J'ai du patienter un peu avant de le lire et pourtant depuis septembre il était en première place sur la pile de romans de la rentrée que je voulais découvrir! J'avoue que je suis partie au Brésil en l'emportant mais rien à faire, je n'ai pas réussi à le lire, le sujet ne se prêtait pas à l'atmosphère ambiante et je n'étais pas réceptive.. De retour à Paris, après quelques jours de réadaptation à mon rythme quotidien, je m'y suis replongée.
De Niro's Game de Rawi Hage est un premier roman "coup de poing" sur une amitié entre deux amis en pleine guerre civile libanaise dans les années 80. Dans un Beyrouth ravagée et chaotique, entre les alertes à la bombe, les immeubles dévastés, la terre sèche et les odeurs d'oliviers, deux adolescents, Georges et Bassam, tentent de vivre, entre petits trafics, premières copines et soirées alcoolisées. Jusqu'au jour où Georges dit "De Niro" décide de prendre le chemin plus obscur de la guérilla et de jouer un coup trop important pour lui alors que Bassam rêve de fuir vers un ailleurs plus paisible...De Niro's Game, c'est l'amitié déchue par la folie meurtrière et inconsciente des hommes. Rawi Hage l'écrit de façon crue, d'une plume vive, jeune et affranchie par son exil, avec le recul que seule peut se permettre cette jeune génération qui a vu et vécue de ses yeux d'enfants ces drames mais qui, contrairement aux "anciens", n'y a pas participé....Et pour écrire de façon si vibrante à travers la voix de Bassam, il faut peut-être s'éloigner suffisamment pour prendre conscience de soi, de la force de ses racines et seul peut-être, l'exil peut le permettre...
Le rythme s'accélère jusqu'à la confession de "De Niro" complètement défoncé qui relate à Bassam dans une démence hallucinée, ce qu'il vient de faire et vivre dans les camps de Sabra et Chatila. L'écriture de Rawi Hage est à la fois sonore et visuelle, très cinématographique. La troisième partie qui conte son exil à Paris après cette scène qui signe la sortie de scène dramatique de Georges; parait beaucoup moins rythmée et cadencée que les deux précédentes. Pourtant même si elle en est déstabilisante par ce basculement de rythme; elle est justement à la mesure de l'égarement de Bassam, complètement sonné de se retrouver dans ce nouvel environnement...Elle est également déterminante car elle marque le dénouement de l'intrigue en apportant un éclairage nouveau sur la personnalité de Georges.Un premier roman que j'ai trouvé à la fois poignant, sombre, violent et vibrant, dont je suis ressorti moi aussi un peu sonnée mais heureuse d'avoir découvert cette nouvelle plume.
Pour en savoir plus sur cet ouvrage et découvrir d'autres points de vue, lisez l'interview de Christine Rousseau dans Le Monde Article du Monde et le point de vue de la bloggueuse lili sur "Les lectures de lili" !