L'article publié sur le blog de Lionel TARDY (Député UMP haute savoie) traduit l'inquiètude de nos députés
sur l'engagement futur de nos forces en afghanistan .
http://tardy.hautetfort.com/
Le Bataillon des Glières 27° BCA d'ANNECY remplacera prochainement le 8° RPIMA
sur ce théâtre d'opérations. (novembre 2008)
Une polémique concernant l'achat de matériels adaptés au combat en montagne a fait l'objet d'un article particulièrement virulent dans le point il y a quelques jours.
le scandale du véhicule blindé refusé aux alpins
http://www.lepoint.fr/actualites-monde/le-scandale-du-vehicule-blinde-refuse-aux-chasseurs-alpins/1648/0/271682
La FRANCE enverra t elle de nouvelles troupes sans les matériels nécessaires au risque de nous retrouver à nouveau dans la cour des invalides?
La réponse est évidente, les décisions seront imposées au plus haut niveau nul ne peut en douter, les arbitrages budgétaires seront tranchés même si temps presse.
lu sur le site du député lionel TARDY
http://tardy.hautetfort.com/
18 septembre 2008
Engagement du 27ème BCA en Afghanistan
Les auditions à huis clos sur l’Afghanistan de mardi après-midi et de mercredi (voir mon billet du 16 septembre), ont été particulièrement denses.
Sans m'étendre sur les informations générales exposées par nos Ministres (Kouchner et Bockel), et sans trahir de secrets, voici un compte-rendu de mon intervention liée à l'engagement en Afghanistan des troupes alpines et notamment du 27ème BCA, et un compte-rendu de quelques-uns des propos du général Georgelin, Chef d'Etat Major des Armées (CEMA).
Quelques éléments sur la situation :
- Les troupes françaises présentes sur place se montent à 2885 hommes
- Il y a 5 commandements en Afghanistan : région Est, Sud, Nord, Ouest et Centre (Kaboul)
- Les troupes françaises sont présentes dans les régions Centre (Kaboul) et Est
- 553 soldats du 27ème BCA doivent se rendre sur place, pour 6 mois, fin novembre
- Les troupes françaises sont engagées sous mandat de l'ONU dans le cadre de la FIAC (Force Internationale d'Assistance et de Sécurité)
Après avoir déplorer le manque de supports vidéos, indispensables pour animer cette audition (beaucoup de députés étaient perdus entre les sigles, les commandements et la géographie), je suis intervenu concernant la future présence du 27ème BCA au sein du bataillon de Kaboul, la future présence du 27ème BCA au sein du bataillon Kapissa, ainsi que sur les moyens mis à la disposition du 27ème BCA.
Ces interventions donneront lieu a des questions écrites adressées au Ministre de la Défense, absent des débats pour cause de déplacement en Australie.
Concernant le bataillon de Kaboul (région Centre) :
La région Centre est actuellement commandée par un général français.
Ce général a sous sa responsabilité :
- Le bataillon français de Kaboul
- Un bataillon italien
- Un bataillon turc
Le bataillon français comprend 769 soldats : 624 sont stationnés à Kaboul et 145 sont stationnés à Surobi (région ou 10 soldats français ont été tués le 18 août).
C’est à Surobi que 145 des 553 chasseurs du 27ème BCA seront affectés.
Quel est le problème ?
La tragédie du 18 août a fait clairement apparaître des problèmes dans la chaîne de commandement, or les 624 soldats stationnés à Kaboul appartiennent au 3ème RPIMA de Carcassonne et au régiment de marche du Tchad, et les 145 soldats stationnés à Surobi appartiennent actuellement au 8ème RPIMA de Castres.
Il y a donc un réel problème de cohérence, puisque les soldats stationnés à Surobi n’appartiennent pas au même régiment que celui de Kaboul (et n’ont donc pas l’habitude de travailler ensemble), et seront par conséquent commandés par un officier du régiment de Kaboul.
Ce qui veut dire que les 145 chasseurs du 27ème BCA, qui seront stationnés à Surobi dès fin novembre, seront commandés par un officier du 8ème RPIMA, alors que la cohérence voudrait qu’ils soient commandés par un officier du 27ème BCA. De plus, quel intérêt de les dissocier de leurs 408 collègues qui eux seront affectés au bataillon Kapissa (région Est), à moins de 40 kms … mais sous un commandement et une région différente … alors que celà fait plusieurs mois qu’ils s’entraînent ensemble.
Mieux, les dates d’engagement des soldats présents à Kaboul et celles des soldats présents à Surobi étant différentes, les 145 chasseurs du 27ème BCA vont avoir 2 chefs de corps différents en 6 mois. Où est la cohérence ?
J’ai donc demandé au CEMA (Chef d’Etat Major des Armée) de faire en sorte que les soldats affectés à Surobi soient issus du même régiment que ceux présents à Kaboul (cohérence) ou alors, que les chasseurs alpins affectés à Surobi soient rattachés à la région Est, de façon à ce qu’ils dépendent du bataillon Kapissa ou tous leurs collègues ont été affectés, et dont le bataillon sera dirigé par le colonel Le Nen, chef de corps du 27ème BCA. Celà règle également les problèmes de décalage de date d’engagement (même date).
Concernant le bataillon de Kapissa (région Est) :
La région Est est actuellement commandée par un général américain.
Par contre, le bataillon Kapissa sera commandé par le colonel Le Nen, chef de corps du 27ème BCA.
Ce bataillon va se répartir sur 2 bases (FOB) : Nijrab et Tagab.
Le colonel Le Nen aura sous sa responsabilité un total de 628 chasseurs alpins :
- 408 chasseurs alpins issus du 27ème BCA
- 200 chasseurs alpins issus de la BIM (Brigade d’Infanterie de Montagne)
Quel est le problème ?
Cette région est la plus chaude actuellement (propos du général Benoît Puga).
On sait que les insurgés tendent des embuscades par groupes de 10 ou 15, que nos blindés actuels sont peu adaptés au terrain difficile et que donc, beaucoup de reconnaissances devront se faire à pied.
Or sur les 628 chasseurs du bataillon Kapisa, seule la moitié soit 286 hommes, sont réellement disponibles pour des opérations (fantassins). L’autre moitié est affectée à d’autres tâches.
Donc au total, sur 6 sections de combats présentes (sur 2 sites), seules 2 pourront manœuvrer simultanément, car les 4 autres seront affectées à la garde des bases (x2) et en stand-by alerte (x2).
C’est insuffisant pour occuper le terrain et éviter d’être d’un seul coup en infériorité numérique lors de combats, comme ce fût le cas le 18 août (une section de combat = 30 soldats).
Quand on sait également que la première base du bataillon Kapissa (Nijrab) est située à 105 kms de Kaboul (soit 3 heures de route), cela pose problème en cas d’accrochage de grande envergure, le soutien aérien américain ne pouvant pas tout régler. Il faut donc plus de troupes pour occuper le terrain.
Concernant les moyens mis à disposition du 27ème BCA :
Si cet isolement était compensé par les moyens mis à disposition, et notamment une artillerie sol/sol adaptée, ce serait parfait, or qu’en est-il ?
Pour se défendre, les bases de Nijran et Tagab disposent chacunes de 2 mortiers fixes de 120 mm dont la portée est de 30 kms, alors que le thêatre d’opération est d’environ 45 kms sur 60 kms.
J’ai donc demandé au CEMA s’il était possible d’affecter au bataillon Kapissa des canons de 155 mm de type Cesar (portée de 45 kms) ou des canons de type 155 TRF1.
De même, j’ai demandé au CEMA si l’armée française comptait déployer des hélicoptères d’appui au sol Tigre.
Enfin, le bataillon Kapissa est doté de VAB et d’AMX 10 RC. Or ces véhicules sont peu adaptés au terrain en dehors des pistes principales. Le véhicule le plus adapté est le VHM (Véhicule à Haute Mobilité) dont seuls les chasseurs alpins sont dotés. Or sur 11 VHM diponibles au sein de l’armée de Terre, seuls 8 vont être déployés sur site (4 par base). C’est insuffisant, surtout qu’en saison d’hiver (ce qui sera le cas dès l’arrivée sur place des chasseurs alpins), ce sont les seuls véhicules utilisables car équipés de chenillettes (c’est dans un VHM que Nicolas Sarkozy s’est rendu au plateau des Glières ce printemps, son hélicoptère étant cloué au sol du fait des conditions météo).
Quand au VAB, j’ai demandé au CEMA s’il était envisagé de rendre sa tourelle téléopérée de façon à ne pas pas exposer son utilisateur au tir de snipers.
J’ai également interrogé le CEMA sur l’utilisation de drones, sachant que l’armée de Terre n’en dispose pas.
Beaucoup de questions donc qu’il vaut mieux se poser avant qu’après, dans la mesure ou comme l’a souligné Guy Teissier, Président de la Commission Défense de l’Assemblée, nous nous devons d’offrir les meilleurs moyens et les meilleures conditions de sécurité à nos soldats.
Je n’ai pas pu (pour des raisons de temps) aborder la question de la fermeture du CNAM de Briançon (Centre National d’Aguerissement en Montagne).
Or a la lumière des évènements récents et des risques géopolitiques en Afghanistan, Pakistan, Iran et Géorgie (toutes des régions montagneuses), on peut réellement se reposer la question de la pertinence de sa fermeture.
C’est le seul centre européen du genre (ou d’ailleurs le 27ème BCA va se rendre du 22 septembre au 3 octobre), par lequel devrait passer toutes les troupes qui se rendent en Afghanistan, de façon a ce quelles puissent se familiariser avec le milieu de la montagne, ce qui n’est pas le cas des troupes engagées actuellement.
Article du POINT (envoyé par internaute) qui reprend le sujet (cliquez ci-dessous) :
Sur l’intervention du CEMA :
Le général Georgelin a rappelé que les USA représentent 38% des troupes présentent en Afghanistan, ce qui leur donne un certain poids.
Il a souligné que beaucoup de questions posées par les députés relevaient du politique et n’étaient donc pas de son ressort (la politique préside au militaire).
Il a bien précisé que la France faisait partie d’une coalition, la FIAS (organisation supra nationale), avec toutes ses contraintes, ce qui conduit dans bien des cas a un déficit de conduite stratégique.
Il a souligné toute l’hypocrisise concernant la culture de la drogue qui sert a financer les insurgés à hauteur de 3 milliards de dollars par an, et sur laquelle le gouvernement afghan, corrompu, ferme les yeux.
C’est l’un des principaux problème que doit résoudre le gouvernement afghan, la FIAS n’étant pas mandatée pour intervenir (car beaucoup de ses membres ne veulent pas se mettre la population à dos).
Enfin, il a souligné la qualité de la propagande des insurgés qui n’hésitent pas, eux-mêmes, à tuer des civils et a faire passer ces exécutions pour des dommages collatéraux des alliés.
En ce qui concerne les moyens mis en place, il a indiqué que c’était l’un des problèmes de la coalition, et que les décisions étaient prises à Mons (en Belgique) : on raisonne en approche globale, chaque pays apportant des moyens qui sont ensuite répartis sur zone.
Le problème est également que beaucoup de pays engagés au sein de la FIAS ont émis des caveats, c'est-à-dire des règles d’engagement, qui nuisent à la bonne utilisation des moyens humains et matériels (exemple : les allemands limitent l’engagement leurs avions à la région Nord …). Il y en tout 83 caveats. La France n’a aucun caveat.
En ce qui concerne l’appui, il a reconnu un manque d’hélicoptères dans la mesure ou la mobilité tactique est un facteur important de succès.
Pour ce qui est du soutien aérien, des A10 américains tournent en permanence dans le ciel afghan, mais ont parfois, comme c’était le cas le 18 août, plus de 50 opérations à gérer en simultané.
Enfin, en ce qui concerne le renseignement, deux solutions : soit on reste cantonné dans les bases (FOB), soit on en sort, et on s’expose, ce qui necessite effectivement des moyens (d’où mon questionnement).
Il a terminé en souligant qu’une durée d’engagement de plus de 6 mois serait le meilleur moyen de tisser de réels liens avec la population et de faire du vrai renseignement.
Voilà brièvement résumé, le contenu de cette audition, sans encore une fois trahir de secret.
Photos de VAB, AMX 10 RC et d'un VHM du 27ème BCA en manoeuvre sur le site des Papeteries à Cran-Gevrier : Le VHM version civile en action :