Chronique de Stéphane Bern : Stéphane Bern croque le gratin
Stéphane Bern
Eternel héritier : Charles a 60 ans
Un jour qu’elle était en visite officielle aux Etats-Unis, en octobre 1957, la reine Elisabeth s’entendit demander par l’épouse du président américain: «Et votre grand fils, qu’est-ce que vous allez en faire?» Difficile pour la souveraine de lui répondre que le prince Charles avait un avenir tout tracé, celui de lui succéder à l’instant où elle quitterait le trône, c’est à dire à sa mort. Et de fait, à l’heure où le prince de Galles s’apprête à fêter vendredi son soixantième anniversaire, sa chère Maman, âgée de 82 ans, n’a ni l’intention de mettre sa couronne et son manteau d’hermine au vestiaire ni surtout de quitter ce monde avant d’atteindre (comme sa propre mère) l’âge de 100 ans.
Une sorte de renoncement
Avouez que pour le prince, la situation est psychanalytiquement problématique. Il doit passer sa vie à attendre gentiment que sa mère se décide à disparaître pour que lui puisse enfin exister. Non sans une certaine malice, la souveraine britannique offrira jeudi soir une somptueuse réception au palais de Buckingham en l’honneur des 60 ans de son aîné, un anniversaire qui sonne pourtant comme une sorte de renoncement à l’âge où certains ont déjà pris leur retraite.
Le prince de Galles vient de dépasser le record de son arrièrearrière grandpère Edouard VI I, qui monta sur le trône à l’âge de 59 ans à la mort de la reine Victoria. En sortant de l’office religieux du jubilé de sa mère, il avait eu ce mot: «A quoi bon prier notre Père éternel, moi c’est ma mère qui semble éternelle!» L’inactivité et l’oisiveté sont les pires maux pour un prince de Galles.
Edouard en était réduit à venir s’amuser à Paris au jeu de dames. Certes, le prince Charles est aujourd’hui à Paris, mais avec son épouse Camilla, duchesse de Cornouailles à qui il veut montrer Paris, dîner ce soir avec le couple présidentiel Nicolas et Carla Sarkozy avant de célébrer demain à Douaumont les 90 ans de l’ Armistice.
L’impunité de l’héritier
D’après les proches de l’héritier, «à 60 ans, il vient d’accepter l’idée que son action comme héritier du trône serait plus durable que celui qu’il pourrait accomplir comme roi». Charles en profite. Il flingue sans retenue tout ce qui contrevient aux règles de l’écologie et de la protection de la planète. Il éructe contre les architectes à qui il oppose son village modèle de Poundbury. Il défend l’homéopathie et les médecines parallèles. Il attaque les OGM qui «mènent le monde droit à la catastrophe naturelle». Il ouvre des boutiques de produits bio «Duchy Originals».
Il prend les hommes politiques de vitesse. Il peut tout.
STÉPHANE BERN
CHRONIQUEUR MONDAIN
dire. Il reste le prince de Galles. Charles sait pertinemment que s’il devient roi il se verra réduit au silence. A croire qu’il aimerait que cette situation se prolonge, comme un retrait stratégique.
Ou une retraite active
source : www.tdg.ch du 10.11.2008 par Stéphane Bern