Vous répétez souvent que vous appréciez le style Martin. Vous lui devez votre passion pour la BD et l’histoire ?
C’est vrai ce que j’ai dit, ce n’est pas une figure de style. Déjà gosse, j’étais attiré par la ligne claire, les séries Tintin, Blake & Mortimer et Alix. Il y avait quelque chose de spécial avec Alix. Et cela m’a donné envie de faire du latin, du grec, de faire mes études d’histoire de l’art, d’archéologie. Pas pour devenir conservateur d’un musée ou archéologue, mais pour utiliser ce bagage pour raconter des histoires. J’aime le côté vulgarisation des choses, raconter des histoires en utilisant l’Histoire. Et je trouve que Martin était précurseur à ce niveau là.Qu’avez-vous ressenti quand il vous a été proposé de travailler chez Casterman ? Quand j’ai commencé à travailler pour Casterman et qu’on en est venu à parler de l’univers Martin, j’étais forcément très content mais aussi un peu intimidé. On a commencé à travailler sur Loïs - le Code noir. C’était plus facile car il n’y avait pas vraiment un historique derrière. Pour le premier, j’ai repris l’album en cours. Et Lefranc – la Momie bleue - est arrivé. J’ai dû reprendre un album en cours déjà plus abouti. De même que pour l’Alix – l’Ibère. Je travaillais déjà sur le suivant - la Cité engloutie - avec Ferry.
En fait vos premiers albums dans cette collection sont des reprises de scénarios déjà imaginés par d’autres.
J’espère que c’était lié à la conjoncture. Je trouve intéressant de partir du synopsis de Martin. Cela ne me frustre absolument pas, au contraire ! Jacques Martin a préparé plein de synopsis qui sont parfois très courts, parfois des notes d’intention plutôt que de vrais synopsis, mais c’est un thème ou un titre à travailler. Et il est franchement ouvert au dialogue. L’idée est d’être fidèle et en même temps de faire un peu évoluer la série, pas de la moderniser. Il faut conserver tous les codes « martiniens » que les lecteurs aiment bien. Sans tomber dans le travers de l’hommage.
Pensez-vous qu’Alix soit assez défendu par l’éditeur ? L’éditeur devra se dire que pour Jacques Martin il faut mettre des moyens. Quand Média Participations lance un Blake & Mortimer, ils mettent les moyens. Dans la collection Martin, on n’a pas fait les meilleurs albums jusqu’à présent, mais, sans fausse modestie, de meilleurs albums. Et il faudra – au moment où on est content de ce qui est proposé - je pense au Démon de Pharos notamment qui a tous les atouts pour être un bon album – l’annoncer et le faire savoir. La publicité et le markéting ont plutôt manqué ; parfois c’était peut-être bien pour certains albums qu’on n’avait pas trop envie de mettre en avant, mais aujourd’hui ce serait bien de passer à ce stade là.
Voyez-vous souvent Jacques Martin ? J’aime beaucoup passer une après-midi à discuter avec lui. C’est toujours intéressant. Il m’apprend des trucs et je me rends compte parfois que je lui apprends des choses aussi. Il me dit « Ah tiens ça je ne savais pas ! » et puis il me trouve tel ou tel bouquin. Il est vraiment très curieux. Et moi j’adore cela. J’aime bien les gens qui continuent. Et puis on n’a pas fini un album qu’il est déjà en train de penser au suivant !
Propos recueillis par Marc Carlot, Brieg F. Haslé et Manuel F. Picaud en janvier 2008 © Marc Carlot - Brieg Haslé - Manuel F. Picaud / Auracan.com
Extraits des planches 9 et 11 du Démon de Pharos © Christophe Simon - Patrick Weber - Jacques Martin / Casterman
Photo Patrick Weber et Jacques Martin © Manuel F. Picaud / Auracan.com)