Lorsque je disais qu’un véritable brain-trust de marketing fonctionnait autour du président de la France d’après, je ne croyais pas si bien dire.
Le coup du Tour de France, il nous l’avait déjà fait alors qu’il était ministre d’état de l’intérieur et d’autres choses le 20 juillet 2005, et déjà dans les Pyrénées, d’ailleurs.
Il serait venu à la Gay Pride, il aurait trouvé un taux militants/marchands du temple beaucoup plus significatif. Mais est-ce bien là ce qui l’intéresse ?
Libération a publié avant-hier un article assez bien ficelé sur « l’ouverture ». Comme les liens d’informations ne sont pas toujours très durables, voici l’intégralité de cet article :
Municipales: attention, danger pour la gauche !La gauche rêvait d'un repos estival mérité après une année électorale éprouvante ? Sarko - l'homme qui ne s'arrête jamais - a lancé par surprise la bataille des municipales !
Hier soir, Sarkozy a demandé aux 2.000 cadres de l'UMP réunis au carrousel du Louvre à Paris d'appliquer la stratégie de l'ouverture pour les municipales. Sarkozy tombe enfin le masque : l'ouverture n'est pas le signe qu'il est président de tous les Français mais il s'agit, à l'opposé, de la tactique électorale d'un chef de parti.
Et cette stratégie vise directement un but, comme en témoigne le discours de Sarkozy hier : gagner les municipales, qui seront le premier test électoral du quinquennat. Et peut-être le seul, au moins dans l'esprit de l'UMP, qui ne peut qu'améliorer ses résultats aux régionales de 2010.
Les nominations de Besson, Hirsch, et Kouchner, devaient déstabiliser la gauche pour les législatives. Celles de Lang
, Bockel (maire de Mulhouse !), Fadela Amara (peut-être utile pour le vote des banlieues), et d'autres demain, permettent de continuer à affaiblir la gauche qui se divise à chaque nouveau ralliement. D'ailleurs Sarkozy l'a admis explicitement hier soir en incitant l'UMP à "occuper tout le terrain" pour "affaiblir le PS".
Cette stratégie d'ouverture rend le clivage gauche-droite illisible pour les citoyens. Chaque annonce de débauchage d'une personnalité de gauche permet de dissimuler une politique de droite musclée : peines-planchers, franchises médicales, service minimum, bouclier fiscal... Pour gagner la présidentielle, Sark
ozy a débauché Jaurès, Blum et Mitterrand au service d'un programme libéral et sécuritaire. Pour les municipales, il débauche des cadres du PS...
Comment la gauche peut-elle se sortir du piège sarkozyen ? En se dé-ringardisant, en montrant un visage ferme et en réactivant le clivage droite-gauche ! Au lieu de se lamenter après chaque départ de baby-boomer opportuniste, elle doit jouer la carte des valeurs et du renouvellement. Elle doit être ferme et dénoncer les débauchages pour ce qu'ils sont : des trahisons à l'égard du peuple de gauche. Les choses sont assez claires : avons-nous vraiment besoin de responsables politiques ou de hauts fonctionnaires qui doivent leur carrière à la gauche et
qui se jettent aujourd'hui dans les bras de la droite pour une voiture avec chauffeur ? Ils s'arrangeront avec leurs conscience...
Au lieu de se perdre en querelles sur « l’ouverture", la gauche doit mener la bataille idéologique et politique sur chaque projet du gouvernement. Et, surtout, elle doit préparer les municipales : si elle ne fait pas une large place aux milieux populaires, au renouvellement et à la diversité, la gauche ne sera pas en mesure, demain, de combattre Sarkozy et sa jeune garde, de Rama Yade à Laurent Wauquiez et Rachida Dati.
Fin de l’article de Libé.
La phrase clé de cette analyse me semble être l’intention de rendre le « clivage gauche-droite illisible » pour les Français. Vont-ils se laisser tromper ? Jusqu’à présent, à chaque dérapage des valeurs, ils ont su mettre un terme, quelquefois tardif, parfois brutal, à la déliquescence des repères. Et plus durable et insensible est la dérive, plus dure est la réaction.
En attendant, la guerre de l’information fait rage :
Hier, au JT d’Antenne 2, Françoise Laborde, une des présentatrices les plus sympathiques depuis Georges de Caunes, soit dit en passant, présentait un sujet sur le 93, la Seine Saint Denis, exaltant la joie de ses habitants de vivre un enrichissement mutuel au sein d’un grand cosmopolitisme de cultures, de religions et de traditions. Ce qui est sans aucun doute exact.
Les différences font sauter les œillères, élargissent la tolérance et le respect mutuel, du moins chez les sujets dotés d’un QI minimal. En excluant tout effet de grégarité et de réaction « troupeau de moutons » qui sont les caractéristiques des groupes étanches comme le Front National ou les religions durement communautaires, les sociétés cosmopolites contribuent à cimenter une cohésion sociale résistante aux attaques ciblées. Car les attaques et autres pièges de la communication et du marketing sont toujours des attaques ciblées. Faciles à mettre au point en direction de communautés monolithiques, elles restent sans effet sur des sociétés riches d’opinions et de valeurs diverses, mithridatisées par leur pluralité.
Mais hier aussi, non plus sur Antenne 2, mais sur France-Info cette fois, on présentait un sujet sur une visite que notre ministre de l’Intérieur et des communautés territoriales, (mais pas des cultes comme je m’en inquiétais lors de sa nomination), Madame Alliot Marie rendait aux services de police de cette même Sein Saint Denis n°93.
Là, le discours était diamétralement opposé, réducteur et discriminatoire. On y entendait notamment un commerçant pleurnichard qui proposait un véritable strip tease à la ministre : « ils m’ont battu, vous voulez voir mon dos, mes bras, mes jambes ? ». Comme si la délinquance était l’apanage de la Seine Saint Denis.
Peut-être si ce brave homme était moins larmoyant, il serait moins battu. Antenne 2 montrait au marché de Saint Denis des commerçants qui tenaient leur stand depuis des décennies et qui ne se plaignaient nullement de l’évolution du quartier et de sa population. Il y en a qui y arrivent.
Ceci pour démontrer que suivant qu’on est berlusconien ou humaniste, on peut voir deux Seines Saint Denis là où il n’y en a qu’une.
Ceci dit, madame le ministre de l’intérieur n’a pas expliqué, lors de sa visite, comment elle allait tenir ses promesses sécuritaires en s’accommodant d’une réduction du nombre des fonctionnaires et d’un budget quasi-stationnaire…
La diminution de la délinquance passant aussi par une réforme de l’enseignement, le ministre intéressé, Xavier Darcos, n’a toujours pas expliqué non plus comment il allait réaliser le même tour de passe-passe avec la même carence d’ingrédients. En tout cas, en déclarant que « l’éducation nationale disposait du potentiel nécessaires d’heures supplémentaires », il a dit quelque chose dont on risque de reparler dans la rue à la rentrée. Ils ont bien fait de débaucher Jack Lang, il pourra toujours leur donner des leçons de flatterie et de flagornerie.
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