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Pessoa dans le texte

Publié le 25 octobre 2008 par Perce-Neige
Naturellement, et le piège m’avait semblé grossier venant de Matignon, mon contact à Lisbonne se trouvait être - et je ne l’ai su que deux heures plus tard, malheureusement - une jeune femme terriblement séduisante. Accessoirement, Pedro, dans le taxi, m’avait confié qu’elle s'était taillée une belle réputation dans le milieu de l’édition. « Elle est maintenant à la tête d’une grosse entreprise… » m’avait-il raconté « Leur meilleur coup étant d’être parvenus à rééditer Pessoa d’a-près les manuscrits o-ri-gi-naux, ouais, mon vieux ! » Je n’avais pas relevé, occupé que j’étais, alors, à purger la mémoire de mon téléphone de sms franchement inopportuns. « Ah oui ? » ai-je dit, simplement. « Tout à fait. Parfaitement exact, Georges. Je confirme ce que vous a rapporté votre ami… Il s’agit d’une reproduction in-té-grale des manuscrits de Pessoa. D’ailleurs c’est un projet éditorial qui dépasse de beaucoup notre poète national, pour autant que l’on puisse qualifier Pessoa de poète… Le monde, voyez-vous, recherche de plus en plus l’authenticité. Et c’est ce qui me pousse à vouloir, de plus en plus également, porter à la connaissance d’un large public les manuscrits des écrivains, dans leur intégralité, et non plus des ouvrages finis, bien léchés, mais, parfois, complètement inodores comme vous pouvez en acheter au supermarché du coin. Il y a un é-nor-me potentiel derrière tout cela, croyez moi… » m’avait-elle précisé, mi en portugais, mi en français, mi en anglais, mi en souriant. Un mélange de poésie et d’enluminure se lisait alors sur son visage. Elle parlait si lentement. Et fumait de longues cigarettes qu’elle arborait de manière fantasque, mettant, à tout propos, le bras sur l’épaule de Pedro. Je devinais qu’elle était un peu ivre. Et de plus en plus. N’ayant d’yeux, pour ma part, que pour ses ongles vernis, et aussi pour son décolleté extravagant (je n’avais jamais rien vu de pareil), la manière indélicate qu’elle avait de balancer la tête, de prononcer mon nom en français, d’essayer de dire les choses… Et puis, tout à trac, la conversation avait glissé sur son mari (un chirurgien vasculaire de quarante cinq ans qui travaillait à l’hôpital des sœurs franciscaines), et sur ses trois enfants, sur les heures passées à les aider dans leur scolarité. Et tout cela paraissait si loin, soudain ! Je veux dire : si loin de Jade, si loin de nous

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