La crise du système capitaliste que nous subissons depuis le mois de septembre 2008 à l'échelle de la planète, mais dont les prémices avaient débuté aux Etats-Unis il y a un peu plus d'un an avec la crise dite des subprimes est l'occasion pour le Blog Citoyen de traiter d'un sujet particulier, à savoir la question de la pertinence du développement des agrocarburants ou des biocarburants. Mais avant de poser le cadre de la polémique actuelle d'autant plus prégnante en cette période de crise mondiale, il est nécessaire de faire un bref rappel de ce que sont les agrocarburants.
Les agrocarburants, ou biocarburants (d'aucuns considèrent que cette seconde appellation est erronée au motif que le préfixe « bio » implique une déontologie dont ne sont pas adeptes les producteurs et adeptes des « agro » carburants), sont des carburants pour moteurs thermiques issus de la biomasse étant entendu que le terme de biomasse regroupe l'ensemble des énergies provenant de la dégradation de la matière organique. La force du marketing développé autour de ces agrocarburants tient au fait que l'on soutient l'idée qu'ils peuvent se substituer partiellement, voire totalement, aux carburants pétroliers. Toute la polémique tient au fait que cette perspective constitue certainement une utopie ou pire un mensonge délibéré. Ces agrocarburants sont obtenus à partir de plantes terrestres résultant principalement de deux filières. D'une part, la filière huile, à partir de colza, de palme, de tournesol, de jatropha curcas. Et d'autre part, la filière alcool, à partir de la fermentation de sucres de betterave, de blé, de canne à sucre, de maïs ou de déchets végétaux.
Pour être à même de produire un bilan environnemental des agrocarburants il faut bien considérer que cela en fait dépend justement de la filière considérée et du type d'agriculture pratiquée (agriculture intensive, agriculture biologique, etc.). Pour un bilan environnemental sérieux, il faut pouvoir tenir compte de l'impact des engrais et des pesticides utilisés, de la consommation en eau qui peut être très importante pour certaines espèces végétales, de l'impact sur la biodiversité quand d'immenses zones de cultures remplacent des forêts tropicales par exemple. Sans avoir à développer plus ici, on notera que les agrocarburants peuvent aussi avoir des conséquences sociales importantes sur certains pays comme les pays du Sud, et que la culture de agrocarburants pour les pays du Nord est bien plus rentable que l'agriculture traditionnelle destinée à nourrir les populations locales.
Voilà, en peu de mots, posée la polémique de notre sujet ...
Il faut dire que nombreux sont ceux qui sont sceptique quand à l'intérêt des agrocarburants et met en avant les conséquences écologiques de la déforestation. Un rapport du Department for Transport britannique va dans le même sens RTFO. Ainsi, on notera que la déforestation en Malaisie et en Indonésie pour planter des palmiers à huile, et au Brésil pour planter de la canne à sucre nuit très sérieusement au bilan environnemental des agrocarburants classiques. Dans cette perspective, et selon l'ONG Via Campesina, la déforestation pourrait conduire à rendre les agrocarburants pires que le pétrole qu'ils remplacent.
Il n'est donc pas étonnant dans ce contexte que des initiatives puissent prendre forme comme celle initiée par de nombreuses associations sous le titre « Les agrocarburants, çà nourrit pas son monde » L'argumentaire de ces associations porte principalement sur le fait que réduire la dépendance au pétrole, tout en limitant l'émission de gaz à effet de serre ne peut passer par les agrocarburants comme le prétend et y répond la Commission européenne car le problème est que, de la culture des végétaux jusqu'à la sortie de l'usine, l'énergie utilisée pour produire ces carburants prétendument écologiques est telle que leur rendement énergétique est très médiocre.
Si vous souhaitez obtenir plus d'informations sur les ressorts d'une telle campagne, je vous invite instamment à consulter l'argumentaire qui pointe du doigt d'une part que les partenaires du Sud (la plupart du temps des pays dits en voie de développement, où en tout cas le problème de la nutrition sinon de la malnutrition est un problème majeur) s'alarment des impacts catastrophiques d'un développement à grande échelle des agrocarburants et d'autre part que des scientifiques émettent des doutes sérieux sur les avantages écologiques de nouveau carburant, en particulier sur sa contribution à réduire les émissions de gaz à effets de serre. En effet, ces agrocarburants sont issus de monocultures intensives, et ils accélèrent notamment la déforestation comme en Indonésie où l'équivalent en forêt d'un terrain de football disparaît toutes les 10 secondes pour faire place aux plantations de palmiers à huile. (Comptez le temps que vous aurez mis à lire cet article et vous mesurerez l'ampleur du problème)
Dans le contexte international actuel, le Blog Citoyen a donc choisi de prendre parti et d'interpeller ses lecteurs afin de diffuser cette information : les agrocarburants menacent aujourd'hui les populations locales et les cultures vivrières, en accaparant la terre et les ressources naturelles. Alors que des centaines de millions de personnes sur notre planète souffrent d'extrême pauvreté et de faim, poursuivre le développement massif des agrocarburants ne fait qu'aggraver la crise alimentaire mondiale.
Il n'est plus possible de penser le monde de manière égoïste et parcellaire, seule une démarche globale capable d'appréhender au niveau international les problèmes posés est encore à ce jour légitime et pertinente. C'est pourquoi le Blog Citoyen s'associe aux associations citées ci-après pour faire passer un message essentiel : « Les agrocarburants, çà nourrit pas son monde ».
Les Amis de la terre
Les Amis de la Terre est une association de protection de l'Homme et de l'environnement. Elle mène des actions de
plaidoyer auprès des décideurs politiques et économiques et sensibilise le grand public sur les grandes problématiques environnementales : forêts tropicales, responsabilité des acteurs
financiers, changements climatiques, OGM et agriculture...
www.amisdelaterre.org
CCFD, terre solidarité
CCFD (Comité catholique contre la faim et pour le développement, créé en 1961)
Le CCFD-Terre solidaire soutient prés de 600 organisations partenaires dans plus de 80 pays, au profit des populations les plus vulnérables. Avec un réseau de 15.000 bénévoles en France, le CCFD
mène également un travail d'éducation au développement afin de sensibiliser l'opinion aux enjeux de la solidarité Nord-Sud, et conduit des activités de plaidoyer vis-à-vis des décideurs. www.ccfd.asso.fr
Oxam France, agir ici
Oxfam France - Agir ici (créé en 1988) Oxfam France - Agir ici est une association de solidarité internationale. Son objectif : avec chaque citoyen, construire un monde plus juste où les droits humains fondamentaux sont respectés. Oxfam France - Agir ici est le membre français d'Oxfam International, confédération de 13 organisations indépendantes qui, avec leurs 3000 partenaires répartis dans 120 pays, abordent de manière collective les multiples facteurs de la pauvreté et des injustices. www.oxfamfrance.org
Le Centre d'Investigation et d'Education Populaire
CINEP (Centre de recherche et d'éducation populaire, créé en 1972) et ASCOBA (Association des conseils
communautaires du Bas-Atrato, créée en 2003)
ONG jésuite de Colombie, le CINEP joue le rôle de centre de recherche et d'appui aux secteurs populaires sur la défense des droits de l'Homme et la construction de la paix. Il a ainsi soutenu la
création en 2003 d'ASCOBA, qui vise à préserver l'identité culturelle des communautés afro-colombiennes de la côte
Pacifique menacées par les projets de culture d'huile de palme. www.cinep.org.co
Institut Dayakologi (créé en 1991) Présent sur l'île de Kalimantan en Indonésie, l'Institut Dayakologi vient en aide aux populations indigènes Dayaks. Œuvrant à la consolidation des capacités d'autonomie de ces communautés dans la gestion de leur vie sociale, culturelle et économique, l'Institut réalise également un travail sur la paix et la réconciliation entre les différentes populations sur l'île. www.dayakology.com
Synergie Paysanne
Synergie paysanne (créé en 2002) Synergie paysanne est un syndicat agricole du Bénin. Particulièrement impliqué sur les questions foncières, il vise à défendre les intérêts des paysans béninois devant les pouvoirs publics, à travers des plates-formes revendicatives.
FASE
FASE (Fédération d'organisations pour l'assistance sociale et l'éducation, créée en 1961)
Acteur majeur au Brésil de l'éducation populaire dans les domaines de l'économie et du développement, la FASE vise principalement à appuyer et conseiller les organisations sociales à un niveau
local, régional et national. Elle réalise également de nombreuses études des politiques publiques à travers l'angle de la justice sociale et des droits des populations.
www.fase.org.br