Elena Chenescu et Adrian Milea, patrons du bar à hôtesses Le Garden, ont été condamnés hier à 3 ans et à 2 ans et demi de prison pour proxénétisme et abus de biens sociaux.
Adrian Milea est en larmes. Il peine à parler. Il donne une drôle d’image de lui, ce Roumain de 38 ans à la carrure imposante qui, jusque-là, paraissait complètement détaché des faits qui lui étaient reprochés. Il pleure quand Thierry Fourdrignier, le président du tribunal, lui demande ce qu’il a à ajouter. C’est 30 minutes environ avant que le tribunal correctionnel de Saint-Quentin le condamne à 18 mois de prison pour avoir toléré ou accepté de la prostitution dans son établissement. Le tribunal l’a aussi condamné à 1 an de prison pour abus de biens sociaux. Sa femme, Elena Chenescu, 36 ans, fond elle aussi en larmes. Elle pense à ses trois enfants dont elle va être séparée. Elle a été condamnée à 2 ans et à 1 an de prison pour les mêmes faits que ceux reprochés à son mari.
L’affaire commence en 2005 par les confidences faites par une ancienne serveuse du Garden à une inspectrice du travail. Elle se serait prostituée dans l’établissement installé au 20, rue de Crimée, à deux petits pas du commissariat.
Les mêmes hôtesses que dans l’affaire du Folie’s
Les bouteilles de champagne sont vendues 200 euros. Les hôtesses sont chargées de faire du charme aux clients. Pour qu’ils consomment. Toujours plus. Sept employées ont livré leurs témoignages aux enquêteurs de la police judiciaire d’Amiens. Elles touchaient 20 % sur le prix des bouteilles de champagne et 5 euros sur le verre. L’une d’entre elles raconte dans les auditions que tout commençait par des baisers. Puis, elle masturbait des clients. « On ne devait rien laisser dans les poubelles. Il n’y avait pas de préservatifs. C’est pour ça que les actes intimes n’allaient jamais jusqu’à la pénétration. » D’autres filles évoquent des fellations. Des pénétrations digitales. Des cunnilingus.
Plusieurs clients, entendus par les policiers, ont confirmé. L’un d’eux précise : « Trois bouteilles, c’était la masturbation. Quatre bouteilles, c’était la fellation. »
La question pour le tribunal a été de savoir si les patrons savaient ce qui se passait dans les salons. Elena nie. « Une hôtesse n’est pas une prostituée. Les filles ont peut-être fait des choses comme ça, mais pas dans le but d’avantager le bar. » Et de décrire : « Il fallait que ce soit des filles inaccessibles. Si je savais qu’il se passait des choses comme ça, je mettais les filles à la porte. » Une ancienne employée appelée comme témoin à la barre confirme : « Je n’ai jamais rien fait de sexuel. Il y a eu des choses, mais Elena a viré les filles. »
Me Clotilde Gravier, pour la défense, quant à elle, s’étonne : « Ce sont les mêmes employées qui, dans l’affaire du Folie’s (N.D.L.R., autre bar à hôtesses tombé pour proxénétisme), expliquaient à la barre qu’il n’y avait rien de sexuel dans l’établissement. À l’époque elles n’ont pas été crues. Aujourd’hui, dans l’affaire du Garden, elles sont crues quand elles disent qu’il y avait de la prostitution au Garden. » Et en effet, les magistrats ont cette fois-ci accordé du crédit aux propos de ces hôtesses.