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78ème semaine de Sarkofrance : Sarkozy, la connivence de classe au grand jour
Publié le 01 novembre 2008 par JuanAu printemps 1983, pressé par son ministre de l'Economie et des Finances de l'époque, Jacques Delors, François Mitterrand annonçait aux Français le "tournant de la rigueur." Vingt-cinq ans plus tard, Nicolas Sarkozy semble refaire le coup à son électorat médusé. François Hollande s'est ainsi dépêché de dénoncer les reniements présidentiels. D'autres s'amusent d'un Sarkozy soit-disant devenu étatiste voire socialiste. L'opposition ne fait-elle pas fausse route ? Sarkozy ne s'est pas renié.
La crise actuelle a simplement fait éclater le vernis "populaire" d'une politique de classe sans ambiguïté. Cette dernière semaine, la 78ème de la Sarkofrance, le roi est enfin nu.
La tentation autoritaire
Les historiens et psychologues se pencheront plus tard sur cet étrange président qui dépose des plaintes à chaque attaque. Ce mercredi, il a perdu une manche. A trop user de la justice, celle-ci ne suit plus. Un juge, visiblement sans enjeu de carrière, a débouté le Président de sa plainte contre la poupée vaudou à son effigie. Si l'on ajoute la reprise en main de l'audiovisuel public, l'appel d'offre gouvernemental pour surveiller les blogs, la plainte contre un militant socialiste qui brandissait une pancarte "Casse-toi pov' Con" lors de sa visite à Laval, cette semaine fut riche !
La fausse rénovation du système financierMardi dernier, Nicolas Sarkozy a justifié son sauvetage des banques. L'assistance était docile, les manifestants tenus à l'écart: "L'argent des banques, c'est le vôtre !"
Il n'a pas injecté 380 milliards d'euros dans le système financier français. Il a promis une garantie gigantesque, mais il s'est contenté de prêter aux principales banques françaises la coquette somme de 10,5 milliards d'euros à un taux double du marché (8% versus 4%). Bizarrement, il s'est étonné jeudi que lesdites banques ne prêtent pas assez. Premièrement, le prêt de l'État est très cher : emprunter à 8% pour prêter à 4% aux particuliers et aux entreprises est loin d'être une bonne affaire ! Deuxièmement, le ralentissement économique général n'encourage pas le crédit. Tout le monde le sait. Quand vos débiteurs flanchent faute de clients ou de revenus, voulez-vous leur prêter davantage ?
Le Monarque nous avait fait croire à un sauvetage. Il a en fait prêté, à des taux proches de l'usure, à quelques banques, plutôt que d'installer un contrôle de leur gouvernance; il a ainsi créé une société d'économie mixte, avec l'Etat actionnaire minoritaire pour éviter d'abimer les critères de Maastricht, qui va gérer le refinancement des établissements de crédits. Et qui en aura le contrôle ? Les banques ! Ouaf ! Merci Président. je ne savais pas qu'on pouvait confier la rénovation d'un système à ceux qui l'ont plombé...
Les classes populaires, dindons de la farce
Bizarrement, l'unique aveu d'impuissance de Nicolas Sarkozy fut ... sur les questions sociales ! Contre les licenciements ou le déficit de l'assurance maladie, il n'y peut rien. Il faut que l'on se serre la ceinture sans moufter. Cette semaine, il a donc avoué : «on ne pourra pas éviter qu'il y ait des licenciements» a-t-il déclaré jeudi,devant des préfets, des trésoriers payeurs généraux et des banquiers.
L'assouplissement du code du travail n'est pas remis en cause. Les classes populaires en sont les seules victimes. En avril dernier, le gouvernement avait ainsi fait voter "son" projet de loi sur la flexisécurité. Ce dernier assouplissait les conditions de rupture du contrat de travail sans prévoir de disposition sur la formation ou la sécurité renforcée des chômeurs. Au contraire, le gouvernement a fait voter quelques mois plus tard son projet de sanction contre les chômeurs refusant "deux offres raisonnables d'emploi."
Mardi à Réthel, Sarkozy a même annoncé vouloir simplifier les conditions de CDD (Contrats à Durée Déterminée). Actuellement, le CDD n'est possible que pour une mission identifiée, renouvelable une fois, ou un remplacement. Le salut contre la crise serait-il la généralisation de la précarité ? Une fois de plus, le Monarque profite de la crise pour accélérer la casse sociale. Le CDD n'est pas une réponse à la crise. Une preuve ? L'intérim est la forme la plus souple de travail temporaire pour une entreprise peu rassurée sur ses perspectives de croissance à long terme. Depuis avril dernier, l'intérim est en crise. En période de récession, les entreprises coupent ce qu'elles peuvent.
Sarkozy fait le pari que la précarisation du travail favorisera le rebond de croissance attendu pour 2010. Les seniors ne peuvent plus compter sur une pré-retraite à 55 ans. Sarkozy est heureux: "on a enfin libéré le travail des seniors".
L'assurance maladie est également sous pression. L'an prochain, les mutuelles vont augmenter leurs tarifs de 4 à 5%. Vendredi, les députés ont même élargi le champs des infractions à la Sécu : désormais, plusieurs "infractions ou omissions" seront susceptibles d'être sanctionnées comme "l'infraction aux règles du code de la Sécurité sociale ou de la santé publique" ou"l'absence de réponse ou la réponse fausse à toute demande de pièce justificative". Un député UMP a même tenté de défiscaliser les cotisations ... patronales. Ben voyons !
La rigueur n'est pas la même pour tous. Le budget débloqué pour les 100 000 contrats aidés supplémentaires en 2009 est inférieur aux coûts des nouveaux avions de la Présidence (280 millions d'euros !). Y-avait-il donc urgence à acheter un nouveau joujou volant pour l'hôte de l'Elysée ?
La fausse solidarité nationale
Le programme présidentiel consistait à faire croire aux classes populaires que leur avenir était dans la libération du travail et l'allègement des impôts pour tous. Mais le pouvoir d'achat n'a pas suivi; et ces défiscalisations ont plombé un peu plus les comptes de la Sécu et des retraites. Aujourd'hui, alors que la récession frappe le monde réel et plus seulement les 20% de Français qui avaient quelques placements en Bourse, on touche le fonds de l'hypocrisie : le Monarque ne remet pas en cause les cadeaux fiscaux offerts aux plus riches l'an dernier, ni les sacrifices imposés aux plus grand nombre.
Ainsi, le fameux bouclier fiscal que Nicolas Sarkozy a fait rabaisser de 60% à 50% semble inviolable : il a pourtant coûté 246 millions d'euros au budget de l'Etat en 2007 pour 16 000 bénéficiaires. Parmi eux, 671 contribuables ayant un patrimoine de plus 15,5 millions d'euros se sont vus restituer 68% de la somme, soit 231 900 euros en moyenne.
Ainsi, quand il s'agit de trouver quelques recettes supplémentaires pour le financement de la Sécurité Sociale, les parachutes dorés jusqu'à un million d'euros sont exonérés de la nouvelle taxe de 2%. Mais elle n'a pas hésité à créer des franchises médicales pour les malades.
Ainsi, un chômeur refusant deux offres "raisonnables" d'emploi sera sanctionné (réduction ou suppression de ses indemnités). Luc Chatel a même proposé la légalisation générale du travail le dimanche. Que se passera-t-il si un candidat refuse de bosser le dimanche ? Depuis un an, Nicolas Sarkozy répète à l'envie le même exemple des boutiques des Champs Elysées ("sur le trottoir côté Nord, pas sur l'autre, l'ouverture le dimanche est autorisé"). L'un de ses conseillers pourrait-il lui dire qu'il en devient ridicule ?
Les rares mesures d'équité nationale étudiées cette semaine ont été le plafonnement de 4 niches fiscales, une prime transport et l'allègement des malus automobiles pour les familles nombreuses. Bravo et merci.
"Il suffit de dire une fois les choses, quand on en est convaincu."
Nicolas Sarkozy, 17 juin 2008.
Ami Sarkozyste, où es-tu ?
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