Dimanche 12 octobre, sur Canal +, à la fin de l’émission Dimanche +, Jean-François Copé a loué les qualités éminentes de notre Président : « On a un président de la République française qui, dans cette période, se montre absolument exceptionnel. Je le dis très simplement. Je pense qu'il fait œuvre de sang-froid et de maîtrise sur ces sujets ». Il crut opportun de préciser que ce n'était « pas par flagornerie» qu’il s’exprimait ainsi. Précaution bien inutile. Comment, à entendre un tel dithyrambe, pourrait-on le soupçonner d’une motivation aussi basse ?
Bien que sans compétence économique particulière, j’essaie, comme simple citoyen, de comprendre ce qui se passe. Notre pays va apporter une garantie de 360 milliards d’euros à un mécanisme de refinancement des banques. Je suppose que ces fonds ne vont pas être déboursés mais serviront de caution à des banques en mal de confiance. Un peu comme un père de famille se porte caution pour permettre à un de ses enfants de signer un bail pour louer un appartement. Il n’a pas à régler cette caution mais le bailleur pourra, en cas de défaut de paiement, se tourner vers lui pour récupérer son loyer.
Ce qui se passe dans le monde réel, c’est que ce père de famille doit alors démontrer, feuilles de paye et bulletin d’imposition à l’appui, qu’il a bien la capacité d’honorer cet engagement. De toute évidence, ce n’est pas le cas de notre pays. Celui-ci a ses caisses vides, cherche désespérément un milliard pour financer le RSA, supprime des postes de fonctionnaires et des garnisons pour réduire le déficit de notre budget. On nous répète à l’envi que notre dette de 1.200 milliards est insupportable, que nous faisons supporter le poids de notre mauvaise gestion aux générations futures mais aujourd’hui, nous prenons l’engagement, en cas de besoin, d’accroître cette dette de quelque 30% !
En 2005, le PNB des États-Unis s’élevait à 13.000 milliards de dollars. Un plan d’urgence de 700 milliards constitue donc environ 5% du PNB de 2005. Pour ce qui est de la France, 360 milliards d’euros valent à peu près 500 milliards de dollars. Notre PNB en 2005 ayant été de 2.200 milliards de dollars, notre plan d’urgence s’élève à 22% de ce PNB. Ne nous a-t-on pas répété à satiété que notre système bancaire était sain, peut-être simplement un peu contaminé par des titres toxiques venus des États-Unis ? L’homme exceptionnel qui préside la France peut-il nous expliquer pourquoi, en dépit d’une situation bien plus saine, notre effort est plus du quadruple de celui des États-Unis ?
Le même immense génie qui veut faire payer les spéculateurs peut-il nous expliquer pourquoi tout au long de cette semaine de crise on a évoqué la possibilité de faire fournir par les États des garanties au monde de la Finance ? Autrefois, à la veille de mesures monétaires importantes, on se gardait de toute fuite et on attendait le week-end, quand les marchés sont fermés, pour annoncer les mesures destinées à lutter contre la crise. Mais, en cet an de grâce 2008, confortés dans l’idée de ce soutien des États, d'immondes spéculateurs ne se sont pas fait faute d'acheter vendredi des titres au plus bas, pour les revendre dès lundi une fois la bonne nouvelle connue.
Quelle nouvelle d’ailleurs ? Jusqu’ici, il n’y a eu que l’annonce faite par l’homme incapable de contenir les mouvements spasmodiques de ses épaules. Le Parlement ne s’est pas encore prononcé. Il est vrai que, lorsque le Ministre de l’Éducation Nationale est incapable de faire une règle de trois, je doute que le parlementaire lambda soit accessible au raisonnement ci-dessus. Ce plan, qui ne vient récompenser que des spéculateurs, est donc assuré d’être adopté.