Rebelles

Publié le 10 octobre 2008 par Marivaudage
Deux vieux groupes de vieux rebelles ont repris la route récemment et ont tourné dans tous les festivals cet été : Rage Against The Machine et les Sex Pistols. Bon très bien mais qui peut encore croire à la sincérité de leur posture ? Ça ne me dérange pas qu'ils se fassent de l'argent sur ces tournées (évidemment, ils ne jouent pas dans des salles de moins de 20 000 personnes à 60€ la place) mais au moins qu'ils arrêtent de jouer aux révoltés. Entre les Sex Pistols dont le chanteur John Lydon est ouvertement xénophobe et Zack de la Rocha qui nous parle de Che Guevara avec la même maturité et le même recul qu'un adolescent en pleine crise existentielle, il n'y a pas beaucoup de message pertinent à aller chercher chez ces rebelles de pacotille.
Formation originale des Dead Kennedys : le fou furieux Jello Biafra est le 2e à partir de la gauche
Non, les vrais rebelles, les purs et durs, les ultras, ce sont les ... Dead Kennedys ! Et plus précisément, son leader, Eric Reed Boucher, dit Jello Biafra, le genre de type qui préfèrera toujours se saborder plutôt que se compromettre (on parle parfois de lui comme de la plus grande star du hardcore (!)). Il est passé plusieurs fois par la case prison, pour outrage envers à peu près tout le monde, et a fini par abandonner la musique pour se lancer dans une carrière d'activiste politique.
Son groupe, les Dead Kennedys, d'obédience punk, s'est fait connaître au début des années 80 par ses paroles incendiaires, son obscénité et ses attaques au vitriol contre la société de consommation, Ronald Reagan et l'american way of life en général. Les titres de leurs chansons donnent une bonne idée du mélange d'outrance et d'ironie qui caractérise Jello Biafra : California über Alles, In God We Trust Inc., Frankenchrist, Too Drunk to Fuck (repris récemment par Nouvelle Vague), Kill The Poor, Nazi Punks Fuck Off!, Let's Lynch The Landlord etc etc. A force d'excès et de procès, le groupe a fini par sombrer en 1986, après un cinquième et dernier album intitulé Bedtime for Democracy.
Je suis assez fan du titre Kill The Poor : on sent une vraie hargne dans la manière dont Jello Biafra chante les paroles du premier couplet. Musicalement, c'est très accrocheur, après un début martial, ça bascule dans le punk pur et dur. Les paroles qui proposent de tuer les pauvres pour résoudre tout les problèmes sont assez mordantes :

Efficiency and progress is ours once more
Now that we have the Neutron bomb
It's nice and quick and clean and gets things done
Away with excess enemy
But no less value to property
No sense in war but perfect sense at home.
The sun beams down on a brand new day
No more welfare tax to pay
Unsightly slums gone up in flashing light
Jobless millions whisked away.
At last we have more room to play
All systems go to kill the poor tonight



Dead Kennedys - Kill The Poor
Notre Didier Super national s'en est-il inspiré pour écrire son tube Marre des pauvres ?
J'aime également California Uber Alles. Écrite au départ en l'"honneur" de Jerry Brown, gouverneur de Californie, cette chanson a été remaniée par les Dead Kennedys lors de l'élection de Ronald Reagan à la présidence et renommée "We've got a bigger problem now". En plus du refrain bien efficace, j'apprécie particulièrement l'espèce de break qui intervient à 1'40 (now it's 1984 ...) : le rythme martial et la voix caverneuse de Jello Biafra rendent la chanson assez inquiétante. Au-delà du titre coup de poing, Jello Biafra livre une charge sans nuances contre le mode de vie californien zen / bio qu'on lui impose. A l'heure des fascisantes campagnes manger-bouger que l'on subit chez nous, cette chanson reste pour moi tout à fait d'actualité.
Zen fascists will control you
100% natural
You will jog for the master race
And always wear the happy face


Dead Kennedys - Californa Uber Alles
The Dead Kennedys (de gauche à droite): Jello Biafra, DH Peligro, East Bay Ray, Klaus Flouride
Jello Biafra a toujours refusé toute reformation du groupe : tant mieux !