Amalgame dentaire et écologie : dernière modification le 01-04-2009
Par Estelle Vereeck,
Docteur en chirurgie-dentaire, auteur d'ouvrages sur les dents
L'éco-conscience doit-elle inclure les matériaux que nous avons en bouche ?
Amalgame dentaire et écologie sont-ils liés et de quelle manière ?
En responsabilisant chacun comme acteur de la préservation de l'environnement, la démarche éco-citoyenne incite à adopter de nouveaux comportements en matière de consommation et de mode de vie. Économiser l'eau, l'énergie, employer au quotidien les produits
les moins polluants pour épargner les nappes phréatiques, limiter ses déplacements, recycler ses déchets, etc., sont des réflexes que beaucoup ont déjà adopté ou sont en passe de le faire par
respect pour l'environnement. On nous invite aujourd'hui à raisonner en terme d'empreinte écologique qu'il faut réduire au maximum.
Photo: Didier Vereeck Galerie Arana
Mais s'est-on déjà préoccupé de l'empreinte écologique des matériaux qui restaurent nos dents ? Si certains produits de consommation sont plus respectueux de
l'environnement que d'autres, il en est de même des matériaux employés en dentisterie. On va voir ici qu'amalgame dentaire au mercure et écologie ne font pas bon ménage.
Déchets métalliques toxiques
Renoncer aux plombages au mercure est une recommandation de plus à inscrire dans le manuel du parfait éco-citoyen. En effet, le mercure, massivement posé dans la
bouche des Français et des Européens (respectivement 15 et 125 tonnes
par an, tout de même !) est un polluant redoutable, non seulement pour le corps mais aussi pour l'environnement
qu'il est appelé à contaminer après le décès des porteurs de plombages. L'amalgame est un déchet toxique. Le mercure qu'il contient pollue l'écosystème: soit sous forme de vapeurs au moment de
l'incinération, soit par décomposition naturelle dans les années qui suivent l'inhumation. Dans les deux cas, le mercure diffuse dans l'atmosphère, s'infiltre dans les sols et les nappes
phréatiques. Le problème se pose, non seulement pour le mercure, composant pour moitié des plombages, mais aussi pour tous les autres métaux (cuivre, étain, zinc, nickel, chrome, etc.), également présents dans l'amalgame dentaire et employés pour les couronnes, bridges et autres travaux de
prothèses. Ainsi, le matériau que vous choisissez pour restaurer vos dents engage, non seulement votre santé, mais aussi celle de la planète et donc celle de vos enfants, petits enfants et des générations futures.
Absence de mesures efficaces
Face à une telle menace pour l'environnement, la seule mesure à prendre est le bannissement de l'amalgame au mercure. Cette mesure, courageusement prise par
la Norvège en décembre 2007, n'est malheureusement pas en voie d'être adoptée par l'Union Européenne. On l'aura compris,
il ne faut pas attendre des autorités sanitaires ou environnementales qu'elles prennent la décision de bannir le mercure car trop d'enjeux
économiques prennent le pas sur l'écologie. Les 100 tonnes de mercure présentes dans la bouche des Français, les 1100 tonnes dans celles des
Européens, de même que les dizaines de tonnes qui s'accumulent dans les canalisations ou sont vaporisées dans l'atmosphère lors de la crémation ne semblent guère préoccuper le gouvernement, pas
plus que les écologistes semble-t-il. Pour toute mesure, la France compte durcir l'application de la loi sur la récupération des déchets d'amalgame provenant des cabinets dentaires, espérant
ainsi convaincre la Commission européenne de surseoir au banissement du mercure, pourtant sérieusement envisagé dans le cadre d'une stratégie engagée depuis 2005. Néanmoins, le problème majeur
lié au devenir du mercure post mortem est purement et simplement occulté.
Choix éco-citoyen
Il appartient donc à chacun, individuellement, de prendre ses responsabilités et de faire le choix en toute conscience d'un matériau moins polluant (composite,
céramique) pour faire obturer ses dents. Comme le soulignait le ministre norvégien de l'Environnement dans son communiqué de presse de décembre 2007, des matériaux alternatifs de bonne qualité
permettant de se passer du mercure existent. Leur biodégradabilité et leur biocompatibilité est supérieure à celle du plombage et des métaux employés en dentisterie. Seule ombre au tableau: leur coût et leur mise en œuvre
plus délicate que le banal plombage, vite posé à moindre frais.
Qu'on se le dise, on pourrait bien reconnaître davantage un éco-citoyen à ce qu'il a dans la bouche qu'aux paroles qui en sortent.
Attention : ceux qui choisiront de faire
déposer leurs plombages doivent savoir que l'opération impose certaines précautions pour éviter une intoxication acccrue au moment du retrait. En outre, il est important de réfléchir au choix des
matériaux de substitution. Ces questions importantes sont abordées dans le Pratikadent à la rubrique Plombage-dépose, dont un extrait peut être consulté sur le site des éditions Luigi
Castelli.
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matériaux
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