" La guerre des classes existe, c'est un fait, mais c'est la mienne, la classe des riches, qui mène cette guerre, et nous sommes en train de la remporter. " C'est Buffett qui a formulé ce jugement. Pas Marie-George, non. Warren. Deux " f ", deux " t ". La première fortune mondiale. Et c'est une évidence, sans doute, en cette époque où un " marché du luxe en forte croissance " côtoie " les émeutes de la faim ". Une banalité, même, dans une France où le CAC 40 annonce des " profits records " et des " mégadividendes " tandis que, d'après l'INSEE, les salaires stagnent depuis trois décennies. Une certitude statistique quand 9,3 % du PIB a glissé, en vingt ans, du Travail vers le Capital. Une évidence, alors. Sauf qu'il a fallu, justement, un Warren Buffett pour la dénoncer. Jamais nous n'aurions osé, nous, prononcer ces mots, " guerre des classes " : par crainte de paraître " archaïques ", " simplistes ", " manichéens ". Et, avec nous, c'est toute une gauche qui s'autocensure, qui s'enlise dans le salmigondis de la " complexité ". Toute une gauche avec des chefs qui déguisent leur lâcheté en " courage ", leur renoncement en " audace ", et qui causent gentiment de " rénovation ", de " modernisation " pour mieux masquer leur trahison.
François Ruffin est reporter pour l'émission de France Inter Là-bas si j'y suis et collabore au Monde diplomatique.
Editeur : Fayard