Dati, bras armé de Sarkozy, fait l'unanimité contre elle

Publié le 23 octobre 2008 par Torapamavoa Torapamavoa Nicolas @torapamavoa
Forte mobilisation des professions judiciaires contre la politique Dati
il y a 27 mins
AFP
Les magistrats, soutenus par l'ensemble des professions judiciaires, se sont fortement mobilisés jeudi, dans toute la France, pour dire leur refus de la politique "tout sécuritaire" de la garde des Sceaux Rachida Dati, également accusée d'attenter à leur "indépendance".

A Paris, Lyon, Dijon, Toulouse, Lille, Nantes, Rennes, Marseille, Grenoble ou Metz... dans tous les tribunaux, les juges ont fait entendre leur mécontentement : rassemblement sur les marches, lecture de motions avant l'ouverture des débats, retard, voire renvoi d'audiences comme à Albi.
Dans une rare unanimité, les avocats, mais aussi les représentants des éducateurs judiciaires, des surveillants de prison ou des greffiers avaient apporté leur soutien à cette journée.
A l'appel des trois principaux syndicats, l'Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire), le Syndicat de la magistrature (SM, gauche) et FO-magistrats, le mouvement a été dirigé autant contre la politique que l'attitude de la garde des Sceaux.
Rachida Dati "fragilise, par de constantes pressions, l'autorité judiciaire, dont l'indépendance est l'un des pivots de la démocratie", dénonçait la motion commune, l'accusant d'avoir une "attitude irresponsable" avec "la recherche systématique de boucs émissaires".
La colère des juges a été attisée ces dernières semaines par plusieurs initiatives de la garde des Sceaux, comme la convocation de procureurs pour leurs statistiques jugées décevantes sur les peines plancher, ou l'audition en pleine nuit à Metz de magistrats à propos du suicide d'un mineur en prison.
Pour Christophe Régnard, président de l'USM, Rachida Dati affiche "un bilan très négatif, le plus mauvais de tous les gardes des Sceaux depuis très longtemps".
A Paris, une délégation a été reçue par le Premier président de la Cour de cassation, Vincent Lamanda, et le procureur général de cette instance, Jean-Louis Nadal. Ils ont promis de se faire "les relais" des inquiétudes des juges auprès du président Sarkozy, également président du Conseil supérieur de la magistrature (CSM).
En même temps, cette autorité suprême de la profession décidait d'enquêter sur l'éventualité de "pressions qui porteraient atteinte à l'indépendance de la justice", lors des auditions des magistrats après le suicide d'un adolescent le 6 octobre à la prison de Metz-Queuleu.
De quoi répondre aux attentes des magistrats de Créteil qui ont demandé au CSM de "prendre enfin une position face aux attaques répétées de la garde des Sceaux".
"Jamais aucun ministre n'avait réussi à cristalliser un tel mécontentement", lançait Clarisse Taron, déléguée SM et vice-procureur à la cour d'appel de Metz, tandis qu'à Lyon, le président du TGI Pierre Garbit assurait que les magistrats se sentaient "traités comme des boucs émissaires".
"Désormais notre seule chance de rencontrer notre ministre, c'est lors de convocations dans un cadre disciplinaire", ironisait Virginie Valton, vice-présidente à Arras.
A Lille, les magistrats ont reçu le soutien de la maire socialiste Martine Aubry qui a dénoncé "la mise en accusation permanente des juges".
Rachida Dati devait recevoir vendredi soir l'USM et le SM au sujet de ce qu'elle a qualifié mercredi "d'états d'âme" des juges.
L'UMP a apporté son soutien à la Garde des Sceaux, par la voix de ses deux porte-parole Chantal Brunel et Frédéric Lefebvre, se déclarant "choquée par les attaques virulentes et blessantes" dont elle fait l'objet et dénonçant "l'acharnement" des magistrats.
"Que certains syndicats de magistrats aient des revendications sur le fonctionnement de la justice ne légitiment pas pour autant la campagne de dénigrement dont Rachida Dati fait l'objet, notamment concernant les drames récents dans les prisons, qui sont pour elle des déchirures", estime Mme Brunel.
"Si les magistrats avaient, d'eux même, fait preuve de fermeté dans la condamnation des multirécidivistes, le gouvernement n'aurait pas eu à faire voter les peines planchers", renchérit M. Lefebvre.