FRAGMENTS.
elle y est, celle que tu aimes, dans le temps, temps dont tu ne peux défaire les
manifestes, temps dont les lianes s'immiscent dans tes viscères et tes limbes,
dont les lianes frelatent ton sang, elle y est, celle que tu aimes, dans le temps,
dans ton temps, temps qu'elle exerce à sa convenance, qu'elle raccourcit ou
distend à volonté, tu es ainsi son pantin désarticulé, son jouet rompu, elle y est,
celle que tu aimes, dans le temps, dans ton temps, ce temps qu'elle possède et
elle t'engage à demeurer à sa commissure, emmêle et prosterne dans une même
soie l'entre-deux de tous tes éphémères.
et ainsi tu aimes la divinité ténébreuse, celle qui t'affranchira des aléas du doute
et de la tragédie mais ce n'est qu'un être, une spendeur il est vrai mais ancré
dans un temps, dans un corps, assiégé par les limites du précaire, ainsi tu
confonds le désir de l'absolu avec le désir de l'autre, elle ne sera jamais lieu de
réconciliation, elle ne sera qu'une étreinte qui hasardera, ici et là, le bonheur et
tu demeureras donc toujours ainsi, tu seras de la nostalgie, à la recherche
toujours, insatisfait toujours, déçu toujours, au seuil d'un désir, virulent et cruel,
qui semble donner sur le sens mais qui n'est, au fond, qu'une apparence, une
apparence triste et sublime
PLUS SIMPLE
Il se dit, parfois, qu'il est plus simple de ne pas avoir à s'exercer à l'existence, de ne pas avoir à se réveiller, marcher, penser, être, de ne pas avoir à délibérer le désir, ce désir
qui l'accaparera jusqu'aux dernières instances de la nuit, de ne pas avoir à épier celle qu'il aime, de ne pas avoir à se soucier de son corps, de ce qu'elle est, de ce qu'elle fait, de ce qu'elle
dit et ne dit pas, de ne pas avoir à convoiter un inaccessible qui ne cesse les métamorphoses, il n'en veut plus, de ce désir, contraire et violent, nécessaire et puéril, il n'en veut plus, il ne
souhaite pas la mort, ni le néant mais une absence qui y ressemble, qui s'en rapproche, il n'en veut plus, de la pesanteur de sa conscience, de la tutelle de l'obsession, il n'en veut plus et il
aimerait être une bête, épuisée par l'instinct, vite rassasiée, un étranger aux affres du choix et de la liberté et il veut ainsi mêler son désir aux lueurs de la mort, mourir un peu tous les jours
pour exténuer sa conscience, pour cesser d'aimer, pour cesser de l'aimer.
Il se dit, parfois, qu'il est plus simple de ne pas avoir à s'exercer à l'existence.
Umar.