Je pense que mes camarades socialistes d'Evreux n'ont pas suffisamment accordé d'importance à la nomination de Bruno Le Maire, comme responsable départemental de l'UMP. Le député qui a succédé à Jean-Louis Debré, devenu président du Conseil constitutionnel, a plus d'une corde à son arc. Il est brillant, déjà très expérimenté, certainement animé du goût du pouvoir (au plus haut niveau) ce qui en fait un adversaire dangereux.
Qui est Bruno Le Maire ? Il entre à l'Ecole Normale Supérieure en 1989, est reçu major de l'agrégation de lettres en 1992, diplômé de l'IEP et ancien élève de l'ENA. Cela pose déjà son homme. Voilà un député qui possède un beau back ground comme aimait à le dire Philippe Pontet qui le précéda dans ce département comme ex-futur chef de file de la droite. Ancien directeur de cabinet de Dominique de Villepin, il est forcément au courant des détails des turpitudes judiciaires qui assaillent l'ancien Premier ministre, ex-ministre de l'Intérieur, et n'a pu qu'être marqué par les vicissitudes qui bouleversent les plus beaux plans de carrière.
Que vient-il faire dans l'Eure ? Evreux est situé à 100 km de Paris. La capitale de l'Eure est facile d'accès. Bruno Le Maire peut donc facilement jouer son rôle de conseiller politique de l'UMP rue La Boétie à Paris et remplir ses mandats locaux (député de l'Eure et conseiller municipal d'opposition à Evreux). Devenu responsable de l'UMP départemental, on peut compter sur lui pour agir avec anticipation afin de maintenir les positions de la droite et, si possible, les accroître.
C'est ainsi qu'on l'a vu à la télévision, dans « sept à huit » une émission de TF1, au cours de laquelle, pendant quelques minutes, il s'est lamenté sur le sort d'une entreprise rolivaloise (Automatech) par ailleurs performante mais considérablement affectée par la crise financière et des problèmes de trésorerie. Au passage, il a égratigné Val-de-Reuil mais venant d'un Parisien, cette critique permanente chez les gaullistes canal historique, n'avait que peu de portée.
A Val-de-Reuil, Bruno Le Maire est sorti de « son » territoire d'élection pour entrer dans l'arène politique voire politicienne. Val-de-Reuil appartient à la 4e circonscrioption de l'Eure, celle de François Loncle, la seule qui manque au tableau de chasse de la droite. Les rivalités qui opposent les postulants de gauche (ou dits de gauche) à la succession (éventuelle) de François Loncle, aiguisent les appétits de la droite. Ses responsables auraient tort de ne pas se préparer au combat. Il est vrai que les plans sur la comète dressés trois ans et demi avant l'échéance sont, par nature hypothétiques. Ce truisme devrait toutefois mettre la puce à l'oreille des responsables de la Gauche et les inciter à se montrer courtois mais…intraitables avec le député d'Evreux comme sut l'être Nicolas Sarkozy, par exemple, avec Jacques Chirac !
Marc-Antoine Jamet, maire de Val-de-Reuil, n'a pas apprécié la ballade dans sa ville du natif de Neuilly-sur-Seine. Il écrit : « par intérêt personnel, il n’a pas aidé une commune qui l’aurait plutôt attendu aux côtés des salariés de Tyco dont l’entreprise est délocalisée en Roumanie par des dirigeants sans âme, que sous les projecteurs de TF1. Heureusement, pour Automatech, sans l’aide fatale de Bruno Le Maire, il a été décidé qu’une commission composée d’OSEO, de la Caisse des Dépôts et des trois principales banques du territoire examinera dans les prochains jours les moyens d’épauler l’entreprise et de sauver son activité. A la mairie de Val-de-Reuil, on espère que cela fonctionnera sans parasitisme, ni politique spectacle. »