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Sauter sur sa chaise comme un cabri en disant réformes ! réformes !

Publié le 24 avril 2008 par Nicolas007bis

Cyntia

« Bien entendu, on peut sauter sur sa chaise comme un cabri en disant réformes ! Réformes ! Réformes ! Mais cela n’aboutit à rien et cela ne signifie rien. »

Même grossièrement dévoyée, cette formule empruntée au Général de Gaulles (il voudra bien m’en excuser) est particulièrement d’actualité !

On n’a jamais autant parlé de réformes, Nicolas Sarkozy et son gouvernement n’arrêtent pas de nous rabâcher qu’ils ont commencé à réformer, qu’ils sont en train de réformer et qu’ils vont encore réformer !
Il y a , sans aucun doute, de la part de nos dirigeants, une volonté affirmée de réformer .

Du coté des dirigés que nous sommes, et si on en croit les sondages sur différents sujets, il semble qu’il existe une conscience de plus en plus partagée de la nécessité de réformer la France.
D’ailleurs n’est ce pas pour cela que Nicolas Sarkozy a été élu !

De plus, la situation économique de la France et des français ne laisse plus vraiment le choix et chaque jour apporte son lot de preuves que la France est dans une triste situation et qu’il ne faut pas compter sur des éléments extérieurs pour l’en sortir.

Pourtant, alors que les uns et les autres semblent avoir des objectifs communs, alors que les uns disent « on réforme » et les autres disent « on veut des réformes », alors qu’un consensus existe sur la nécessité d’engager des réformes, alors que Nicolas Sarkozy a été élu pour cela, alors que la situation économique de la France l’impose plus que jamais, l’ambiance est à l’insatisfaction générale !

Comment en est-on arrivé à cette situation particulièrement paradoxale avec d’un coté la moitié de la France mécontente des mesures prises par le gouvernement et de l’autre coté, l’autre moitié de la France mécontente à cause des mesures qui ne sont pas prises par le gouvernement.

Tout d’abord, reconnaissons que le mot « réforme » ne veut pas dire grand-chose ou du moins qu’il peut recouvrir tout et n’importe quoi.

Si j’en crois les dictionnaires le verbe « réformer » signifie : Transformer en vue d'améliorer; procurer une amélioration ou bien « Changer quelque chose qui est institué afin de le transformer; Organiser, modifier quelque chose (un état de fait, un système, une institution) en transformant les règles existantes afin d'améliorer ses structures, son fonctionnement. »

On peut penser que la définition : « Transformer quelque chose afin d’améliorer ses structures et son fonctionnement » soit admise par à peu près tout le monde, même si le niveau de transformation peut prêter à discussions. Par contre, être d’accord sur la définition ne suffit évidemment pas pour établir un consensus.

Non seulement parce que chacun a tendance à considérer que la réforme ne doit s’appliquer qu’aux autres mais surtout parce que, au-delà des intentions, la réforme pour être un succès suppose un contenu lisible et surtout de la méthode.

Dire qu’il faut un contenu à une réforme parait une évidence et pourtant sur les quelques exemples que nous avons, le sentiment largement partagé est que le contenu est ou faible ou peu lisible. Sur la réforme des régimes spéciaux on se demande encore si la collectivité nationale est gagnante ou non ! Sur la refonte de la carte judiciaire menée d’une main de fer par Rachida Dati, combien en France peuvent dire ce qu’elle va générer comme bénéfices financiers ? Combien sont capable de juger de l’intérêt même de cette réforme à part la vague intuition qui consiste à penser qu’une diminution du nombre de tribunaux va permettre de faire quelques économies ?

Sans préjuger de la qualité de leur contenu ou même de leur bien-fondé, il apparaît clairement que les réformes qui ont été menées n’ont pas eu l’effet psychologique attendu. Pourquoi ?

Il semble que le gouvernement n’ait pas abordé la question dans le bon sens.

Fort du soutien de la majorité des français, Nicolas Sarkozy s’est lancé pleins gaz dans la mise en œuvre d’une série de réformes sur lesquelles il avait déjà communiqué et dont il connaissait manifestement les grandes lignes.

Quoique l’on puisse en penser, ces réformes ne sont pas anodines mais pourtant elles n’ont pas été perçues comme suffisantes ou même importantes.

Ce que nos gouvernants ne semblent pas avoir compris c’est que réformer (transformer) suppose, au préalable, d’avoir expliqué pourquoi on réforme, quels sont les objectifs que l’on cherche à atteindre et en fonction de cela, quelles priorités on se donne : ne pas remplacer des enseignants qui partent à la retraite afin de favoriser un retour à l’équilibre budgétaire ou diminuer le nombre d’élèves par classe, consolider notre défense nationale en construisant un second porte-avions ou économiser 4 milliards d’euros, supprimer des tribunaux pour diminuer les charges de fonctionnement du Ministère de la Justice ou favoriser la Justice de « proximité », supprimer des bases militaires ou ne pas pénaliser l’économie de certaines régions etc etc.

En clair et avant toute chose, il est nécessaire de faire un effort important de pédagogie afin d’expliquer et de justifier ces choix fondamentaux.

Tout cela doit commencer par un constat et un diagnostique clairement exprimé pour aboutir à un ensemble de solutions justifiées et priorisées. Ne pas avoir de langage clair sur l’état de nos finances publiques, sur les contraintes auxquelles nous sommes soumis du fait de notre appartenance à la communauté européenne, sur la fragilité de notre système de retraites ou sur les défaillances de notre système éducatif à un double effet.

D’une part, les réformes qui sont par essence perturbantes, ont de fortes chances de ne pas être acceptés par ceux qui sont directement concernés et d’autre part, elles ne pourront pas être considérées à leur juste valeur par les tous les autres.
Le meilleur exemple en la matière est bien la réforme des universités sur laquelle on a dit tout et n’importe quoi. Faute d’un réel effort d’explications, d’un diagnostic précis et de l’affirmation d’objectifs clairement affirmés, ceux qui étaient directement concernés l’ont rejetée d’entrée sur la base d’une interprétation souvent erronée et le reste de la population , faute d’informations accessibles, n’a pas pu en appréhender l’importance ou même l’intérêt.

Autre exemple, la réforme relative à la « modernisation du marché du travail » résultat d’un relatif consensus (seule la CGT n’a pas signée), qui même si elle peut apparaitre comme modeste pour certains, n’en a pas moins l’intérêt d’être une première étape vers un modèle de « flexisécurité » ; Pourtant qui en connait la teneur et les effets attendus ? Quand nous en a t’on expliqué les tenants et les aboutissants ? Faut-il s’étonner ensuite que cette réelle avancée ne soit pas portée au crédit du gouvernement !

D’une manière générale, jamais Nicolas Sarkozy ou son premier ministre n’ont fait l’effort de présenter et commenter solennellement l’état de la France. Jamais ils ne nous ont clairement expliqué qu’il ne nous était plus possible de continuer sur notre train de vie actuel à dépenser plus que ce que nous gagnons ! Jamais il ne nous a été dit que nous aurions à faire des choix qui pourraient être douloureux sur le court terme mais qui doivent contribuer à améliorer notre situation dans les 3 ou 5 à venir !

On ne justifie pas une politique en balançant au détour d’un discours en Corse que la France est en situation de « faillite » ou dans un coin d’une conférence de presse que « les caisses sont vides » et encore moins en annonçant "la rigueur, ça ne marche pas" !

Certes ces propos doivent nous alerter sur la gravité de la situation, de même que le récent aveu d’Hervé Morin annonçant que faute de sous dans les caisses, il n’y aurait probablement pas de deuxième porte-avion (alors que son intérêt apparait clairement lorsqu’on sait que chaque maintenance de notre « Charles de Gaulles » l’immobilise 6 mois), mais en aucun cas ils ne peuvent se substituer à un discours fondateur qui expliquerait de façon solennelle mais compréhensible les tenants et aboutissants de la politique que veut mener Nicolas Sarkozy et son gouvernement.

Faute d’un tel préalable, faute d’avoir défini des priorités et faute d’expliquer les objectifs de chaque réforme et son intérêt pour la collectivité nationale, comment s’étonner des réactions des étudiants hier, des lycéens aujourd’hui ! Comment s’étonner du rejet des uns et de l’indifférence des autres ?

Cette absence de méthode et de pédagogie ainsi que quelques annonces manifestement peu préparées sinon peu réfléchies, ne peuvent que laisser une (fausse ?) mauvaise impression d’incohérence et d’improvisation tout à fait dommageable en ces temps difficiles ou plus que jamais un consensus est nécessaire pour réformer la France.

Si on doit reprocher quelque chose à Nicolas Sarkozy, c’est bien d’avoir passé plus de temps à sauter sur sa chaise comme un cabri en disant « réformes ! réformes !» qu’à élaborer et expliquer sa méthode de la réforme. Il a ainsi dilapidé le capital confiance dont il disposait auprès des français et d’une certaine manière cassé l’élan réformateur qu’il incarnait alors que beaucoup reste à faire et pas le plus simple !

Espérons qu’il ne soit pas trop tard pour changer !


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