Mesrine est un personnage avec lequel j’entretiens un rapport particulier. Au moment où il s’est fait abattre, j’étais encore petit, en voiture avec ma mère, et nous étions à quelques centaines de mètres de la fusillade. La rumeur de sa mort s’était répandue comme une trainée de poudre et avait un peu foutu les chocottes à ma mère. Ayant grandi, je me suis toujours dit que vu sa vie, il manquait encore LE film définitif sur sa vie, film que j’aurai aimé réaliser. Jean Francois Richet s’en est chargé bien avant que j’arrive peut-être un jour à réaliser mon rêve. Et au vu du résultat, pas la peine de passer derrière lui…
L’instinct de mort – Quand le cinéma français perd ses complexes
Jacques Mesrine, jeune soldat, revient d’Algérie. Rejetant un boulot minable que lui a trouvé son père, Jacques renoue avec Paulo un de ses amis d’enfance. Celui-ci va lui faire rencontrer Guido, un ancien de l’OAS qui va lui proposer quelques boulots illégaux pour s’enrichir rapidement. Mais très vite, Mesrine se veut plus ambitieux et commence à rêver de gloire…
Jacques Mesrine est un personnage extrêmement complexe : voyou, homme à femmes, flambeur, intelligent, gouailleur, dangereux, et surtout animal médiatique super charismatique. Beaucoup de facettes pour un personnage qui nécessite deux films pour bien être disséqué. Il faut dire que l’homme a eu une vie qui relève du feuilleton tellement elle est riche en rebondissement et en coups d’éclats (évasions multiples, braquages, kidnapping, meurtres et rapports complexes avec les journalistes, passages américains et canadiens). Jean-François Richet, revenu de son expérience américaine (le remake de Assault de Carpenter) prend le sujet à bras le corps et livre un film aussi ambitieux qu’efficace.
Trop souvent dans le cinéma français, on est complexé par le manque de moyen. Le côté franchouillard exacerbé de certaines productions les empêche de sortir du médiocre. Ici, heureusement il n’en est rien. Budgettés à 45 millions d’euros, les films en mettent plein la vue et sont dignes des meilleurs films de gangster américains. Ils ont en plus l’intelligence de ne pas décrire Mesrine comme un héros mais comme un mélange étrange entre voyou de la pire espèce et star médiatique.
Pour incarner le rôle titre, Richet s’appuie sur Vincent Cassel. J’ai beau détester l’acteur, il faut bien avouer que passé la première demi heure il bouffe l’écran. Restent quelques tics de jeu dont il a parfois du mal à se départir, mais globalement le résultat est là, et franchement satisfaisant. Mais Richet a également l’intelligence de poser des seconds rôles puissants. Que ce soit Depardieu (son meilleur rôle depuis des années) pour incarner Guido, Cécile de France en femme prête à tout, Gilles Lellouche en ami d’enfance. La grosse baffe vient pourtant d’un acteur canadien que je ne connaissais pas : Roy Dupuis.
Dans le rôle de Jean-Paul Mercier, comparse de Mesrine lors de ses quelques années au Canada avec qui il a purgé quelques années de prison suite à un kidnapping raté, il arrive à voler la vedette à Vincent Cassel. Roy est ultra charismatique et semble actuellement tenter une parenthèse française dans sa carrière. Tant mieux ! On devrait vite reparler de lui (enfin j’espère).
Il est rare qu’un film de deux heures passe tout seul, sans que l’on ressente de longueur et arrive encore à faire haleter un spectateur aguerri comme moi. Et pourtant… Le fait de savoir que les situations racontées ont vraiment eu lieu augment l’efficacité de certaines séquences. La scène d’évasion puis de tentative de libérer des camarades restés enfermés est par exemple un modèle d’efficacité et de rythme, et un vrai bonheur à regarder… Qand on pense que la première partie de la vie de Mesrine est à mes yeux moins intéressante que la deuxième, je n’ose même pas imaginer le niveau du second film. Le premier est le meilleur film français de l’année. Vivement le second dans trois semaines !
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