J'ai expliqué dans mes derniers billets comment la crise financière a désormais impacté l'économie réelle à travers
principalement le canal du crédit. Mais, il y a aussi à craindre tant un ralentissement de la consommation de certains types de produits qu'un arbitrage (substitutions/abandons) dans
le panier de la ménagère. Cela se comprend facilement : si vous manquez de revenus suffisants pour vous offrir un produit, vous chercherez d'abord à en trouver un à peu près équivalent. A
défaut, vous abandonnerez sans doute sa consommation s'il vous semble hors de prix...
Aujourd'hui, je jette un regard sur l'industrie automobile qui subit de plein fouet le retournement économique. En effet, la presse a largement couvert les arrêts
temporaires de production d'une grande partie des sites français de Renault et PSA Peugeot-Citroën. Dans les faits, citons en vrac : chez PSA Peugeot-Citroën, le site de Sochaux fermera au total
dix-huit jours d'ici le 31 décembre, tandis qu'à Mulhouse, où dix jours chômés sont prévus, l'équipe de nuit a été supprimée cette semaine. A Rennes, certaines lignes de production sont
arrêtées. Du côté de chez Renault, ce n'est guère plus brillant : plusieurs sites sont fermés cette semaine dont Flins, Douai, Le Mans, Maubeuge, Batilly et Dieppe. Les usines de Flins, Douai et
Le Mans resteront à l'arrêt également la semaine suivante, tandis qu'à l'usine de Sandouville, c'est la ligne Espace-Vel Satis qui est fermée cette semaine.
Tout cela montre clairement un retournement des anticipations des constructeurs. Ceux-ci n'ont visiblement pas saisi l'impact qu'aurait cette crise sur l'achat de véhicules lorsqu'ils ont fait
leur prévisions de croissance (ils n'avaient notamment pas anticipé une chute aussi forte du marché en Espagne ou encore en Grande-Bretagne). Ainsi, Renault ne prévoit plus qu'une marge
opérationnelle comprise entre 2,5 % et 3 % alors qu'il visait en début d'année les 4,5 %. Rappelons que dans le cadre du plan Renault Contrat 2009, l'objectif assigné était de 6 % ! Il en
va bien entendu de même chez PSA qui annonce une marge de 1,3 % en 2008 contre 3,5 % prévus initialement... D'ailleurs, chez PSA Peugeot Citroën on a noté au troisième trimestre un chiffre
d'affaires de 13,301 milliards d'euros, en baisse de 5,2 % par rapport au même trimestre de 2007 ! Tout ceci a conduit les deux constructeurs français a annoncer la semaine dernière leur décision
de réduire leur production au quatrième trimestre, Renault de 20 % et PSA de 30 %, pour réduire leurs stocks face à la baisse des ventes en Europe.
Dans leur malheur, les constructeurs français peuvent se rassurer en se disant que la crise financière a touché l'ensemble du marché automobile européen. Ainsi, sur douze mois, en septembre, les
immatriculations européennes de voitures neuves ont chuté de 8,2 % après 15,6 % en août. Sur l'ensemble de l'année, le marché pourrait reculer de 8 %, à tel point que Ferdinand Piëch, président
du conseil de surveillance de Volkswagen (VW) a prédit "une traversée du désert" pour l'automobile...
Comment peut-on expliquer ce net recul dans l'automobile ? C'est là encore une histoire de pouvoir d'achat puisque, confrontés à une baisse de celui-ci, les automobilistes qui voulaient changer
leur voiture ont décidé de reporter leur achat. De plus, en Europe, 80 % des véhicules sont achetés à crédit. Essayez donc de venir emprunter 20 000 euros aujourd'hui à une banque et
vous comprendrez combien elles sont réticentes à prêter de l'argent en ce moment...
Le problème prend alors une autre dimension lorsque l'entreprise se doit finalement d'adapter sa production à une demande en forte baisse. Cela débouche sur les arrêts de travail que nous avons
évoqués ci-dessus. Mais quand la baisse de la demande est durable, on abouti alors aux licenciements : Volvo va ainsi supprimer 850 emplois, en plus des 1 400 déjà annoncés, Chrysler 1 800,
General Motors envisage des licenciements, Volkswagen pourrait licencier jusqu'à 25 000 travailleurs intérimaires, Renault a annoncé récemment la suppression de 2 000 emplois dans ses filiales
européennes en plus des 4 000 déjà prévus en France, etc. !
Nous sommes donc partis d'une crise bancaire localisée sur un compartiment bien précis (les subprimes) pour arriver à une crise économique grave. C'est ce cheminement que je chercherai à
expliquer lors de ma conférence spécialement dédiée à la crise le 13 novembre 2008 à 20h00 au Burghof de Forbach (pour les non inscrits au cycle complet de conférences, possibilité d'assister
spécifiquement à celle-ci au prix de 3 euros avec inscription prélable obligatoire).