Comme je vous le disais, s’exiler hors des murs de la grande ville, ça fait tout drôle et les premiers temps d’adaptation subsiste une sensation de flottement… On dort mal, avec tous les bruits incongrus qu’on ne sait pas encore identifier : frottement des branches contre le toit, crissements sur le gravier ou la terre fraîche, cris bizarres des oiseaux, craquements des feuilles sèches sous le poids plume des chats de passage. Le soleil qui entre à flots par toutes les fenêtres déstabilise un peu, puis bientôt plus. Et on commence à apprécier tous ces petits riens insignifiants, auxquels on s’attache bientôt plus qu’on n’aurait cru : la floraison quasi-miraculeuse des rosiers sauvages jetés çà et là dans un jardin en friche, l’éclosion florale d’un arbre tordu transfiguré, du coup (au fait j’en parlais au dernier billet : c’est un “arbre-corail” qui donne des fleurs rouges en forme de grappe de griffes), les pépiements d’oiseaux sous le soleil, les habitudes des petites villes quand les gens qui passent dans la rue vous saluent sans même vous connaître, parce que c’est comme ça et qu’on tient à la politesse. Chéri et moi avons délaissé notre hypermarché tentaculaire et ses galeries pleines de tentations (enfin, pour moi plutôt) pour le petit commerce de proximité sympathique, et rentrons chez nous avec des cartons de course au lieu des sacs ventrus et surchargés. De temps en temps, les voisines nous offrent des légumes, parce qu’elles en ont en trop, des oignons, du sucre, qu’importe. En un peu plus d’un an en appartement personne ne connaissait ses voisins. Bref, je me suis finalement adaptée à la vie rurale, lente et paresseuse, au linge qui claque au soleil, lourd et aveuglant à midi. C’est bizarre.
Et puis un matin, que vois-je ? mes plantes d’appartement, qui ont élu domicile sur le balcon extérieur de notre chambre, en plein air et non couvert, mes plantes donc ces paresseuses qui refusaient de pousser droit, se sont couvertes de bourgeons, et un autre matin, au réveil, des fleurs, plein de petites fleurs ! je suis aux anges et me sens bête et émue. C’est con, pourtant. Mais elles ont fleuri, signe qu’elles se sentent bien là, elles aussi, non ?
Mon petit franciscea (le fameux “Yesterday, today and tomorrow”) s’est couvert de fleurs mauves qui blanchissent en fin de floraison, et embaument délicieusement le balcon (encore plus le soir). Mon petit bougainvillée-greffé en pot, qui refusait obstinément de refleurir, a fait pousser une minuscule fleurette rose fuschia (c’est gentil mais j’attends les copines maintenant !). Et mon orchidée, la belle Phalaenopsis, a ouvert un nouveau bourgeon, qui a fleuri ce matin ! Je ne résiste pas à vous mettre la photo. Je n’ai pas identifié sa variété exacte, je pense que c’est un cultivar hybride de Shilleriana mais avec quelle autre variété, mystère ? Si quelqu’un a une idée n’hésitez pas.
Bref, je suis une jardinière comblée ! Je ferai d’autres photos de mes plantes quand j’aurai retrouvé le cordon USB de mon appareil photo.