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"Perdant-perdant" ou Sarkozy l'ami des banquiers ?

Publié le 27 octobre 2008 par Pguillery

Je suis rarement d'accord avec Alternatives Économiques. Pourtant, là, ils ont raison sur Marianne2 à propos de ce qui ressemble à un jeu de dupes. Ou plutôt, prenons du recul pour dire que la comparaison exprimée entre ce qu'a fait Brown et que ce qu'a fait Sarkozy est implacable et donne à penser :

"Contrairement au gouvernement anglais, l'État français a apporté [une première tranche de 10,5 milliards d'euros] aux banques sans revendiquer aucun droit de regard sur leur fonctionnement via une présence au capital et dans les conseils d'administration. Il ne leur a pas non plus imposé de conditions strictes en matières de dividendes, de bonus ou encore de distribution de crédit. Il fallait évidemment voler au secours des banques afin de limiter le risque d'un credit crunch catastrophique pour l'économie réelle, mais on était en droit d'exiger d'elles des contreparties sérieuses. Sur ce plan, Gordon Brown, qui n'est pas réputé pourtant pour son hostilité foncière à l'égard des acteurs financiers, s'est montré nettement plus regardant que Nicolas Sakozy et son gouvernement."

Benalors

Le banques française qui ne s'engagent... à rien
Par Guillaume Duval, rédacteur en chef d'« Alternatives économiques », qui estime que le plan de sauvetage britannique a été beaucoup plus exigeant à l'égard des banques que son équivalent français.

     Lors du sommet de la Zone Euro du 12 octobre dernier, les chefs d'Etat et de gouvernement se sont mis d'accord pour présenter de façon coordonnée des plans nationaux de sauvetage des banques inspirés de celui présenté auparavant par Gordon Brown au Royaume uni. Tous ces plans suivent donc les mêmes principes : recapitalisation des banques et garantie publique du crédit interbancaire. Ils diffèrent cependant significativement dans le détail de leur mise en œuvre et ces différences sont instructives. Quand on compare notamment le plan britannique, qui a servi de modèle, et son équivalent français, on se rend compte que le gouvernement de Sa Majesté s'est montré nettement plus exigeant vis-à-vis des banquiers britanniques que le gouvernement français dont les aides n'impliquent guère de contrepartie significative.
             
       « Titres subordonnés »       
Au Royaume uni, le gouvernement a décidé d'injecter 50 milliards de livres, soit 63 milliards d'euros, dans le capital des banques anglaises, sous la forme de 25 milliards de livres d'actions et 25 milliards de livres de titres dits subordonnés (voir ici ). Qu'est-ce qu'un « titre subordonné » ? C'est un titre financier qui fait partie des capitaux propres d'une entreprise, c'est-à-dire qu'il comporte les mêmes risques financiers que les actions : si l'entreprise fait faillite, il perd toute valeur et celui qui le détient n'a aucun droit sur la vente des biens restants de la société. Par contre, contrairement aux actions, il ne donne pas de droit de vote à l'assemblée générale des actionnaires ni aucun droit de regard sur la marche de l'entreprise. Il est rémunéré sous la forme d'un taux d'intérêt supérieur à celui auquel on rémunère normalement le crédit, compte tenu des risques supplémentaires pris sur le plan financier. En contrepartie de cette recapitalisation, le gouvernement britannique a imposé aux banques des conditions très strictes : maintien de la distribution des crédits aux particuliers et aux PME au niveau de 2007 ; aucun bonus en 2008 pour les dirigeants des banques et redéfinition de toutes les politiques de bonus ; aucun dividende pour les actionnaires normaux tant que l'État sera au capital ; présence de représentants de l'État dans les conseils d'administration.     
           
Plan de sauvetage : les banques françaises s'engagent à… rien
                En France, le gouvernement a lui aussi décidé de recapitaliser les banques à hauteur de 40 milliards d'euros (voir ici ). Une première tranche de 10,5 milliards d'euros a été mise en oeuvre le 20 octobre dernier, mais uniquement sous la forme de titres subordonnés. Ce qui signifie que, contrairement au gouvernement anglais, l'État français a apporté cette somme aux banques sans revendiquer aucun droit de regard sur leur fonctionnement via une présence au capital et dans les conseils d'administration. Il ne leur a pas non plus imposé de conditions strictes en matières de dividendes, de bonus ou encore de distribution de crédit. Déjà, le 30 septembre dernier, il avait accepté de sauver Dexia tout en restant un actionnaire minoritaire alors que les 6,4 milliards de capital apportés (dont 3 par l'État français) aurait dû logiquement se traduire par une expropriation des actionnaires existants et une prise de contrôle majoritaire de la société. Dans le cadre du plan de sauvetage de 360 milliards d'euros annoncé le 13 octobre, le gouvernement français a également confié aux banques les clefs de la société créée pour gérer les 320 milliards de crédits qu'il s'est engagé à leur apporter, en leur accordant généreusement deux tiers du capital de cette entité bien que les crédits en question soient financés uniquement par l'État… La seule contrepartie précise qui ait été demandée jusqu'ici aux banques françaises en échange de ce plan de sauvetage a été de souscrire au code de conduite proposé par le Medef et l'Association française des entreprises privées (AFEP) le 6 octobre dernier, qui est sensé limiter les excès en matière de « parachutes dorés » et de « retraites chapeaux » (voir ici )… En l'absence de contrainte législative et fiscale, il y a peu de chances pourtant que ce code se révèle plus efficace pour limiter les excès en matière de rémunération des dirigeants que ses multiples prédécesseurs du même genre: rapport Viénot 1 en 1995, Viénot 2 en 1999, Bouton en 2002, premier code de conduite du Medef et de l'Afep de 2003, recommandation des mêmes organisations en 2007...
             
       Credit Crunch       
       Bref, il fallait évidemment voler au secours des banques afin de limiter le risque d'un credit crunch catastrophique pour l'économie réelle, mais on était en droit d'exiger d'elles des contreparties sérieuses. Sur ce plan, Gordon Brown, qui n'est pas réputé pourtant pour son hostilité foncière à l'égard des acteurs financiers, s'est montré nettement plus regardant que Nicolas Sakozy et son gouvernement. Les banques britanniques étaient certes, du fait de la crise immobilière qui sévit Outre-manche, dans une situation plus difficile que les banques françaises, et donc obligées d'accepter des conditions draconiennes. Mais si les banques françaises ne sont pas réellement dans le besoin, faut-il leur apporter quand même autant de capitaux sans contreparties, alors que le gouvernement manque tellement de moyens pour soutenir l' « économie réelle » face à la grave récession qui menace ?
(c) Marianne2, G.Duval
             
       Pour accéder au site d'Alternatives économiques, cliquez ici.
         

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