Qu'est-ce-qui rend Jo Wilfried Tsonga si sympathique ? Son physique ? Sans doute, même si sa carcasse d'ours
débonnaire est aussi sa pire ennemie, comme en témoignent les blessures à répétition qui ont longtemps retardé son éclosion. Son jeu ? C'est un cogneur, comme il y en a d'autres sur le circuit de
tennis professionnel, un puncheur de haute volée, certes, mais ça ne suffit pas à expliquer sa formidable cote de popularité. Non, ce qui rend le vainqueur du tournoi de Bercy 2008 si différent,
c'est que contrairement à la plupart de ses collègues, il "joue" encore au tennis.
C'est drôle comme les notions de jeu et de plaisir de jouer disparaissent peu à peu du vocabulaire sportif en général. On ne joue
plus un match, on le dispute. Pire, selon la terminologie en vogue chez les journalistes sportifs, on "fait le métier". Pas étonnant que dans ces conditions, un gars qui s'éclate en
tapant dans la balle sur un court de tennis, un terrain de foot ou de rugby semble s'être trompé d'époque. Au plus haut niveau, le plaisir tout simple de pratiquer son sport est devenu
inversement proportionnel à la renommée des champions. Ou alors, on simule le plaisir, on l'exprime avec une telle rage gonflée aux hormones que cela en devient un rituel guerrier, à
l'image de ces basketteurs et footballeurs américains pour qui l'hystérie semble être une seconde nature.
Alors Jo, reste cool, c'est tout ce que l'on peut te souhaiter pour la suite de ton parcours. Tu peux gagner ou perdre des tournois,
te planter lamentablement ou faire péter les scores, peu importe. Tu peux en la matière prendre exemple sur ce "vieux fossile" du tennis, devenu star de la chanson, notre Yann' national. Plus
"sérieux", selon les critères des rabat-joie dont il s'est toujours moqué comme de sa première dreadlock, Noah aurait sans aucun doute un palmarès plus étoffé. Mais en aurait-il pour autant pris
plus de plaisir; plaisir, soit dit en passant, qu'il savait bien nous faire partager le lascar…
Le plus dur, c'est de ne pas succomber à l'usure, de ne pas plier sous la double pression sportive et médiatique. Prenez Laure
Manaudou. On se demande encore comment, avec ce pitbull des bassins de Philippe Lucas comme entraîneur, mais au début de sa gloire elle semblait s'amuser la naïade ! Aujourd'hui, la sirène est
cramée, de trop d'amours surexposés, de trop d'heures passées à compter les carreaux du fond de la piscine. La jolie torpille au sourire simple et nacré en est rendue à remplacer la sardine qui
bouche l'entrée du Vieux port dans les conversations des Marseillais. Alors gaffe Jo, prudence ! Ce serait tout de même dommage de te retrouver dans cinq ou six saisons à jouer ta partition avec
autant d'entrain qu'un Davydenko ou un Stepanek de bas étage. Tu t'emmerderais sacrément, et nous avec…