Vu et lu sur le Blog de Marie, ce billet datant du 15 février 2007
Je vous écris de Bulgarie. Je voudrais vous parler de la tragédie qui s’est abattue sur 5 infirmières bulgares et un médecin palestinien le 9 février 1999, accusés d’assassinat prémédité "pour avoir provoqué" une épidémie par injection de produits contaminés par le Sida à 393 enfants libyens.
La Bulgarie toute entière vit jour après jour depuis huit ans la tragédie de ses infirmières. A l’heure actuelle ce cas est suffisamment connu en Europe, une Europe qui fait tout son possible pour venir en aide à ces innocentes.
En 1998, à Benghazi, Libye, des enfants sont trouvés porteurs du virus du Sida. Le 9 février 1999, la police arrête, sans mandat, de nombreux professionnels de la santé, travaillant en Libye. La majorité des détenus (beaucoup de Libyens) sera ensuite relâchée, à l'exception de cinq infirmières bulgares, un médecin bulgare et un médecin palestinien. Les autorités les accusent d'avoir sciemment transmis le virus du Sida à 426 des enfants à l'hôpital où ils travaillaient comme coopérants. Le médecin bulgare sera libéré 4 ans plus tard.
Des experts scientifiques de renom, tel le professeur Luc Montagnier, découvreur du virus du SIDA, qui a témoigné devant le tribunal libyen, ont exclu la possibilité de contamination délibérée, compte tenu des circonstances de fait : certains enfants ont été contaminés avant même que les accusés ne commencent à exercer à l'hôpital. Un grand nombre d'enfants n'ont jamais été soignés au sein des services dans lesquels les accusés ont travaillé. Me Othmane al-Bizanti a rappelé que la maladie avait auparavant été diagnostiquée chez trois infirmières de l'hôpital, dont une libyenne et une pakistanaise.
S'appuyant sur des déclarations d'experts internationaux, dont le co-découvreur du virus du Sida, le professeur français Luc Montagnier, la défense soutient que l'épidémie était due aux mauvaises conditions d'hygiène. L'association des enfants libyens infectés du virus du SIDA a fait savoir qu'elle porte plainte contre le professeur Luc Montagnier et contre l’expert italien Colizzi au sujet des conclusions de leur expertise sur l’épidémie.
06 décembre 2006. D'après une expertise publiée dans la revue scientifique britannique Nature, réalisée sur l'analyse d'échantillons prélevés sur 44 enfants infectés, il a pu être déterminé que les infections avaient commencé au sein de l'hôpital bien avant l'arrivée des infirmières et du médecin en mars 1998.
Je voudrais parler plutôt du dessous de ce procès qui ne mérite même pas d’être qualifié de procès de justice. Ce qui s’est passé depuis huit ans, c’est une immense histoire de marchand de tapis avec tout l’art qui en découle. Il s’agit d’un marchandage ignoble imposé par le chef de l’état libyen -Mouammar Kadhafi.
Que cachent cette farce juridique et cette prise d’otages ?
1. Pas un seul instant les autorités libyennes n’ont cherché la vérité et la responsabilité des autorités libyennes dans la tragédie du sang contaminé, étant donné que les enfants ont été contaminés avant l’arrivée des infirmières bulgares.
Les accusés sont les boucs émissaires du manque d'hygiène dans l'hôpital et du manque de produits de première nécessité, conséquences des défaillances du système hospitalier libyen.
Kadhafi est infaillible, n’est-ce pas ?
2. En se moquant de la tragédie réelle des familles libyennes, les autorités veulent uniquement extorquer à la Bulgarie une somme monstrueuse d’indemnités de 7 milliards de dollars pour les familles des enfants contaminés.
Cette même somme correspond parfaitement à la condamnation des terroristes qui ont fait exploser l’avion du vol Pan Am 103, le 21 décembre 1988 à Lockerbie en Ecosse, et qui coûta la vie à 259 passagers et 11 personnes sur terre. La Libye est condamnée à payer la même somme comme indemnités aux familles des victimes et à la compagnie aérienne. Vu que des milliers de spécialistes bulgares travaillent en Libye, le plus facile était de prendre en otage des ressortissants de la Bulgarie.
3. Un autre point de marchandage ignoble - la Libye exige le retour dans son pays du terroriste libyen Abdel Bassot Al-Magrahi responsable du drame de Lockerbie et qui est condamné à perpétuité.
Chaque fois la Libye cherche à tirer des profits sans jamais se mettre en cause.
A l’heure actuelle la Bulgarie a commencé un procès contre les officiers libyens qui ont eu recours à la torture moyenâgeuse pour tirer des aveux des infirmières. Un seul élément moderne – l’utilisation de l’électricité là où il ne fallait surtout pas l’utiliser. La Libye a immédiatement ouvert un contre-procès contre les infirmières pour calomnie. De ces faits, aujourd’hui, les infirmières ne sont plus autorisées à avoir même les visites de leurs avocats. Elles sont terriblement fragilisées et souffrent énormément depuis 8 ans. Le 19 décembre 2006 le tribunal libyen a prononcé le verdict définitif – condamnation à mort.
Nous les Bulgares, nous sommes très sensibles à l’aide apporté à nos infirmières par Avocats sans Frontières, Médecin sans Frontières, et l’Union européenne pour leur précieux soutien, qui permet de nous sentir moins seuls dans cette tâche impossible – avoir une véritable justice. La France apporte une aide inestimable aux enfants contaminés, en leur prodiguant des soins médicaux spécialisés à la place des autorités libyennes qui profite,t du malheur des familles à des fins politiques et économiques.
Le 2 février 2007, le Premier Ministre français, M. de Villepin, en visite officielle en Bulgarie, à exprimé la position de la France qui est pour l’acquittement des infirmières bulgares innocentes et du médecin palestinien.
Dans des cas pareils nous nous rendons compte quel privilège c’est de vivre dans une région géopolitique où le mot justice a un sens réel.
Nous espérons voir bientôt nos infirmières parmi nous.