Voilà bien plusieurs jours maintenant que j'ère dans cette forêt. Le brouillard ne s'est pas levé, mais ce n'est pas le plus étrange. La nuit n'est, semble-t-il, jamais venue. Et je l'ai attendue
pourtant. Des heures durant, affalé contre un arbre, scrutant les alentours. Espérant en finir. Même l'horreur m'aurait soulagé, mais rien ne vint. Alors je me suis relevé, et je suis
reparti.
Tout se ressemble par ici. J'ai l'impression que les arbres me dévisagent à chaque pas. Et peur qu'ils s'animent à tout instant, alors que c'est peut-être la meilleure chose qu'il pourrait
m'arriver. Ils sont tous pareils. Immobiles, oppressants. Je suis déjà passé par ici.
Il y a un bruit qui me suit depuis quelques heures. Je suis poursuivi par quelque chose d'invisible, de tapi dans la brume, qui en veut à mes nerfs. J'ai bien tenté d'affronter sa présence, mais
elle s'arrange toujours pour m'éviter et me surprendre par derrière, par le bruissement de ses pas dans les feuilles mortes.
Il y a comme une lamentation, au loin. Une âme en peine, perdue tout comme moi. Une compagnie inespérée. Il faut que je la rejoigne au plus vite, mais je suis trop faible pour courir. Il y a bien
des choses que j'aurais aimé faire, mais plus rien n'est possible désormais. Je dois trouver l'origine de ces sanglots.
Soudain, un cri perce ma solitude, me portant à deux frissons de la crise de nerfs, à deux rires de la folie pure. Puis, plus rien. J'espère que mon tour viendra. Rapidement. Avant que moi aussi,
je ne finisse par hanter ces bois maudits.