filet de daurade royale poêlé aux épices douces ou le traditionnel mi-cuit au chocolat qui se voit proposé face au mascarpone, abricot, raisins, pruneaux et fines herbes. Un mois après son arrivée, si la carte est globalement attirante, quelques imperfections demeurent comme cette compotée d’échalotes au vin rouge qui se glisse entre la tarte fine au feuilletage d’une légèreté absolue et l’andouille de Guéméné. Cette dernière perd de sa puissance au contact des échalotes. On aimerait qu’elle relève la tête, qu’elle rappelle à ce bulbe que la patronne dans le plat, c’est elle, comme le fait si bien la joue de bœuf. Elle arrive sur la gauche d’une assiette rectangulaire, fondante à souhait, toisant presque la quenelle de pommes de terre écrasées que l’on approche de la sauce au vin rouge pour lui redonner des couleurs. En face, le suprême de volaille rôti en croûte de noisette n’a pas à rougir mais il aurait aimé ne pas avoir à ses côtés les mêmes accompagnements que la joue de bœuf. Certes, on chipote mais c’est pour la bonne cause.
4, rue Aimé Lavy. 18e. 01 42 55 03 34. Menus : 25 et 32 €. M° : Jules Joffrin. Fermé le dimanche et le lundi.
Le Square de Marcadet. 1 Miam sur 5.

227 bis, rue Marcadet. 18e. 01 53 11 08 41. Plat du jour au déjeuner : 17 €. Menu : 35 €. Carte : de 53 à 85 €. Fermé le dimanche et le lundi. M° : Guy Mocquet.
PS : la poubelle posée à même la terrasse est visible sur la photo. Sous le petit cabanon blanc (qui s'avère être le passe), vous apercevrez une poubelle blanche dont le haut est cerclé d'un sac poubelle noir...sans commentaires !
Allez hop, encore un nouveau troquet ! Allez hop encore dans le 18e ! On y va mollement parce que l’on sait ce qui nous attend, le carrelage d’époque, les chaises bistrot, la porte légèrement déglinguée, le vin au verre et les plats écrits à la craie sur l’ardoise qui circule de table en table. En montant péniblement cette rue des Martyrs, on sait que l’on va hésiter entre l’œuf mayo et la terrine du chef, la blanquette de veau et les rognons sauce moutarde et pour finir, entre la mousse au chocolat et le clafoutis du moment. Et puis, ça ne se passe pas du tout comme ça. Le décor est certes comme on l’avait imaginé, la porte ferme mal, mais alors pour ce qui est de la carte, pardon, mais le registre monte d’un cran. On s’interroge, on questionne et l’on finit par apprendre que le trio arrive de chez Lavinia, de la Tour d’Argent et du bistrot Aux Lyonnais d’Alain Ducasse. Tout de suite, on comprend mieux la tartine aux artichauts poivrade, la concassée de tomates et courgettes aux coquillages et la crème de champignons et andouillette poêlée. Coupée en petits morceaux, elle patiente dans le fond d’une assiette creuse en compagnie de croûtons jusqu’à ce que le maître des lieux la recouvre. Dehors, il se met à grêler. Les touristes qui montaient vers Montmartre courent dans tous les sens à la recherche d’un abri et nous, on se réchauffe l’âme et le cœur avec cette plaisante crème de champignons avant d’attaquer un filet de bar poêlé qui manque cruellement de générosité malgré la présence de la purée. Alors, on se concentre sur le bœuf braisé aux cèpes préparé à partir des basses – côtes. Un peu comme ses voisins, le paleron et la macreuse, ces morceaux peuvent rapidement devenir secs et la mastication douloureuse. Il n’aura jamais le fondant d’une joue de bœuf mais le chef a su l’attendrir avec un jus que l’on sauce allègrement. Demain, vous me mettrez, un caviar d’aubergines et saumon mariné, une échine de porc Ibaïona, chanterelles, potiron et un pot de crème vanille. Et oui, je prendrais un café pour le plaisir de dévorer cette madeleine tiède qui l’accompagne.
94, rue des Martyrs. 18e. 01 46 06 50 73. Formules et menus : de 18 à 32 €. Brunch le dimanche : 26 €. Fermé le dimanche soir. M° : Abbesses.