En corrigeant les dessins de mes étudiants, que je force chaque mardi pendant quatre longues heures à disséquer des animaux pour en comprendre la “biologie morpho-fonctionelle”, en même temps que je travaillais sur mon modèle, je me suis fait la réflexion que les deux activités — modélisation et dessin — avaient beaucoup en commun.
Je me souviens de mes dessins d’étudiant, et à l’époque, j’avais tendance à me concentrer sur “l’allure générale” plutôt que sur les détails, parce que les détails pouvaient varier, me semblait-il, d’un individu à l’autre. Et que j’étais — et suis toujours — une feignasse, mais ceci est une autre histoire.
J’ai donc très vite ressenti le trade-off entre tout représenter (i.e. tout ce qui doit être véhiculé par le dessin) et tout représenter (i.e. tout ce qu’on observe — ce qui correspond, finalement, à de la photo).
Une des étudiantes dont je parlais au début de ce billet m’a rendu un dessin qui m’a impressionné, parce qu’il était d’une “fidélité” vis-à-vis de l’original (une truite arc-en-ciel, Onchorhynchus mykiss) saisissante.
Du coup, je me vois forcer de commencer mon speech de la semaine prochaine par une mise au point sur le compromis entre représenter ‘une observation’ (au sens anecdotique) et ‘une observation’ (au sens “canonique”). Et ça me renvoie à la diapo du cours d’introduction à l’épidémiologie quantitative que j’avais suivi l’année dernière : comment dessiner un éléphant?
Si on veut représenter un individu qui se déplace dans un paysage, pour suivre sa migration, un point suffit. Si on veut symboliser un gros animal, un gros cube / rectangle suffit.
Si on veut insister sur le fait qu’on est en présence d’un tétrapode, il suffit d’ajouter quatre pattes. Si l’élément important est de représenter un éléphant symboliquement parlant, l’ajout de la trompe et des oreilles devrait résoudre le problème.
Ensuite, si c’est une particularité de l’individu qui nous intéresse, il faudra entrer plus loin dans le détail. Pour un dessin d’observation d’anatomie interne, il me semble que dessiner la forme, la place respective, et les connexions entre organes — éventuellement leur texture, si elle est caractéristique — est suffisant.
Tout ça pour dire que je retrouve la problématique que j’affronte au quotidien en ce moment - et qui explique une bonne partie de l’inactivité de ce blog — en modélisation : quels sont les paramètres importants? Que représenter, et quel est le rapport entre ce qu’on représente et la “réalité”?
J’essaierai de revenir plus largement sur ce thème dès que j’aurais un peu de temps libre…
Et s’il faut encore parler de réflexion, que dire de celle-là?