Presque Nuit
Et de grands papillons sont tombés dans la mort
Dans les défroissements de l'origine
Ils ont des yeux pour regarder la mort
Pour regarder le feu et les sommeils
Cela qui fait de la violence de leurs ailes
Soleil et nuit dans le multiple songe
De ces jardins incendiés d'oubli
Un homme est traversé par des couleurs
Et je le vois dormir dans sa paix retenue
Au-dessus de sa vie est le plus sobre ciel
Avec l'enfant de l'araignée pour tout recoudre
Musique et dispersion de ces pollens sonores
Qui deviendront nuage et rage de l'esprit
Contre cela qui tend sa main réelle
Comme une barque immense de l'esprit
Brûle et se tait
Papillons de joie pure
Papillons de substance
Le grand désir de vos corolles vous dévêt
Comme seront dans le miroir les ombres filles
Dénudées par les arbres
Et remirant leur feu à des feux de prairie
Les papillons sont les témoins de la substance
Voilée de plis et de replis ô corps d'amour
Les sources de ta vie sont dressées dans les branches
Et c'est champ d'asphodèles
Sous la lumière écartelée reprise
Dans les surgissements et les débris
Ce qui va ce qui vient
C'est toi Cœur et c'est battements de ce cœur
Il y a dans la saison d'été d'autres prairies
Que les prairies prêtées à la lumière
L'argile en toi est la saison de mort
Sur qui s'étend, en ombre noire, un frais nuage
Aux mille éclairs de papillons, aux lampes nulles,
Et la lumière aussi est feu d'exil
Ô papillons voici pour nous le temps et l'heure
Refermez vos amours, rouvrons notre souci
Sur ce qui est grisaille et longue cendre
Dans ce pays qui n'a de vérité qu'instable
Avec l'immensité des arbres, les rivières
Et le cou des jeunes collines, les enfants
Ayant dormi dans les rosées vieillies
J'irai jusqu'à l'ultime porte du désir
Avec les liserons bleuis d'une pensée
Debout dans les immaculés du temps
Cet air dehors qui tremble aux interstices
Comme une perle est un soleil tranquille
Au-dessus des liquidités d'un lac
Lui-même obscur et vaporeux déjà
Sur lui est la cérémonie promise
De deux insectes
Salah Stétié - 2003