Je discutais, il y a quelques jours, avant le vote des motions, à la maison, après un risotto, avec un ami ségoléno-strauss-kahnnien qui m’expliquait qu’entre la gauche du PS et les autres motions, il n’y avait pas d’accord possible. Il ne voyait de redresssement économique que par la relance de l’offre, rendant nos entreprises plus compétitives afin de relancer une croissance qui, disait-il, profiterait alors à tous. Il rajoutait, notamment, qu’il convenait de gommer certains excès, les plus scandaleux, du capitalisme mais qu’on ne pouvait envisager de changer de logiciel.
Je lui rétorquais qu’au delà de ces divergences “de période de congrès”, il y avait des convergences infiniment plus profondes, que la croissance française, même poussive depuis le début des années 90, n’avait, hors le bref intermède Jospin, jusqu’à présent profité qu’aux plus aisés, les autres ayant vu, au mieux, leurs niveau de vie stagner. Les multiples exonérations de taxes et charges n’avaient, jusqu’à présent, abouti qu’à ce que l’économie de rentiers française en arrive, après 6 ans de droite au pouvoir, et avant l’irruption de la “crise”, outre l’explosion des inégalités et une paupérisation accrue, qu’à un déficit du commerce extérieur et une augmentation de la dette publique, renouant avec ceux de la fin des années 70.
Je lui disais aussi que la qualité de la croissance, d’une croissance même faible était au moins aussi importante que sa quantité et que nous allions droit dans le mur du fait des dégradations des équilibres physiques, climatiques, biologiques, économiques et humains de la planète conjointe à l’épuisement du pétrole, de l’eau potable et de beaucoup de matières premières. Je lui expliquais qu’une société vaut autant par la qualité de son tissu social que par celle de son économie.
Je lui racontais comment, peu à peu, le militantisme socialiste avait déserté les quartiers défavorisés au bénéfice de la stratégie médiatique de ses élus, comment les militants avaient été en bonne part remplacés par des “cartes” à utiliser pour les investitures, comment le vote populaire avait, peu à peu, abandonné les candidats socialistes hormis les votes locaux et les votes protestataires.
Je lui exposais qu’une croissance assise sur l’endettement des ménages et des états, celle en place depuis une dizaine d’années, ne profitait qu’aux plus riches et ne pouvait que rendre les crises prévisibles encore plus dures. Que des évolutions de nos modes de vie étaient dès lors inévitables, d’autant que les chocs démographiques étaient encore à venir.
Je lui expliquais que la gauche, auparavant réservoir de matière grise, était devenu perroquet de lieux-communs toujours plus influencée par le consensus de Washington et que la “crise” devait nous servir à refonder la pensée d’une gauche plaçant l’homme au centre de ses préoccupations, le crédit ayant “tuer” l’idée même de révolution. Je lui disais enfin qu’une gauche ne pouvait pas retourner aux vieilles lunes d’une économie planifiée dont on avait vu les dégâts, mais réfléchir à l’articulation d’un marché socialement régulé et des besoins sociaux actuels et à venir, tout en prenant en compte la complexité intrinsèque des mécanismes économiques et sociaux.
Nous sommes tombés finalement d’accord sur le fait que les débats du Congrès de Reims allaient vraisemblablement totalement passer à côté de ces questions, et se réduire à quelques marchandages. Le comble c’est qu’il faut s’attendre, quelque soit son résultat, à ce qu’ils nous le présentent, tous ou presque, comme la victoire, enfin, de la “rénovation”…
- Je et nous. Repéré chez Olivier , “Le Je et le Nous”, ou Obama-Sarkozy.
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- Mais qui est donc Berlusconi ? Le Monde et le blog Actu bien pris ….
- L’économie réelle et ses taenias. Le Monde.
- Les aléas du métier de consommateur. Le Monde.