Magazine Cinéma
La banda del trucido
1977
Stelvio Massi
Avec : Tomas Milian, Luc Merenda
On reprend Tomas Milian et sa perruque afro, et c’est reparti ! Monnezza s’est plus ou moins rangé en ouvrant un restaurant, mais Rome ne s’est pas arrangé : six flics tués en un mois. Eteignez les lumières, carrez vous dans votre vieux canapé, mettez le film en version italienne, et laissez vous bercer. La musique Lalo-Morriconienne est la même que dans Le Clan des Pourris, quand elle s’arrête, ce n’est pas grave, la musicalité de la langue italienne prend le relais. Pour un peu, on aurait envie de couper les sous-titres. Tant pis si on ne comprend pas l’intrigue, le mystère s’épaissit par la beauté de cette langue chantante et on se laisse enivrer par les séquences d’action qui s’enchaînent sans répit : une prise d’otage, des morts que l’on entoure de craie, une course poursuite nocturne et une baston à la queue de billard, un braquage qui tourne très mal et un flic qui saute de bus en bus, le même flic menotté qui se bat à coups de pieds pour défendre sa belle en train de se faire tentativedevioliser… pour faire simple, ça carbure sec. Mais moins tout de même que dans le Clan des pourris. Car, si dans le clan des pourris, le personnage de Monnezza (Tomas Milian) était assez rare tout en étant partie prenante de l’intrigue, ici il monopolise notre attention en faisant le pitre pendant de longs monologues. Peut-être avons-nous beaucoup perdu dans la traduction française qui se permet parfois d’utiliser un argot récent (« j’ai du taf pour toi ») pour un film de 1977, mais en tout cas ces monologues pour un spectateur français moyen des années 2000 sont plutôt pénibles et nous détournent de ce qui nous intéresse : l’action. De même, la dureté, l’âpreté de la violence est ici atténuée par les moments de comédie centrés sur les sbires de Monnezza qui apprennent leur métier de voleur. Dommage, d’autant que l’intrigue principale est également moins passionnante que celle du clan des pourris, et qu’au moment où Monnezza se décide enfin à entrer dans le jeu, on arrive à la fin du film.
Malgré ces réserves, l’imagerie habituelle fait toujours plaisir à voir : les hangars et entrepôts paumés, les parkings sombres, les rades collants et les tronches taciturnes des recéleurs, les piles de pont envahies par les herbes folles dans une banlieue abandonnée à jamais par la prospérité, les petites bagnoles qui turbinent à plein régime sous le feu nourri des pires rapaces, la mâchoire carrée de l’inspecteur (Luc Merenda, le petit frenchy exilé en Italie) et les acrobaties sur les toits, les rendez-vous téléphoniques pour des « boulots » et les gueules des seconds couteaux, tout un programme ad hoc pour se vider totalement le cerveau un soir de pluie sans qu’aucun annonceur ne puisse vous en emprunter un bout pour vous vendre sa camelote, puisque vous regardez ce film sur un splendide DVD Neo Publishing de toute beauté, simple et efficace dans son boîtier slim, petit objet que l’on aime à posséder chez soi et qui me fait penser que la dématérialisation n’est pas encore tout à fait pour aujourd’hui.