Faubourg 36 possède absolument toutes les qualités requises pour séduire le plus grand nombre. Une reconstitution pointilleuse d'une époque marquante, des acteurs à papa, un scénario cousu de fil blanc mais cousu avec application... et même une mise en scène ambitieuse, avec mouvements de caméra complexes et tout et tout. Deux heures d'un classicisme propret et bien lisse, mais deux heures bien exécutées, avec leur lot de scènes et de personnages gentiment attachants. Rien de tel qu'un Kad Merad ou un Pierre Richard pour rendre un film irrémédiablement sympathique. Il y a même une gonzesse, jolies jambes et jolis yeux, avec une belle voix par-dessus le marché (c'est tout ce que demande Barratier à Nora Arnezeder, et elle s'acquitte de sa tache avec brio). Les agaçants yeux de cocker de Jugnot ou la fausse gouaille de Cornillac auraient dû achever de ravir le coeur des ménagères de plus ou moins 50 ans. Malheureusement, non.
Il y a en tout et pour tout deux explications plausibles au succès mitigé de Faubourg 36. Première hypothèse : gavé par les films rances de Jean Becker, Gilles Legrand et autres sous-réalisateurs, le public se serait définitivement lassé de ces films qui ne cessent de se tourner vers le passé avec moultes soupirs. Deuxième possibilité : la noirceur relative qui enveloppe le film de Barratier aurait fait fuir plus d'un spectateur. L'ambiance a beau y être souvent rigolarde, c'est majoritairement la déprime et les tracas qui rongent le quotidien de ces héros bien fatigués. Ajoutez à cela un arrière-plan vaguement social (misère et grèves, comme dans un film anglais mais sans la finesse) et une fin de film plus violente qu'il n'y paraît, et vous comprendrez peut-être pourquoi les salles n'ont pas affiché "complet". Peut-être aussi qu'il y a, dans les salles voisines, d'autres films, peut-être un peu moins bien fagotés ou intentionnés, mais tellement plus humains et émouvants que ce cinéma de papier glacé.
5/10