En montant mes placards, j’ai construit cette réflexion sur les blogs

Par Georgesf

 En montant mes placards,
j’ai construit cette réflexion sur les blogs

  

J’ai vu arriver cette semaine deux mails qui m’ont plongé dans un gouffre de réflexions. J’y ai repensé tout le temps en construisant mes placards. Je résume ces mails, car ils étaient décorés de multiples gentillesses qui ne regardent que moi – mais merci aux émetteurs.

1er mail, d’une blogueuse. « J’ai lu votre « Qui comme Ulysse », que j’ai beaucoup aimé » –excellent début de mail, continuons… « … Mais je ne crois pas que je vais en faire un billet sur mon blog, car il y en a déjà eu tellement sur la blogosphère que je ne vois pas quoi dire d’original ».

2ème mail, que je vais ré-écrire car il était formulé de façon tellement complexe qu’on s’y perdait : en gros « Les blogs, c’est une illusion, pour les auteurs : ils croient toucher beaucoup de monde, mais ce sont presque toujours les mêmes cent ou deux cents personnes. C’est un petit monde qui tourne en rond : ce sont les mêmes qui tiennent un blog, qui fréquentent le deuxième, qui déposent un commentaire sur le troisième. Il suffit de voir les noms des commentaires, ce sont toujours les mêmes. »

Il y a là une apparence de vérité. Une apparence seulement, comme le montre le croquis dessiné ci-dessus. C’est une fleur. Ne riez pas, dans notre couple, ce n’est pas moi l’artiste. C’est ma femme, elle peint franchement mieux que moi. Je croyais que c’était connu de toute la blogosphère, grâce à son site. Mais nous venons de découvrir que ce site est fermé depuis plusieurs mois : nous avions oublié de payer la facture de l’hébergeur. Je dis « nous », car quand il y a une bêtise, c’est toujours nous, même si c’est moi qui avais promis de m’en occuper. C’est ainsi qu’on construit les couples inaltérables.

Tiens, pour que ce paragraphe serve à quelque chose et rattrape les dégâts, allez donc y faire un tour, c’est bien mieux qu’à la FIAC. Je ne m’étends pas sur le sujet, car je pondrai bientôt un billet sur la FIAC.

Revenons à nos blogs. Où est l’erreur de mes correspondants ? Dans la fleur.

Il y a effectivement une apparence de pistil jaune sur lequel viendraient brouter les abeilles (oui, brouter, elles ne vont pas toujours butiner, ça ferait cliché). Ce pistil jaune serait le petit monde des blogs littéraires : le dessin ne doit pas oublier qu’environ 90% des personnes qui fréquentent les blogs ne laissent pas de commentaires. Ceux qui commentent sont très majoritairement des blogueurs qui, s’ils sont connus, se saluent entre eux pour se sentir un peu moins seuls, ou pour laisser un lien dans l’espoir d’une visite, dans le cas de blogs qui se lancent.

Il y a donc aussi des pétales, sur ce pistil. Ce sont les trucs rose saumon que j’ai dessinés. Ces pétales, ce sont les visiteurs propres à chaque blog. Pas forcément des visiteurs exclusifs, ils peuvent fréquenter deux ou trois blogs. Ces visiteurs, on ne les voit presque jamais, sauf dans les statistiques : ils passent, ils lisent, ils s’en vont. Ils aiment leur blog, ils lui sont fidèles sans forcément être accros.

Or, ces visiteurs-pétales, c’est pour eux que le blogueur doit écrire ses billets, et non pour ses collègues, les gestionnaires d’autres blogs. L’objectif ne doit pas être de faire l’original par rapport aux collègues, mais d’être intéressant pour ses fidèles. Croyez-vous que les critiques des magazines, (Le Magazine Littéraire, par exemple, et plus précisément le numéro de novembre page 38, je lance ça au hasard) écrivent en se souciant de ce qu’ont pondu les autres magazines ? Bien sûr que non, ils les lisent à peine : ils étalent leurs idées dans leur style pour leurs lecteurs, et peu importe le reste.

Voilà, avec tout ça, j’ai répondu aux deux mails qui me turlupinaient.

>> Blogueuse du mail N°1, écris comme tu le sens. Juste pour tes visiteurs à toi (et pour moi). Dépêche-toi, l’excellence t’attend.

>> Blogueur du mail N°2, tu as raison mais tu as tort : le petit monde, c’est uniquement celui des commentateurs-blogueurs. C’est le petit bout de l’iceberg qui fait saillie dans le grand océan.

 

Quelles preuves, me direz-vous ? Eh bien, je les compte sur les salons : je dédicace beaucoup, et de nombreux visiteurs arrivent de la part de tel ou tel blog. Ils y sont inconnus, y compris sur le mien. Rares sont ceux qui me signalent qu’ils m’ont vu sur plusieurs blogs. Plus rares encore sont ceux qui ont leur propre blog.

Les boules fuschia ajoutées, ce n’est pas pour faire joli : ce sont les autres communautés que fréquentent les lecteurs de chaque pétale. Quand un blog réputé comme celui de Thomas Clément me consacre cette semaine un (joli) billet, je vois arriver des visiteurs que je n’aurais normalement jamais aperçus jusqu’ici : autres profils, autres fréquentations. Asseyez-vous, je prépare les cafés : quelles couleurs, les capsules Nespresso ? J’ai de vieilles tuiles aux mandes dans la boîte en fer, ça vous ferait plaisir ?

P.S.1. La tige et les feuilles vertes, par contre, c’était uniquement pour faire joli. Là, l’échec est total. 
P.S.2. Un ami à qui j'envoie ce billet en pré-lecture me fait remarquer que j'enfonce des portes ouvertes. Et alors ? Tu crois que ça ne fait pas plaisir des portes ouvertes qui s'ouvrent, quand on monte un placard ? Les miennes, d'habitude, elles coincent toujours.