Un matin, un homme sonne à la porte de Baptiste Bordave: il est en panne de voiture, la cabine téléphonique de la rue en dérangement et souhaiterait téléphoner. Baptiste ouvre la porte à l'inconnu sans se douter de l'aventure incroyable dans laquelle il sera très vite embarquer. A peine le numéro de téléphone a-t-il été composé que l'inconnu s'effondre, foudroyé par une crise cardiaque. Baptiste ne sait que faire et se précipite pour appeler les secours. C'est alors que la conversation impromptue, au cours de la soirée précédente, lui revient en mémoire: s'il appelle les secours, il sera le premier suspect! Peu à peu, l'envie d'en savoir plus sur l'inconnu l'amène à fouiller ses poches: l'inconnu s'appelle Olaf Sildur, est Suédois résidant en France, à Versailles. Et si c'était l'occasion rêvée de changer de vie? Le défunt a le même âge que lui, à peu près la même taille, un peu rondelet certes mais quand on le trouvera le temps aura fait son oeuvre et l'aura minci.....
Commence alors une plongée dans un univers parallèle de luxe, de volupté, de secrets flous, de fortune immense et de piscine où flottent, à la juste température, les meilleurs crûs de Champagne.
Seulement, voilà, la plongée est loin de tenir les promesses alléchantes des premiers chapitres; en effet, j'ai eu l'impression de me retrouver, enfin!, devant un roman de l' Amélie Nothomb des débuts: le postulat est intéressant, même s'il n'est pas original, le rythme happe immédiatement le lecteur, les situations sont entre le comique et l'absurde, bref, les ingrédients semblent être là pour une intrigue réussie. Certes, le lecteur sourit, voire rit, mais très vite, tout tourne en rond et il ne voit pas vraiment où l'auteure veut en venir....d'ailleurs le sait-elle, elle-même?
Bien entendu, il y a quelques bons passages, de belles descriptions de la boisson préférée de l'auteure, celle qui offre le spectacle de sublimes bulles fines et chantantes, bien entendu le roman annuel de Melle Nothomb se lit bien, bien entendu l'écriture est fluide et bien menée, bien entendu le côté ubuesque et décalé est présent, mais, car il y a mais, le pétillant (champagnisé?) n'existe que dans les flûtes, délicieusement givrées, bues par les protagonistes, Baptiste/Olaf et Sigrid! C'est là que le bât blesse: le pétillant n'est plus et n'enchante plus les papilles lectrices.
Je suis restée sur ma faim: l'usurpation d'identité et le plongeon dans une vie de luxe et de volupté, alimentée sans doute de douteuse et frauduleuse manière, méritaient une fin autrement mieux construite et non bâclée en quelques pages, petits cheveux désagréables flottant dans une coupe de champagne...même si la dernière phrase diffuse les senteurs du Japon!
"Il y a un instant, entre la quinzième et seizième gorgée de champagne, où tout homme est aristocrate. Ce moment échappe au genre humain pour un motif médiocre: les êtres sont si pressés d'atteindre le comble de l'ivresse qu'ils noient ce stade fragile où il leur est donné de mériter la noblesse." (p 128)
"Je raccrochai et continuai à contracter des dettes pharaoniques. Je savais que je ne risquais rien. Les banques tiennent à leurs clients prodigieusement endettés autant qu'à leurs milliardaires, surtout quand leur passif succède à une fortune: les banquiers se persuadent qu'un homme qui a été si riche est capable de se refaire. S'il reste endetté, c'est qu'il a investi. Cet homme courageux croit en l'avenir - comme le prouvait mon ambitieux fonds d'art contemporain.
Sigrid et moi reproduisions à l'échelle individuelle la logique économique des pays les plus puissants de la planète. Notre dette publique nous indifférait. C'était le fait du prince." (p 169)
"Pour moi, ce blanc était celui de la page vierge que j'avais conquise." (p 170)