Il était plutôt question au départ de connaître davantage les membres de mon cabinet grâce à ce "community challenge": renforcer la cohésion entre les membres d'une "entreprise" à travers un défi commun, améliorer en une journée le quotidien de 80 demandeurs d'asile pour toute une année!!!
Juste une heure de trajet et nous voilà propulsés des Champs Elysées à un CADA en plein coeur de la campagne...Plus de tailleurs, plus de cravates, on change de costume pour l'occasion: un Tee-shirt "community challenge" est distribué gracieusement à l'armée de volontaires du cabinet!
Le soleil brille, la campagne est belle...pourquoi ne pas en profiter pour se délasser à quelques dizaines de kilomètres de Paris par des travaux un peu plus physiques: plantation d'arbres fruitiers, peinture des murs du 1er étage du CADA, installation d'ordinateurs avec une connection internet, décorations Halloween avec les enfants, tri des habits et des jouets et atelier cuisine.
Les demandeurs d'asile sortent pour nous accueillir avec le sourire...
Petit rappel nécessaire...
L’accueil des demandeurs d’asile et des réfugiés est une obligation faite aux États signataires de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 modifiée par le protocole de New York du 31 janvier 1967 relatif au statut de réfugié et ratifié par la France.
En France, le CADA a pour mission l'accompagnement des demandeurs d'asile tout au long du processus d'obtention du statut de réfugié auprès de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA), puis du Commissariat général aux réfugiés et apatrides (CGRA).
Seules les personnes bénéficiant d'une Autorisation provisoire de séjour d'un mois ou d'un récépissé de 3 mois accordé au titre de la demande d'asile, peuvent bénéficier d'une place dans ces foyers. Une allocation d'attente peut être versée aux demandeurs d'asile tout au long de la procédure. Cette aide peut néanmoins être refusée aux personnes hébergées dans ces centres. Au 1er janvier 2007, cette allocation s'élevait à un montant de 10,22€ par jour et par adulte, aucune majoration pour les enfants n'étant proposée.
Les CADAs offrent aux demandeurs d'asile un suivi administratif, médical et une scolarisation de leurs enfants.
La procédure de demande d'asile peut s'avérer particulièrement longue,
d'autant plus longue que les demandeurs n'ont pas le droit de travailler en France,
d'autant plus longue que la réponse qu'ils attendent aura une grande incidence sur leur existence:
Vont-ils devoir retourner dans un pays, dans lequel ils craignent d'être persécutés du fait de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un certain groupe social, de leurs opinions politiques ou de leur lutte en faveur de la liberté?
En tout état de cause, devront-ils retourner dans un pays, dans lequel ils ont été poussés à tout abandonner, amis, famille et travail pour survivre ou dans l'espoir d'un avenir meilleur pour eux et pour leur famille?
Arrivée au CADA d'Hautefeuille...
En arrivant, j'ai senti comme un malaise, comme un décalage entre les rires de notre équipe et le sourire plein d'attente des demandeurs d'asile...
Et oui, pour certains ca fait des mois qu'ils attendent! Certes, la campagne est belle mais le besoin de sortir, de sentir un lien avec le reste de la France et avec nos chers compatriotes français peut surgir!
La présentation du CADA est très rapide. Quelques données pas très précises...puis on partage les taches.
Les demandeurs d'asile parlent peu français: comment communiquer? comment tenter de leur apporter un semblant d'humanité sans cet instrument commode qu'est la langue?
Je décide de participer à l'atelier cuisine, de partager avec les femmes du monde le plaisir des saveurs et des odeurs. Je ne regrette pas mon choix. La cuisine, c'est universel!!! Une complicité s'installe rapidement et moi j'apprends.
Elle est irakienne. Elle parle un peu anglais. Elle a rapporté de son pays des savoureux citrons confits noirs et un mélange d'épices indéterminé.
Un petit tour au Bengladesh avec cette maîtresse femme qui sourie et rigole beaucoup et nous fait partager avec un grand plaisir ses recettes: riz biryani, samosas. Dans cette cuisine, les hommes font les petites mains, les enfants s'approchent des marmites pour reprendre un peu de l'attention de leurs mères volée par les fourneaux.
Elle est tchétchène et parle un peu français. Avec elle, j'ai le droit de grignoter. J'arrive vaguement à deviner les aliments: de la viande, du persil, oignons et beaucoup de savoir faire!!!
Après avoir suivi la préparation de quelques plats, nous descendons pour déguster. Certaines femmes ont bien travaillé pendant la nuit. Les tables sont garnies de multiples mêts d'ailleurs.
Je m'installe avec mes nouveaux amis du Bengladesh et on déguste!!!
Et puis, maintenant qu'on a bien mangé, tout le monde se sépare. Les demandeurs d'asile dans leur coin, notre équipe dans un autre. Ce n'est pas évident de se mélanger. J'essaie de m'approcher un peu des enfants.
Et oui, ils ont le regard triste...Nous avons fini nos missions et nous aussi, nous passons le reste de notre journée à attendre...et là, j'imagine...attendre ainsi pendant des journées, des mois, même des années...L'attente, rien de pire que l'attente!!!Petite altercation à la sortie du CADA!!!Je commence à sentir les tensions.
La journée est terminée! Nous retournons tranquillement dans le bus la tête pleine d'impressions! Ils nous font signe de la main, ils nous remercient d'avoir partagé une journée avec eux! Et pourtant, ce n'est pas grand chose!!!
Nous sommes fatigués, nous souhaitons tous retourner à la chaleur de nos douces chaumières.
Néanmoins, certains supportent bien une petite coupe de champagne à l'arrivée!
Je rentre chez moi, pas très fière! Et oui, je pourrais faire beaucoup plus pour les autres!
Et d'ailleurs, ca va changer!!!