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Le gâteau cent fois bon

Publié le 01 novembre 2008 par Doespirito @Doespirito

Après la sensualité et les séries américaines , j'ai décidé de m'attaquer à un autre gros pourvoyeur d'internautes visiteurs de blogs : la cuisine. Il faut ce qu'il faut. Si je veux exploser les stats, pourquoi se priver de tous ces gens qui ont l'eau à la bouche dès qu'on parle de saint-pierre au beurre de gingembre ou de grenadins de veau aux cèpes ? De celles qui sanglotent devant des chipirons à l'encre servis fumants sur une terrasse de Biarritz ? De ceux qui se mettent à genoux devant une poêlée de casserons aillés ou un magret de canard sur figues chaudes, arrosé d'un Loupiac 47 ? De celles qui se damneraient pour des toasts chauds rôtis à la cannelle, et même des rouleaux de truite fumée avec son guacamole au wasabi ou des cagouilles à la sauce au luma ? Sans parler de celles et ceux qui donneraient leurs chemises (ou qui l'enlèveraient) pour juste apercevoir l'étiquette d'un saint-julien 5e cru classé, d'un petrus datant d'avant le phylloxéra ou d'un gewurztraminer vendanges tardives...

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Je vais donc sacrifier à l'attrait du public. La cuisine, ça marche à mort et ça fait de l'audience. Les restaurants vendent des formations pour les clients gastronomes. L'autre jour, je suis allé déjeuner chez Colette : ils proposent des cours de cuisine à 65 € la session. Mais ce que j'ai mangé sur place ne m'a pas convaincu de m'y inscrire... Tant qu'à faire, autant aller à ceux du Crillon. Il y a plusieurs librairies à Paris qui ne vendent que des livres de cuisine. Et des sites internet qui ne proposent que ça aussi. Mais bon, qui dit cuisine, dit recette.
J'en connais une excellente, qui épatera vos amis. Ça s'appelle l'apfelkuchen (prononcer à l'allemande). Je garde précieusement cette fiche cuisine de Elle datant d'une bonne trentaine d'années glissée dans un exemplaire pourri du Ginette Mathiot, édition 1955. Ah le Ginette Mathiot... Tout jauni, sale comme un peigne, quasiment en miettes, toutes les pages se décollent. Je passe un temps fou à retrouver les deux-trois recettes que j'affectionne. Page 243, au titre des savoirs inutiles, je note qu'il faut «obligatoirement acheter le canard vivant si on veut le préparer au sang. L'étouffer une heure au plus avant la cuisson. » J'imagine le dialogue en cuisine, à l'époque : « Vas-y, Josette, étouffe-moi le canard pendant que j'ouvre les huîtres... » « D'accord, mais c'est toi qui estourbis les anguilles...»

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L'apfelkuchen, c'est un peu comme le “Gâteau 100 fois bon” cher au Père Castor. On met dedans des tas de bonnes choses, et le résultat est meilleur que chaque élément séparé. Ce qui n'est jamais garanti en cuisine, où délice rime plus souvent avec simplicité. Non, là, ça gagne en qualité au fur et à mesure qu'on ajoute des ingrédients. A se demander pourquoi les concepteurs se sont arrêtés en si bon chemin. Onze ingrédients, c'est un peu chiche. A 17, c'était l'extase, à 53 l'orgasme multiple garanti. Evidemment, c'est un peu calorique, ce truc : la moindre bouchée est aussi riche qu'un foie gras tartiné sur du Kouign amann au sirop d'érable. Faites la recette discrètement : c'est une arme interdite par la convention de Genève. Ça vous met une compagnie de GI's obèses hors de combat en moins de deux. Mais honnêtement, ça vaut le détour et vous ne regretterez ni la dégustation, ni les 28 tours de pistes supplémentaires que vous vous taperez dimanche prochain, quand il s'agira d'évaporer l'excédent pour espérer rentrer à nouveau dans votre sarouelle.

Pour éviter de surcharger cette note, je mets la liste des ingrédients ici et la recette en elle-même-là. Imprimez-les à part, c'est plus pratique. En fait, et c'est là où je voulais en venir (vous imaginez bien que tout ça n'était qu'un prétexte...), ce gâteau a un avantage étonnant. On peut changer d'idées en cours de route et réutiliser une partie des ingrédients pour faire autre chose. Normal, vu le nombre... Le fond du gâteau est la meilleure pâte à tarte que je connaisse : non seulement il y a l'habituelle farine et le beurre, mais il y a aussi trois œufs, un peu de sucre et surtout un zeste de citron. Vous ne ferez plus jamais la tarte au citron sans cette pâte, et votre tarte fine aux pommes caramélisées va atteindre des sommets culinaires inégalés.

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Dans le fond du gâteau, vous verrez, on met de la chapelure. Vous pouvez donc remplir votre gâteau non pas avec la garniture de l'apfelkuchen, mais avec celle du gâteau au fromage. Ça vaut très largement les versions fadasses qui circulent sur internet. Mais ce n'est pas tout : gardez le citron, le sucre et le rhum prévus dans la recette, jetez tout le reste, ajoutez de la glace pilée et un brin de menthe, secouez entre deux verres à cocktail: vous avez un mojito comme au Club Med.

Ce gâteau étonnant a encore de la ressource. Réservez la crème fraîche prévue pour le gâteau et versez-la délicatement sur le bord d'un verre rempli d'un mélange de café chaud sucré et d'un doigt de whisky. Shazam ! Vous avez un irish coffee. Enfoncé, le Bailey's…

Et comme toujours, je garde le meilleur pour la fin. Vérifiez que les enfants sont couchés, parce que là, faut mettre le carré blanc. C'est bon ? On peut y aller. L'apfelkuchen fournit en effet la base pour une recette érotique étonnante. Là, c'est très simple : demandez à votre compagnon ou votre compagne de vous aider à préparer la pâte. Attendez qu'il ou elle ait les mains dans la farine, bien collantes. Il ne vous reste plus qu'à l'enlacer par derrière en lui précisant :
1 - que vous venez de vous changer et qu'il est donc inutile de poser ses mains pleines de doigts et de farine sur un tissu aussi délicat
2 - que de toutes façons, quoi qu'il ou elle lui arrive, ça ne l'empêche pas de continuer à pétrir.
J'ai testé, ça marche à tous les coups. Merci qui ?


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