Roman - 525 pages
Editions du Rouergue - mars 2008
Normandie, Cotentin, La Hague. Le bout du monde un jour de tempête. Une femme ornithologue travaillant sur ce coin de terre depuis quelques temps voit arriver Lambert, un homme mystérieux, venu vendre la maison familiale, et retrouver peut-être des fantômes du passé, de sa famille disparue dans un naufrage. Entre cette femme blessée qui se guérit dans son ancien amour, et cet homme vouant méfiance et haine pour les villageois, beaucoup de silences, de points communs aussi, d'attirance secrète peut-être. Là-bas vit le vieux Théo, qui a coupé tout lien avec sa fille Lily, tenancière du bar, et la Mère, cette femme qu'il a trompée avec la vieille Nan. Il y a aussi Raphaël, sculpteur des êtres en souffrance et sa soeur Morgane avec qui la narratrice habite à La Griffue. Et puis Max, le simplet au grand coeur éperdumment amoureux de Morgane. Ce microcosme sera le théâtre de haines sourdes réveillées, d'aveux arrachés et de vérités révélées.
Je retrouve la plume de Claudie Gallay après l'avoir découverte au travers de la lecture de Dans l'or du temps, que j'avais trouvée un poil déroutante. A l'inverse, Les déferlantes m'ont happée dans leur tourbillon de vent, d'embruns, de mystère et de secrets. Au départ, ce décor de mer, de village égaré, de tempête et de bateaux m'a rappelé une lecture de jeunesse : Moonfleet, de John Meade Falkner, un souvenir ineffaçable.
Dans Les déferlantes, point de pirate ni de trésor. Quoique.Extrait :
"On m'avait avertie, Quand ça va commencer, il faudra plus être dehors.
Les pêcheurs ont vérifié une dernière fois les amarres des bateaux et ils sont partis, tous, les uns après les autres. Un rapide coup d'oeil de notre côté.
Les hommes sont plus forts quand la mer remonte, c'est ce qui se dit ici. Les femmes profitent de ces moments pour se coller à eux. Elles les saisissent là où ils sont, au fond des écuries ou dans les cales des bateaux. Elles se laissent prendre.
Le vent sifflait déjà. C'était peut-être ça le plus violent, plus encore que les vagues. Ce vent, qui chassait les hommes."
D'après Bernard du Blog des livres, on devinerait le dénouement de l'histoire 300 pages auparavant. quand bien même ce serait le cas, là n'est pas ce qui importe. On a plaisir à lire cette histoire pour connaître aussi le comment et surtout le pourquoi. Et pour se laisser submerger par les mots de Claudie Gallay sur cette extrême Normandie. L'auteur, comme le personnage principal de l'ornithologue, aime et privilégie ces instants de contemplation, ces silences, ces heures passées en pleine nature, face à la mer, au milieux des cris d'oiseaux sauvages et des lichens odorants. Le talent de Madame Gallay peut faire sentir au lecteur ses jours rougies par le ventglacé, percevoir cette brise iodée, voir ces oiseaux tournoyer autour de lui en risquant de se fracasser contre la fenêtre, entendre les voix de Max, sentir la fumée des cigarettes de Raphaël...
Les déferlantes, c'est un roman long, lent malgré ses phrases hâchées, qui se déploie à un rythme naturel qu'il faut savoir respecter. Savourer sans hâte.
Beau roman, pudique et poignant.
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Claudie Gallay plein ouest - LeMonde.fr