Un palais, une manufacture de tabac fermée depuis 6 mois mais encore imprégnée de l'odeur, une forteresse au passé difficile, une ancienne usine d'aluminium posent tous la question de "que vont devenir ces lieux, maintenant ?" Dans cette région mouvementée, puisqu'elle appartenait d'abord à l'Allemagne et puis fut annexée par Mussolini pour en faire une région modèle de l'industrie italienne, c'est en tout cas la première fois que ces lieux accueillent de l'art contemporain. Le pari était risqué car vu la "force de caractère" de chacun d'entre eux, ils auraient pu aussi écraser leur contenu. On sent que le choix de cette région pour accueillir cette étdition de la Biennale est essentiellement politique. L'art doit il d'abord servir cette fonction ? Si la volonté de résister à un art essentielement marchand est louable, doit on finalement penser l'art uniquement comme un phènomène social car dans les 2 cas politique ou marchand, c'est le groupe qui prévaut. Ne pourrait on pas aussi considérer, comme déjà au temps de Léonard de Vinci, ou plus proche de nous Tony Smith ou Bruce Nauman, que l'homme reste la mesure de toute chose et que pour justement toucher à l'universel il faut d'abord nouer un rapport à l'intime. Et que parfois ce qui manque dans ces grandes messes, vu leur taille et le niveau intense de stimulation qu'elles engendrent, c'est d'experimenter de manière concentrée ce rapport au temps et à l'espace. Ce n'est pas le cas ici pour la forteresse et l'usine d'aluminium où justement ce passage de l'intime à l'universel s'opère subtilement.
Dans le cas de la Forteresse Franzenfeste (cf ploto supra) construite en 1830, c'est un projet collaboratif, "Scénarios" qui se concentre sur le son et la vibration. 10 écrivains onté été invités à écrire des textes sur l'éde la forteresse, son labyrinthe de mémoire, ses bruits de guerre, son or nazi. Ces textes ou ces sons ont été lu ou joué en 3 langues (italien, allemand, anglais) par des poétes, des acteurs et sont situés dans des situations bien particulières. Ainsi on peut passer complétement à côté, ou alors marcher sur les haut parleur recouverts par le sable du sol d'une immense salle, et éprouver la vibration en écoutant le poème ( " Aquatic Invasion" de Thomas Meinecke" 2008; ou encore s'asseoir sur les chaises "collages " à 3 pieds de Martino Gamper qui pour certaines se mettent aussi à vous parler quand on s'assoit dessus;
ou encore regarder des films résolument muets, notamment celui boulversant et destabilisant d'Harun Farocki "Respite" 2007 sur la façon de filmer la déportation et les limites du reportage, ou jer devant le drôle de diaporama questions/réponses de Michael Snow "So is this" 1982.
Et ces voix ou ces silences en plus de leur charges poétiques, placées dans cet endroit immense vide et sublime, renvoyant curieusement à un univers assez monacal, nous parlent d'abord pour ensuite nous mettre en raisonnance avec une humanité plus vaste.